À tout hasard, souhaiterions-nous un retour à la mode des années 1970 ? Rassurez-vous, il ne s’agit pas d’un retour en force des pantalons patte d’éléphant ni des chemises à motif psychédélique. La pandémie mondiale et la guerre en Ukraine, déclenchée par le dictateur russe, ont plutôt remis au goût du jour les risques de stagflation à la sauce années 1970, une rare situation où croissance faible et inflation élevée vont de pair.
Qu’est-ce que la stagflation ?
Le mot stagflation tire son origine de la stagnation, une période de faible activité économique et de chômage élevé, survenant au même moment où l’inflation s’emballe et étouffe le consommateur. La stagflation se produit lorsque les taux d’intérêt sont suffisamment faibles pour stimuler la demande alors que l’offre est limitée. La stagflation est souvent perçue comme contre-intuitive, puisque le chômage et l’inflation ont plutôt tendance à évoluer en sens opposés ; un fait statistique connu sous le nom de courbe de Phillips, identifié par l’économiste néo-zélandais du même nom, au cours est années 1950.
Une situation plutôt rare
La stagflation demeure plutôt rare. Les plus récents épisodes ont eu lieu au cours des années 1970, suivant deux importants chocs pétroliers. Pour la petite histoire, le premier de ces chocs se produit en 1973 dans la foulée de la guerre du Kippour, une rixe relativement courte entre une coalition menée par la Syrie et l’Égypte d’un côté, et Israël de l’autre. Pour punir l’intervention américaine en appui à Israël, les pays arabes membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, la fameuse OPEP, décident, en octobre 1973, de l’augmentation unilatérale du prix du brut. Ce dernier passe rapidement de 3 $ à 12 $ le baril (de 18 $ à 72 $ en dollars d’aujourd’hui). Pour démontrer son sérieux, l’OPEP appuie son geste d’une baisse importante de la production de pétrole brut. Pour couronner le tout, l’Arabie saoudite annonce la suspension de ses exportations du précieux produit en direction des États-Unis. Dans les pays importateurs de pétrole, c’est la consternation (et la stagnation !). La hausse des prix de l’énergie fait exploser les coûts de production et ceux du transport. Un important repli de la capacité productive, la hausse du chômage et la flambée des prix à la consommation s’ensuivent.
Le phénomène se répète en 1979 au moment de la révolution iranienne alors que le deuxième exportateur de pétrole mondial n’arrive plus à livrer devant les troubles politiques liés à l’avènement de la République islamique d’Iran. Entre avril 1979 et avril 1980, le prix du baril de pétrole passe de 16 $ à 40 $ sur le marché américain (de 57 $ à 142 $ en dollars d’aujourd’hui).
À 12,9 %, l’inflation atteindra alors de nouveaux sommets au Canada. La croissance économique sera plutôt molle à la fin de la décennie débouchant sur une récession en bonne et due forme au début des années 1980.
La poussée récente de l’inflation est-elle synonyme de stagflation ?
La récente poussée de l’inflation nous force à nous interroger sur sa nature. Au taux de 5,7 % en février 2022, nous n’avions pas vu l’inflation aussi élevée depuis le début des années 1990, une époque où la Banque du Canada n’avait pas encore adopté son paradigme actuel concernant le ciblage de l’inflation. Il appert donc que l’inflation s’installe présentement bien au-dessus de la cible de 1 % à 3 % visée par la banque centrale (graphique). Trois grands facteurs sont généralement énoncés pour expliquer le phénomène.
Graphique : La poussée récente de l’inflation est-elle stagflationniste ?
Source : Statistique Canada et calculs de l’auteur
Premier facteur : le rebond post-pandémique
Rappelons-nous que la stagflation est une période où l’activité économique stagne. La forte croissance économique actuelle brouille les cartes. En effet, cette dernière s’explique par le rebond de l’activité post-pandémique et elle n’est pas soutenable à long terme, c’est-à-dire que la force de la reprise se veut l’image miroir de l’important déclin subi par l’économie mondiale en 2020, une situation qui s’applique également à l’inflation. Cela dit, les fondamentaux liés à l’économie canadienne restent tendus. La main-d’œuvre, rare avant la pandémie, se fait de plus en plus prier, alors que la croissance de la productivité demeure plutôt décevante au pays depuis plusieurs décennies. Deux facteurs qui devraient normalement contribuer à maintenir le taux de croissance tendanciel de notre économie sous les standards du passé et justifier des taux d’inflation plus élevés si la demande ne s’essouffle pas après le rebond.
