Survol des marchés financiers | Fiera Capital – Juin 2023
Contexte économique
Dans l’ensemble des pays développés, la croissance économique est demeurée relativement faible au cours des derniers mois. Les banques centrales semblent donc avoir atteint un de leurs objectifs : ralentir la croissance. Cependant, l’inflation demeure toujours beaucoup plus élevée que le niveau ciblé par ces dernières.
Aux États-Unis, la croissance économique des derniers mois s’est avérée inférieure aux prévisions. La création d’emplois est toutefois demeurée vigoureuse et le taux de chômage, malgré une légère hausse, reste encore tout près du creux historique. Ainsi, 253 000 emplois ont été créés en avril et 339 000 en mai. Durant le deuxième trimestre, le taux d’inflation, tel que mesuré par l’indice des prix à la consommation, a diminué. D’autres mesures d’inflation suivies de près par la Réserve fédérale (Fed) sont toutefois demeurées élevées. En conséquence, la Fed a décidé de hausser son taux directeur de 0,25 % en mai, puis a décrété une pause lors de sa rencontre de juin.
Notons que la crise de confiance qui a frappé le secteur bancaire américain à la fin du premier trimestre s’est estompée rapidement. Les difficultés financières ressenties par certaines banques régionales ont incité l’ensemble de l’industrie à resserrer les conditions de crédit. En étant plus sélectives dans l’octroi du crédit, elles visent à limiter le risque de pertes sur prêts. Ce geste de prudence apparaît particulièrement justifié compte tenu du ralentissement de la croissance économique provoqué par les hausses de taux des derniers mois. Par ailleurs, le deuxième trimestre a été marqué par d’intenses négociations entre la Maison-Blanche et l’opposition républicaine afin d’arriver à une entente sur le relèvement du plafond de la dette fédérale américaine. Le défaut d’une entente aurait pu provoquer une interruption des services gouvernementaux. En conséquence, les marchés ont connu un certain niveau de stress qui s’est dissipé avec la conclusion d’une entente finalisée le 1er juin.
La croissance de l’économie canadienne a été supérieure aux attentes des économistes et de la Banque du Canada grâce à la forte croissance des échanges commerciaux. De plus, les dépenses des consommateurs ont été dopées par les ventes d’automobiles. En effet, la livraison progressive d’automobiles commandées en 2022 est notamment responsable de la vigueur des dépenses de consommation. La tempête de verglas et la grève de certains services publics en avril, puis les feux de forêt qui font rage depuis le mois de mai devraient toutefois affecter les données officielles de croissance du deuxième trimestre. Elles seront publiées au cours de l’été. Au Canada, le taux d’inflation a affiché 4,4 % en avril après avoir touché 4,3 % en mars. La vigueur de la croissance et la hausse du taux d’inflation ont incité la Banque du Canada à hausser son taux directeur en juin, après avoir marqué une pause lors des rencontres de mars et avril.
À la toute fin de juin, on annonçait que l’inflation avait chuté à 3,4 % en mai. Cette baisse, surtout attribuable à la baisse du prix de l’essence, constituait une très bonne nouvelle.
En Europe, le ralentissement de l’économie a été particulièrement important en Allemagne où le PIB a affiché deux trimestres consécutifs de contraction. Malgré le glissement de l’Union européenne vers la récession, la Banque centrale européenne (BCE) compte poursuivre les hausses de taux afin de mater l’inflation. À 6,1 % en mai, l’inflation dans la zone euro est bien plus élevée que la cible.
Au Royaume-Uni, la croissance économique s’est limitée à 0,5 % au cours des deux derniers trimestres. Le taux d’inflation est finalement passé sous la barre de 10 %, mais l’inflation de base, qui exclut les aliments et l’énergie, a atteint 12 % durant le trimestre. Le combat contre l’inflation reste donc d’actualité et d’autres hausses de taux directeur sont à prévoir.
En cette fin de deuxième trimestre de 2023, l’inflation n’est pas une préoccupation pour les dirigeants chinois. En effet, le taux annuel d’inflation mesuré par l’indice des prix à la consommation n’est que de 0,2 %. Les autorités chinoises, à l’inverse de la majorité des pays développés, sont donc dans un mode de stimulation de la croissance. La plupart des économistes anticipent une croissance du PIB chinois supérieure à 5 % pour l’ensemble de 2023.
Politique monétaire et titres à revenu fixe
Les banques centrales nord-américaines ont entrepris une nouvelle phase dans le cycle de hausses des taux directeurs. En tout début d’année, la Fed et la Banque du Canada avaient toutes deux adopté une stratégie de hausses modestes du taux directeur. Elles indiquaient ainsi leur volonté de poursuivre la lutte à l’inflation, mais également une volonté d’ajuster la vigueur de leur intervention à l’amélioration des statistiques d’inflation. Dans le cas de la Fed, il importait aussi de donner un peu d’oxygène aux banques régionales, qui traversaient alors une période difficile.
