Les fonds de dividendes : l’oasis des gens prudents
Bon nombre d’investisseurs en ont mare des rendements de 4 à 5 % offerts présentement par les titres à revenu fixe et salivent rien qu’à l’idée d’obtenir 10 % par année. Lorsque ces derniers découvrent que les fonds de dividendes d’actions canadiennes ont procuré en moyenne (en date de septembre 2007) une performance annuelle de 14,8 % en 5 ans, de 10,3 % en 10 ans et de 11,9 % en 15 ans, ils sont estomaqués.
Est-ce trop beau pour être vrai ? Bien sûr que non, car les dividendes sont synonymes de profitabilité. Pourquoi ? Parce que les actionnaires détiennent les droits de propriété de l’entreprise et en partagent ainsi les succès et les revers. Alors, lorsqu’une société réussit à rentabiliser ses opérations, son premier réflexe sera généralement de chouchouter ses porteurs de parts en leur versant des dividendes.
La générosité des entreprises dans la distribution de cette gratification dépend en premier lieu de ses propres besoins. Dans le cas de sociétés parvenues à un stade de maturité, c’est-à-dire les Blue Chips, une grande partie du bénéfice sera versée en dividendes. Par contre, si les entreprises sont jeunes et en pleine croissance, l’essentiel des profits pourrait servir à en financer l’essor.
Le pourcentage du bénéfice net versé en dividendes varie donc énormément d’une entreprise à l’autre. Toutefois, une chose est certaine, un rendement en dividendes élevé (montant des dividendes/cours de l’action) caractérise généralement une entreprise rentable, bien établie et solide. Au Canada, les sociétés les plus généreuses avec leurs actionnaires évoluent dans les services financiers, les télécommunications et les services publics. Il s’agit donc de placements assez conservateurs qu’un investisseur peut détenir à long terme.
Une autre caractéristique non négligeable est que l’accroissement des dividendes est de nature à provoquer une montée du prix de l’action. La politique de versement de dividendes est donc un facteur clé influençant la valeur d’une entreprise. Ainsi, certaines sociétés, telles que Power Corporation, Banque Royale et Banque Nationale, se sont taillées une réputation appréciable auprès des investisseurs en raison de la constance avec laquelle le flot de dividendes s’est accru ces dernières années.
Dans l’ensemble, cependant, le rendement en dividendes a fléchi au fil des ans au Canada. De 1960 à 1998, le dividende annuel moyen de l’indice phare canadien s’est établi à 3,4 %, révèle l’étude Évolution récente des marchés d’actions et ses conséquences, publiée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Mais le taux a reculé depuis et s’élevait à 2,44 % le 30 mars dernier. Ce repli s’explique en grande partie par le fait que de plus en plus d’entreprises augmentent la valeur de leurs actions (et avantagent les actionnaires) en rachetant les titres en circulation à même leurs bénéfices.
Une dernière particularité des dividendes est que leur traitement fiscal est avantageux. En effet, le taux maximal d’imposition des dividendes versés par les sociétés ouvertes s’élève actuellement à 29,7 % au Québec, comparativement à 48,2 % pour les revenus d’intérêt. C’est donc un placement encore plus intéressant lorsqu’il ne fait pas partie d’un REER.
Choisir avec doigté
Avec un tel profil, pas étonnant que les fonds de dividendes soient en vogue. Leur popularité s’appuie sur les qualités suivantes : constance des rendements, limitation du risque, régularité des revenus et fiscalité avantageuse des dividendes et du gain en capital.
Le risque qui guette cependant les investisseurs est d’être ébahis par ces qualités et, conséquemment, ne pas sélectionner ces fonds diligemment. Pourquoi est-ce important de bien choisir? Parce que cette catégorie de fonds englobe des portefeuilles très différents les uns des autres, puisque l’actif peut être canalisé dans les actions ordinaires, les actions privilégiées, les parts de fiducies de revenu ou les obligations corporatives.
Les composantes clés de ces fonds sont bien entendu les actions ordinaires et privilégiées. Qu’est-ce à dire? Les actions privilégiées sont une action de type particulier qui rapporte un montant fixe de dividendes, puisé à même les profits de l’entreprise. Leur nom signale qu’elles ont priorité sur les actions ordinaires en ce qui concerne le paiement des dividendes. Elles sont en quelque sorte un titre hybride, plus sécuritaire que les actions ordinaires, mais plus risqué que les obligations corporatives.
Bien que les gestionnaires de fonds de dividendes mettent l’emphase sur ces titres, il y a un hic, et il est de taille : les actions ordinaires munies de dividendes élevés et les actions privilégiées sont souvent émises par les mêmes entreprises canadiennes. Par conséquent, les fonds pourraient dépendre d’un nombre restreint d’émetteurs. Pour contourner ce problème, les gestionnaires font normalement appel aux parts de fiducies de revenu et aux obligations de sociétés (corporate bonds).
Jusqu’à tout récemment, les fonds de dividendes fortement investis dans les fiducies de revenu brillaient avec éclat. Étant donné l’avantage fiscal dont jouissent ces fiducies, tous les projecteurs étaient tournés vers elles. Seulement voilà, le gouvernement fédéral a modifié les règles fiscales en novembre 2006 de manière à ce que l’imposition des distributions des fiducies de revenu devienne semblable à celle des dividendes d’ici la fin de 2011. Cette décision, visant à décourager les sociétés ouvertes de se convertir en fiducies de revenu, n’a pas manqué de jeter une douche froide sur la valeur de ces unités et sur le rendement des fonds qui y sont exposés.
Au reste, les obligations d’entreprises constituent le placement le moins avantageux à l’extérieur du REER, car les revenus d’intérêt sont imposables à 100 %. Il faut noter que les obligations ont tout de même l’avantage d’accroître la stabilité du fonds, tout comme les actions privilégiées.
En comprenant mieux les fonds de dividendes, un investisseur peut donc maximiser les avantages qu’il en tire. Il faut aussi noter que les fonds de revenu mensuel, parfois aussi appelés fonds diversifiés, ont fait leur apparition depuis quelques années et sont composés des quatre mêmes classes d’actifs. Ils méritent aussi notre attention.