Deuxième facteur : la demande robuste des ménages
L’épargne accumulée par les ménages canadiens lors des vagues successives de confinement cherche, au cours des derniers mois, à s’exprimer. De plus, étant donné la nature de la crise et les nécessités imposées par la distanciation physique, le pouvoir d’achat des Canadiens s’est davantage dirigé vers les biens au détriment de services. Conjuguée aux perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales qui émoussent la capacité des entreprises à satisfaire rapidement leur clientèle, l’inflation sur le prix des biens (5,9 %) s’est montrée plus de deux fois plus importante que celle sur le prix des services (2,7 %) en moyenne au cours de la dernière année.
Troisième facteur : l’offre insuffisante pour satisfaire la demande
Au-delà des perturbations sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, la pénurie manifeste de semi-conducteurs contraint la production dans les secteurs de l’électronique, des télécommunications et de l’automobile pour ne nommer que ceux-là. Les goulots d’étranglement sont toujours nombreux du côté du transport, autant terrestre que maritime, et le secteur de la construction ne suffit pas à la demande. L’automne dernier, les spécialistes du secteur estimaient le manque de logement entre 40 000 et 60 000 unités au Québec seulement. Pas surprenant de voir les prix des logements grimper dans de telles circonstances.
Comme si ce n’était pas suffisant, l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février dernier a poussé les cours du pétrole au-delà des 100 $ américains le baril, contribuant à l’augmentation des coûts de transport. Ce conflit a également influencé le prix des denrées, à commencer par les céréales, une tendance qui peut se maintenir pendant de nombreux mois. N’oublions pas que l’Ukraine est le 5e plus gros producteur de blé au monde, le 6e producteur de maïs et le 7e producteur d’orge. Sans compter que la Russie, premier producteur mondial de blé et d’orge, ne participera pas à sa pleine capacité au marché mondial sous le coup des sanctions internationales. En tenant compte du fait que les prix des aliments ont déjà subi en partie les affres du réchauffement climatique, l’épineuse situation ukrainienne pourrait restreindre davantage l’offre alimentaire et maintenir les prix élevés.
Est-ce l’annonce du retour de la stagflation ?
Si la stagflation survient lorsque les taux d’intérêt demeurent suffisamment faibles pour stimuler la demande devant une offre qui peine à suivre, il semble que certaines conditions soient présentement réunies pour soulever quelques craintes au pays. D’un côté, la Banque du Canada a tardé à relever son taux directeur croyant au caractère passager de l’inflation, ce qui a contribué à soutenir la demande. De l’autre côté, les perturbations géopolitiques affectant le prix du pétrole ressemblent étrangement aux épisodes vécus dans les années 1970. Néanmoins, la stagflation implique également un taux de chômage élevé, ce que le scénario actuel de pénurie de main-d’œuvre ne nous permet pas d’envisager au pays. S’il est vrai que l’économie canadienne sera encore affectée d’ici la fin de l’année par la cherté du pétrole et des aliments et que l’activité économique pourrait pâtir de l’incertitude liée à la guerre et à cette pandémie qui n’en finit plus, les spécialistes sont loin d’appréhender une hausse marquée du chômage et la stagnation de l’activité. Qu’on se le dise, le retour des pantalons patte d’éléphant n’est donc probablement pas pour cette année encore.
Le régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) vise à assurer la sécurité financière d’un bénéficiaire atteint d’une déficience grave et prolongée de ses fonctions physiques ou mentales. Son traitement fiscal avantageux et les subventions auxquelles il donne accès font de ce régime un des piliers solides de la santé financière des personnes vulnérables.
LES INTERVENANTS
Les principaux intervenants d’un REEI sont le titulaire et le bénéficiaire. Le titulaire met en place et administre le REEI, il effectue ou autorise des cotisations au régime. Le titulaire du REEI peut parfois en être le bénéficiaire. En effet, si ce dernier est majeur et apte, il pourra être titulaire ou cotitulaire du REEI. Le bénéficiaire est celui qui retirera des sommes du REEI; il doit remplir toutes les conditions suivantes :
- être admissible au crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH);
- détenir un numéro d’assurance sociale;
- résider au Canada;
- être âgé de 59 ans ou moins le 31 décembre de l’année dans laquelle le régime est ouvert.
Ces exigences doivent être satisfaites au moment d’ouvrir le REEI et chaque fois qu’une cotisation ou une subvention est déposée au régime. Un bénéficiaire ne peut détenir qu’un seul REEI à tout moment. Cependant, un REEI peut avoir plus d’un titulaire en même temps et au cours de son existence. Le bénéficiaire, ses parents, des membres de sa famille ou d’autres cotisants autorisés peuvent contribuer au régime.