Puis, la Banque du Canada a été la première à marquer une pause dans sa séquence de hausses de taux directeur. Il faut dire que les hausses de taux directeur n’ont pas un effet immédiat sur la croissance économique ni sur l’évolution de l’inflation. Les effets peuvent se faire sentir après plusieurs mois, selon l’ampleur des hausses et de la situation de l’économie. Ainsi, la vigueur de la croissance économique canadienne au premier trimestre et la légère hausse du taux d’inflation ont incité la Banque du Canada à hausser de 0,25 % le taux directeur après avoir marqué une pause lors des deux rencontres de mars et avril. Lors de l’annonce de sa décision le 7 juin, le Gouverneur de la Banque, Tiff Macklem, a indiqué que cette hausse pourrait très bien être suivie d’une
autre en juillet. La publication, le 27 juin, de la forte baisse de l’inflation apporte une donnée supplémentaire à la réflexion de la Banque du Canada. En effet, la progression annuelle de l’indice des prix à la consommation (IPC) est passée de 4,4 % pour avril à 3,4 % en mai.
Pour sa part, après avoir décrété en mai une hausse de 0,25 %, la Fed a décidé le 14 juin de maintenir son taux inchangé. À son tour, elle a indiqué que les hausses de taux pourraient se poursuivre et qu’on ne devait pas espérer de baisse de taux directeur avant la fin de 2024.
En Europe, où l’inflation est nettement plus élevée, la BCE a poursuivi ses hausses de taux. Durant le deuxième trimestre, elle a procédé à deux hausses de 0,25 %. Au premier trimestre, elle avait effectué deux hausses pour un total de 1 %. Au Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre a également poursuivi ses hausses de taux afin d’y combattre la plus forte inflation des pays développés.
Compte tenu de la légère hausse du taux d’inflation au Canada, le marché obligataire canadien a affiché un recul surtout à partir de la mi-mai. Il avait anticipé la décision de la Banque du Canada de hausser le taux directeur. Ainsi, la hausse des taux obligataires s’est traduite par une baisse des prix des obligations.
Durant le mois de juin, la Banque du Canada et la Fed ont pris des décisions différentes en ce qui a trait à leur politique monétaire. Le taux directeur canadien a été haussé alors que celui des États-Unis est resté inchangé. Par conséquent, cela a entraîné une hausse de la valeur du dollar canadien contre la devise américaine.
Marchés boursiers
Les marchés boursiers mondiaux ont connu un excellent début de trimestre grâce à des résultats financiers trimestriels dépassant généralement les attentes. Les rendements trimestriels sont toutefois différents d’une région à l’autre. Ainsi, les titres des sociétés de technologie de grande capitalisation se sont démarqués. De ce fait, les indices américains sont à la hausse. Au cours du deuxième trimestre, l’indice NASDAQ a bondi d’environ 13 % et le S&P 500 a gagné plus de 8 %. Ce dernier a franchi en juin le seuil du marché haussier, c’est-à-dire qu’il a affiché une progression de plus de 20 % depuis le creux touché en novembre 2022.
Durant le deuxième trimestre, le prix du baril de pétrole a baissé d’environ 7 %. La décision des pays producteurs de réduire leur production n’a donc pas produit l’effet désiré. La baisse prévisible de la demande mondiale dans un contexte de ralentissement généralisé de la croissance a pesé davantage sur les prix. Ce contexte a affecté le marché boursier canadien. L’indice S&P TSX termine donc le deuxième trimestre à peu près au même
niveau qu’au 31 mars. Par ailleurs, les actions canadiennes de petite capitalisation ont subi une baisse. Elles sont généralement plus touchées lorsque les prix de l’énergie sont en baisse.
La progression des marchés européens a été minime. Ils ont été affectés par la volonté de la BCE et de la Banque d’Angleterre de poursuivre la hausse des taux directeurs. Rappelons que le taux d’inflation demeure très élevé des deux côtés de la Manche.
Enfin, les marchés émergents ont été sous l’influence de deux facteurs négatifs : la faiblesse du secteur manufacturier chinois et la perspective d’une croissance de l’économie mondiale plus faible qu’anticipée.
À l’horizon
Durant le deuxième trimestre de 2023, les banques centrales ont généralement poursuivi le resserrement de leurs politiques monétaires. En Amérique du Nord, la Fed et la Banque du Canada ont toutes deux marqué des pauses temporaires. D’autres hausses de taux sont à prévoir. Leur ampleur dépendra de l’évolution de l’inflation. Bien que les plus récentes statistiques liées à l’inflation indiquent une amélioration, on est encore bien loin des cibles de ces deux banques centrales.
Au printemps, les difficultés connues par plusieurs banques régionales américaines ont démontré que certaines entreprises sont très fragiles aux répercussions des hausses de taux d’intérêt. Progressivement, on assistera à une augmentation du nombre d’entreprises en difficulté et à un ralentissement important de l’économie. On constate déjà l’effet des hausses de taux et de prix sur les mises en chantier.
En cette fin de deuxième trimestre, nous croyons toujours que la probabilité d’un ralentissement important de l’économie mondiale est élevée.
Au cours des 12 à 18 prochains mois, le prix des biens pourrait bien atteindre un sommet. Toutefois, l’inflation de base pourrait bien s’avérer plus tenace. Les salaires, l’inflation des services et les coûts de logement pourraient rester élevés. Les banques centrales pourraient alors être tentées de poursuivre la hausse des taux quitte à provoquer une récession.
Un tel contexte serait particulièrement difficile pour les investissements dans les classes d’actif traditionnelles. Les difficultés des entreprises affecteraient particulièrement les actions. Les actions canadiennes et celles des pays émergents pourraient être moins pénalisées, grâce à l’environnement inflationniste. Les hausses de taux nuiront à la valeur des obligations, mais elles devraient accuser des reculs moins importants que les actions. Nous favorisons le maintien d’un haut niveau de liquidité des portefeuilles afin de protéger le capital contre les baisses des marchés.