COTISATIONS
Limitées à 200 000 $ à vie (sans maximum annuel), les cotisations peuvent être versées jusqu’à la fin de l’année où le bénéficiaire atteint 59 ans. Ce plafond inclut les cotisations en tant que telles et, le cas échéant, les roulements d’un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) d’un parent décédé ou d’un régime enregistré d’épargne-études (REEE).
Même si aucun plafond annuel n’est imposé, outre le plafond viager de 200 000 $, la subvention canadienne pour l’épargne-invalidité (SCEI) annuelle est, quant à elle, limitée, ce qui rend moins avantageux les versements annuels très importants. Comme c’est le cas pour le REEE, la cotisation au REEI n’est pas déductible.
SUBVENTION CANADIENNE POUR L’ÉPARGNE-INVALIDITÉ (SCEI)
Les cotisations à un REEI donnent droit aux SCEI au taux de 100 %, 200 % ou 300 %, selon le revenu familial net et le montant des cotisations. Pour déterminer le montant des subventions, on utilise comme référence le revenu familial de la deuxième année précédente. Ainsi, en 2022 (année visée), on se base sur le revenu gagné en 2020 (année de référence).
- Pour un bénéficiaire dont le revenu familial est inférieur ou égal au deuxième seuil d’imposition fédéral (100 392 $ en 2022), la SCEI représente 300 % sur les premiers 500 $ versés au régime et 200 % sur les cotisations suivantes allant jusqu’à 1 500 $.
- Pour un bénéficiaire dont le revenu familial dépasse le seuil indiqué (100 392 $ en 2022), la SCEI égale 100 % des cotisations versées.
La SCEI est plafonnée à 10 500 $ par année et à 70 000 $ à vie. Les subventions sont versées jusqu’à la fin de l’année où le bénéficiaire atteint 49 ans.
Prenons un exemple d’un bénéficiaire dont le revenu familial s’élève à 75 000 $. En 2022, un montant de 1 500 $ est déposé dans son REEI. La première tranche de 500 $ de cotisations sera subventionnée à hauteur de 300 % (1 500 $). La tranche suivante de 1 000 $, quant à elle, donnera droit à une subvention de 200 % (2 000 $). Ainsi, la cotisation de 1 500 $ aura donc généré une subvention totale de 3 500 $.
Si, pendant 20 ans, le revenu familial du bénéficiaire ne dépasse pas le seuil donnant droit à la subvention maximale, il aura reçu, en 20 ans, 70 000 $ de subventions (3 500 $ par année), en ne cotisant au total que 30 000 $ (1 500 $ par année). Il s’agit d’un excellent retour sur l’investissement sans même considérer les rendements.
BON CANADIEN POUR L’ÉPARGNE-INVALIDITÉ (BCEI)
Les familles à plus faible revenu (moins de 50 197 $ en 2022) sont admissibles à un BCEI pouvant aller jusqu’à 1 000 $ par année. Plafonnés à 20 000 $ à vie, les BCEI ne dépendent pas du montant cotisé à un REEI et peuvent être versés jusqu’à la fin de l’année où le bénéficiaire atteint l’âge de 49 ans.
Notons qu’il est possible de réclamer les subventions et les bons inutilisés des dix dernières années. Pour ce faire, le bénéficiaire doit être admissible à la SCEI et au BCEI et être âgé, au moment de la demande, de 49 ans ou moins.
CRÉDIT D’IMPÔT POUR PERSONNES HANDICAPÉES (CIPH)
Le bénéficiaire du REEI doit se qualifier au CIPH, aussi connu comme le montant pour personnes handicapées. L’admissibilité doit être vérifiée en continu et non seulement à l’ouverture du REEI.
Il s’agit d’un crédit d’impôt non remboursable pour une personne ayant une déficience grave et prolongée. Pour y avoir droit, un médecin qualifié doit certifier que la personne visée répond aux critères définis dans la Loi de l’impôt sur le revenu. L’agence du revenu du Canada doit approuver la demande, laquelle se fait par le formulaire T2201 — Certificat pour le crédit d’impôt pour personnes handicapées.
D’autres conditions doivent être respectées, à savoir :
- La déficience des fonctions physiques ou mentales doit être grave et prolongée (il est raisonnable de s’attendre à ce qu’elle dure au moins 12 mois consécutifs) ;
- La déficience doit restreindre toujours ou presque toujours (au moins 90 % du temps) le particulier.
La capacité à travailler n’est pas prise en compte lorsqu’on établit l’admissibilité au CIPH.
RETRAITS
Le bénéficiaire devra, au plus tard durant l’année de ses 60 ans, commencer à tirer un revenu du REEI.
EFFETS DU REEI SUR LES AUTRES PRESTATIONS DU GOUVERNEMENT
Les sommes détenues dans le REEI ou qui en sont retirées n’ont pas de répercussion sur l’admissibilité aux prestations fédérales, comme l’allocation canadienne pour enfants, le crédit pour la taxe sur les produits et services, le crédit pour la taxe de vente harmonisée, le Supplément de revenu garanti, la pension de la Sécurité de la vieillesse ou les prestations d’assurance-emploi. Bien qu’en général, le REEI ait peu d’incidences sur les prestations d’aide sociale (jusqu’à 950 $ par mois), le fait de détenir un actif considérable (plus de 262 000 $ à 60 ans) dans le régime peut affecter l’admissibilité à certains programmes d’aide sociale du Québec, dont les tarifs dans un CHSLD.
DÉCÈS
Au décès du bénéficiaire, le solde du REEI (moins les montants de retenue à rembourser au gouvernement) est remis à la succession au plus tard à la fin de l’année civile suivant celle du décès, et toute portion imposable doit être incluse dans le revenu de la succession.
ROULEMENT DU REER VERS LE REEI
Au décès d’un particulier, il est possible de transférer, sans impact fiscal, son REER vers le REEI de son enfant ou petit-enfant à charge financière. Le montant du transfert ne doit toutefois pas dépasser le plafond cumulatif pour le REEI, soit 200 000 $ moins toute cotisation antérieure effectuée au REEI. Ce roulement ne donne pas droit aux SCEI. De plus, comme les sommes provenant du REER n’ont pas encore été imposées, elles le seront entre les mains du bénéficiaire au moment du retrait.
ROULEMENT DU REEE VERS LE REEI
Si le bénéficiaire d’un REEE ne fait pas d’études en raison d’une déficience physique ou intellectuelle le rendant admissible au CIPH, il est possible, sous certaines conditions, de transférer le revenu accumulé (à l’exclusion des subventions et des bons) du REEE à un REEI.
Voici les règles s’appliquant au transfert :
- Les cotisations au REEE sont remises au cotisant du REEE (souvent le parent) ;
- Les subventions canadiennes pour l’épargne-études, les bons canadiens pour l’épargne-études et les incitatifs québécois pour l’épargne-études déposés dans le cadre du REEE sont remboursés au gouvernement ;
- Le REEE devra être fermé au plus tard à la fin de février de l’année suivant celle où le roulement a lieu ;
- Le revenu de placement du REEE est remis au REEI ; ce transfert réduit d’autant les droits de cotisation disponibles ;
- Le montant du transfert ne donne pas droit à la SCEI ;
- Au moment du retrait, le montant transféré est inclus dans la partie imposable du revenu versé au bénéficiaire.
En conclusion, pour une personne souffrant d’un handicap, le REEI constitue un véhicule de placement financièrement et fiscalement avantageux.
Parmi les nombreuses options et stratégies d’épargne qui s’offrent à vous, comme le Régime enregistré d’épargne-retraite (REER), le Régime enregistré d’épargne-études (REEE) et le Compte d’épargne libre d’impôt (CELI), pour ne nommer que celles -là, il en est au moins une qui demeure encore méconnue : le Régime de retraite individuel (mieux connu sous son acronyme RRI). Le RRI est un régime de pension à prestations déterminées, destiné habituellement à un seul participant, un haut salarié. Il est mis en place par une entreprise et vise à payer une rente viagère généralement pour son seul participant. Cet article a pour but de faire la lumière sur la pertinence de mettre sur pied un Régime de retraite individuel (RRI) pour un médecin qui exerce en société.
LIMITES DE L’ÉPARGNE-RETRAITE ENREGISTRÉE
Au Canada, un particulier peut cotiser annuellement 18 % de ses revenus gagnés de l’année précédente à un REER. Le revenu gagné inclut notamment le revenu d’emploi, le revenu net d’entreprise et de location et exclut notamment les dividendes. Ce seuil est établi de façon à permettre l’accumulation, au fil d’une carrière, d’un capital suffisant pour financer un revenu de retraite adéquat. Il existe toutefois un plafond annuel de cotisations qui est fixé à 29 210 $ en 2022. Un particulier dont le revenu gagné dépasse 162 277 $ ne pourra généralement rien verser dans un REER pour la portion au-delà de ce seuil.
Le RRI, comme le REER, procure un report d’impôts. Il permettra une cotisation maximale établie selon l’âge du contribuable. Habituellement, un contribuable de plus de 40 ans pourra verser à son RRI une cotisation annuelle supérieure à la cotisation maximale admissible au REER. Le graphique ci-dessous illustre sommairement, selon l’âge d’un contribuable dont les revenus sont élevés, le montant maximal qui pourrait être versé à un REER ou à un RRI (figure).
figure | Comparaison entre un RRI et un REER
Par exemple, en supposant la mise en place d’un RRI à l’âge de 40 ans, cette épargne annuelle supplémentaire peut se traduire, à 65 ans, par un capital-retraite plus important. On remarque toutefois que ces sommes proviennent essentiellement d’un transfert d’actifs de l’entreprise au RRI. Enfin, on peut aussi conclure que si des sommes supérieures à la marge REER peuvent être injectées dans le RRI après l’âge de 40 ans, c’est l’inverse qui se produit avant cet âge. Il n’est donc habituellement pas pertinent de mettre en place un RRI avant l’âge de 40 ans.
LES POUR ET LES CONTRE
Le RRI peut donc offrir un plus grand potentiel d’épargne enregistrée (à l’abri de l’impôt) que le REER. Toutefois, il ne constitue pas pour autant une panacée. Le tableau ci-dessus brosse un portrait des principaux arguments pour et contre la mise en place d’une telle structure (tableau).
Tableau | Avantages et inconvénients d’un RRI
Avantages |
Inconvénients |
- Un potentiel d’épargne plus élevé que le REER (après l’âge de 40 ans)
- Possibilité de racheter le service passé
- Possibilité d’injecter des sommes supplémentaires déductibles si la retraite a lieu avant l’âge de 65 ans
- Possibilité de fractionner la rente RRI avec un conjoint dès la retraite (et non à compter de 65 ans comme pour les REER)
- Création d’un patrimoine autonome et distinct (insaisissable)
|
- Des frais de mise en place et d’administration élevés
- Administration plus lourde que celle d’un REER (nécessite un actuaire, des fiduciaires, etc.)
- Certaines restrictions applicables au moment du décaissement
|
DÉCAISSEMENT
Au moment de la retraite, il existe quelques options de décaissement du RRI. Chacun de ces choix présente ses particularités et doit faire l’objet d’une analyse poussée.
- Transfert vers un CRI ou un REER : L’option du transfert, peut-être celle que le participant préférerait, comporte au moins deux lacunes importantes. D’une part, un tel transfert sera soumis aux plafonds permis par le Règlement de l’impôt sur le revenu et une partie du transfert serait probablement imposable. D’autre part, si les retraits subséquents du REER étaient effectués avant 65 ans, le particulier perdrait la possibilité de partager ceux-ci avec son conjoint.
- Souscription (achat) d’une rente viagère : Tout comme pour le REER, il sera possible d’utiliser le capital du RRI pour faire l’acquisition d’une rente viagère. Sans faire la promotion ou le procès de ce produit par ailleurs très souvent pertinent, nous pouvons toutefois affirmer que le particulier perd la maîtrise de sommes possiblement importantes.
- Paiement d’une prestation à même le régime : Cette option nécessite le maintien du régime et le paiement des prestations selon la conception dudit régime. Le participant conserve alors la maîtrise de ses actifs et ne risque pas de voir une partie importante de son capital soumise à une imposition immédiate. Il devra toutefois maintenir le régime en vigueur avec les frais annuels que cela comporte.
CONCLUSION
En terminant, il faut rappeler que la mise en place d’un RRI doit être précédée d’une évaluation quant à sa faisabilité et à sa pertinence considérant notamment les frais en cause, les objectifs de retraite, la situation familiale et les autres options d’investissement offertes par la société.
Le fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) représente un des deux choix de conversion possibles des sommes accumulées dans votre régime enregistré d’épargne-retraite (REER), lequel doit être transformé au plus tard dans l’année où vous atteignez 71 ans. Étant un prolongement du REER, le FERR offre un avantage certain : l’épargne qui s’y trouve continue de fructifier à l’abri de l’impôt jusqu’à son retrait. Découvrez le fonctionnement de ce régime afin d’en tirer le maximum.
Conversion d’un REER en FERR
Lorsque vous désirez transformer vos REER en FERR, vous devez en informer tous les établissements financiers où vous détenez un REER. Ces derniers vous ouvriront alors un compte FERR.
La conversion se fait sans aucune répercussion fiscale puisque les sommes sont transférées directement du REER à votre compte FERR. Vous devez procéder à la transformation de vos REER au plus tard le 31 décembre de l’année où vous atteignez 71 ans.
Avant cet âge, rien ne vous oblige à le faire. Toutefois, votre niveau de vie pourrait exiger des retraits de vos REER si vos revenus réguliers (ex. : fonds de pension, Régime des rentes du Québec, Pension de la Sécurité de la vieillesse) ne sont pas suffisants. Vous pourriez alors soit retirer directement du REER, soit convertir votre REER en FERR et ensuite effectuer les retraits nécessaires.
D’un point de vue fiscal, l’impôt sur le retrait du REER ou du FERR est identique. En revanche, à compter de l’âge de 65 ans, le retrait d’un FERR devient admissible au crédit d’impôt pour pension, ce qui n’est pas le cas pour celui qui est effectué d’un REER. Vous aurez droit à cet avantage si vous n’avez pas déjà ce crédit par une rente d’un fonds de pension par exemple.
Retrait minimal
Le retrait minimal obligatoire du FERR repose sur l’âge du rentier ou du conjoint, et ce choix se fait au moment de la transformation. Il serait pertinent de choisir l’âge du conjoint plus jeune pour ce calcul afin de réduire les retraits obligatoires du FERR, tout en conservant la flexibilité de sortir des sommes plus importantes au besoin.
Avant 71 ans, la formule suivante détermine le montant du retrait minimal :
1 ÷ (90 – l’âge au début de l’année).
Ainsi, le minimum sera de 4 % à 65 ans (1 ÷ (90 – 65)).
À compter de 71 ans, le retrait minimal obligatoire du FERR augmente avec l’âge (tableau). Il est donc souvent préférable de convertir, avant l’âge de 71 ans, les REER par tranches selon les besoins afin de profiter du report d’impôt le plus longtemps possible. Ainsi, les sommes non nécessaires sont conservées dans les REER et seule la portion à retirer dans l’année est transférée dans un FERR.
Le retrait minimal n’est pas obligatoire dans l’année de conversion du REER en FERR. Il le devient à partir de l’année suivante seulement.
Tableau : Retrait minimal obligatoire d’un FERR par année en fonction de l’âge
Âge |
% |
|
Âge |
% |
71 |
5,28 |
|
83 |
7,71 |
72 |
5,40 |
|
84 |
8,08 |
73 |
5,53 |
|
85 |
8,51 |
74 |
5,67 |
|
86 |
8,99 |
75 |
5,82 |
|
87 |
5,82 |
76 |
5,98 |
|
88 |
10,21 |
77 |
6,17 |
|
89 |
10,99 |
78 |
6,36 |
|
90 |
11,92 |
79 |
6,58 |
|
91 |
13,06 |
80 |
6,82 |
|
92 |
14,49 |
81 |
7,08 |
|
93 |
16,34 |
82 |
7,38 |
|
94 |
18,79 |
Types de placement
Tous les placements admissibles pour un REER le sont aussi pour un FERR. Il faut néanmoins vous assurer de posséder suffisamment de liquidités pour effectuer le retrait minimal annuel. Cette gestion des liquidités vaut autant pour le retrait minimal que pour tout autre retrait prévu pour maintenir le niveau de vie souhaité.
Taux d’imposition
Des retenues d’impôt à la source sont prélevées directement par l’établissement financier sur tout retrait excédant le retrait minimal obligatoire. Les retenues d’impôt se font plutôt en fonction de la somme retirée que selon le taux marginal d’imposition, ce qui signifie que le calcul exact se fait lors de la production des déclarations annuelles de revenus. Ainsi, le taux combiné des retenues d’impôt fédéral et provincial à la source est situé à 20 % pour un retrait de 5 000 $ ou moins, à 25 % entre 5 000,01 $ et 15 000 $ et à 30 % à partir de 15 000,01 $. Il ne faudra donc pas vous surprendre d’avoir encore un solde d’impôt à payer sur vos retraits FERR après la fin de l’année, à moins d’avoir demandé à votre établissement bancaire d’en prélever davantage.
Fractionnement
Depuis 2007, de nouvelles règles permettent le fractionnement de certains revenus de retraite entre les conjoints, tant au fédéral qu’au provincial. Le FERR y est admissible dès que le détenteur atteint 65 ans.
Ce choix, sur une base annuelle, entraîne des économies fiscales d’autant plus importantes qu’il existe une différence de taux d’imposition marginal entre les conjoints, sans égard à leur âge et statut (employé, retraité).
Décès
Le solde des FERR doit être inclus aux revenus de l’année du décès du particulier et se trouve donc soumis à un taux d’imposition pouvant atteindre 53,31 %. Toute augmentation de valeur du FERR avant sa distribution aux bénéficiaires est imposable entre les mains de ces derniers et non du défunt. À l’inverse, une perte de valeur peut être appliquée contre les FERR imposés dans l’année du décès.
En revanche, si le conjoint survivant est bénéficiaire du FERR, le régime lui est transféré au décès du rentier sans aucune ponction fiscale. Le FERR peut ensuite être reconverti en REER si le conjoint bénéficiaire le souhaite et qu’il n’a pas 71 ans. Tout retrait minimal, qui n’a pas été effectué au cours de l’année du décès du rentier, ne peut être « roulé » en franchise fiscale au conjoint survivant et doit donc être imposé soit au défunt, soit au conjoint survivant.
On peut aussi obtenir un report d’impôt du solde du FERR au décès si des enfants ou des petits-enfants de moins de 18 ans, financièrement à charge de la personne décédée, en sont bénéficiaires. La somme reçue pourra servir à l’achat d’une rente d’étalement jusqu’à l’âge de 18 ans, ce qui réduira le fardeau fiscal. Un tel bénéficiaire atteint d’une déficience physique ou mentale n’aura pas à être imposé totalement avant 18 ans. De plus, tout bénéficiaire financièrement à charge du détenteur du FERR, qui est admissible au régime enregistré d’épargne invalidité (REEI), pourra différer l’impôt sur une période plus longue.
Pour tirer des avantages fiscaux liés au FERR et éviter de mauvaises surprises, n’hésitez pas à consulter un professionnel.
La société économique dans laquelle nous vivons est d’une complexité extraordinaire. Quand on y pense, des millions de biens et services sont produits chaque jour pour combler les besoins et les désirs des milliards d’individus d’un bout à l’autre de la planète. Un exercice de coordination qui frappe l’imaginaire lorsque l’on sait que les ressources servant à satisfaire nos appétits insatiables sont, pour ainsi dire, limitées. Bien que des écarts parfois importants s’installent entre les nantis et les moins fortunés, force est de constater que sur le long terme, le niveau de vie de tout un chacun s’améliore. Dans un environnement où le chaos est omniprésent, la société progresse et l’harmonie sociale perdure, même si rien n’est parfait. Comment expliquer le phénomène?
La main invisible comme allégorie des forces du marché
Adam Smith, généralement reconnu comme le père de la science économique, était en admiration devant les succès d’un Empire britannique en émergence. Une question titillait son esprit et sa réflexion : « Comment une société peut-elle coordonner les activités indépendantes d’un très grand nombre d’acteurs économiques — producteurs, transporteurs, distributeurs vendeurs, consommateurs — qui ne se connaissent pas et pour la plupart ne se rencontreront probablement jamais ? » Sa vision novatrice était qu’une coordination entre tous ces acteurs pouvait spontanément émerger, sans qu’aucune personne ou institution ne tente consciemment de la créer ou de la maintenir. Ce raisonnement rompait avec les acquis anciens selon lesquels les gouvernants devaient imposer l’ordre auprès de leurs sujets, fût-il social ou économique.
Frappé d’une intuition quasi divine, Smith envisageait un environnement dans lequel les individus étaient mus par la simple force de leur intérêt personnel. Ainsi, chacun cherche à maximiser son bien-être personnel sans se soucier (ou si peu) de celui d’autrui. Tous sont alors confrontés à une masse d’individus motivés de la même manière. Que l’un d’entre eux, emporté par son avidité, fasse payer trop cher son produit ou qu’il refuse de payer dignement ses travailleurs, il perdra ses clients et ses employés au profit d’un concurrent moins gourmand. L’égoïsme, moteur du développement, est ainsi tenu en laisse par la concurrence entre les acteurs économiques.
Dans cet environnement imaginé par Smith, les prix font office de signal conduisant les agents vers le profit, la source de leur intérêt personnel. Des prix ou des salaires élevés incitent les producteurs et les travailleurs à fournir ce que la société demande. De même, des prix et des salaires élevés, en bridant la demande, constituent un mal qui se résorbe de lui-même. À l’autre bout du spectre, des prix ou des salaires faibles poussent les producteurs et les travailleurs à se retirer du marché, tout en stimulant la demande. Les pressions à la baisse sur les prix sont alors renversées. Le jeu de l’offre et de la demande ainsi décrit fait du marché un environnement autorégulé pour l’approvisionnement en biens et services au sein de la société et contribue donc au bien-être de tous. Sans le développer dans tous ses contours, Adam Smith anticipait déjà l’importance des marchés dans l’organisation des sociétés humaines :
Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu’ils apportent à la recherche de leur propre intérêt. Nous ne nous en remettons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme […] en cela, [ils sont pour ainsi dire conduits] par une main invisible, à remplir une fin qui n’entre nullement dans [leurs] intentions […]. Tout en ne cherchant que [leur] intérêt personnel, [ils travaillent] souvent d’une manière bien plus efficace pour l’intérêt de la société, que s’[ils avaient] réellement pour but d’y travailler.
Adam Smith
La richesse des nations (1776)
Axé sur les libertés individuelles, ce système simple imaginé par Smith est donc censé réconcilier les intérêts privés, l’efficacité économique et l’atteinte d’une harmonie sociale. La « main invisible » n’est alors qu’une allégorie des forces du marché. Un principe d’équilibre automatique qui s’établit sur un marché en concurrence lorsque cette dernière agit comme rempart à l’égoïsme.
La main invisible et la réalité
Un marché imparfait
Le marché, les forces conjuguées de l’offre et de la demande, est un outil d’analyse économique puissant nous permettant de mieux cerner le monde dans lequel nous vivons. Cependant, pour que la « main invisible » opère sans écueil, une hypothèse est cruciale : le marché doit s’exprimer dans un environnement « parfaitement concurrentiel ». Dans un tel cadre, les acteurs du marché, entreprises ou consommateurs, ne doivent avoir aucune influence « individuelle » sur le prix des biens et services vendus dans notre économie. Exprimée autrement, la concurrence parfaite exclut tout pouvoir de monopole, une situation de marché dans lequel un vendeur pourrait sinon contrôler, à tout le moins influencer les prix afin d’optimiser son profit.
Pour que la parfaite concurrence s’exprime, un marché doit-être exempt de barrières à l’entrée, par exemple, l’information sur la qualité des biens des compétiteurs doit y circuler librement et, en principe, il ne devrait pas y avoir de dépenses en publicité et marketing, car les biens vendus par différentes entreprises sont considérés quasi identiques. Vous l’aurez compris, le monde dans lequel nous vivons est parfois très loin de présenter ce genre de caractéristiques. Les économistes parleront alors de concurrence monopolistique ou de marché imparfait — une situation où un producteur cherche à se différencier de ses concurrents grâce aux caractéristiques de ses produits, son positionnement de marché ou son plan de communication marketing. Si pour la plupart des consommateurs un Big Mac n’est pas la même chose qu’un Whopper ou un Teen Burger, pourtant tous des hamburgers, le plan marketing d’une sandwicherie aura frappé dans le mille, et l’entrepreneur profitera d’un excédent de profit attribuable au monopoleur. La « main invisible » n’est alors qu’un guide imparfait.
L’absence de marché un autre obstacle à la « main invisible »
Adam Smith n’était pas dupe. Il comprenait d’emblée que la recherche de l’intérêt personnel pouvait conduire à d’importants conflits au sein de la société. Pour être juste, équitable et moral, l’égoïsme se doit en certaines occasions d’être encadré par un système de règles sociales. Cette réalité est particulièrement évidente lorsqu’un marché naturel ne peut émerger de lui-même. Prenons pour cause le marché du carbone.
La pollution par des gaz à effet de serre (GES) qui émane de l’activité humaine, agitation égoïste ayant pour quête le profit, ne peut s’autoréguler d’elle-même puisqu’un marché limitant sa présence n’émerge pas de façon spontanée au sein de nos sociétés. Il n’existe, par exemple, aucun marché « naturel » sur lequel un amant de la nature peut offrir un incitatif ou imposer un tarif à un pollueur pour que ce dernier réduise ses émissions. L’intervention d’un tiers parti est alors indispensable. Un gouvernement bienveillant a le loisir de créer un tel marché « artificiel » pour encadrer l’activité indésirable et mener, nous le souhaitons, la société vers un plus haut échelon d’harmonie collective. La « main invisible » n’est donc pas toujours un acte divin.
Conclusion
Vision intuitive et novatrice, mais pas encore complètement aboutie, la « main invisible » sera développée par et pour les héritiers d’Adam Smith comme une allégorie représentant les forces du marché. Un principe d’équilibre automatique qui s’établit lorsque le marché est en concurrence parfaite. Bien que puissant, l’outil d’analyse se doit d’être manipulé avec soin. Les hypothèses entourant son utilisation ne sont pas toujours réunies. Si l’on accepte la « main invisible » comme une allégorie des forces du marché, il faut alors convenir que cette dernière n’est pas toujours porteuse d’harmonie sociale. Comme en font foi le capitalisme débridé ou sauvage et le laissez-faire à outrance qui sont des exemples de marchés « imparfaits » et non l’inverse.
En 2015, la ville américaine de Seattle frappait les esprits en votant une loi visant à augmenter graduellement le salaire minimum à 15 $ de l’heure pour 2021. Le taux horaire minimum y dépassait à peine 9 $. Cette progression salariale annuelle de plus de 7,5 % sur 6 ans, substantiellement plus rapide que l’inflation, visait à donner un peu d’air aux ménages à faible revenu. À l’automne 2021, Louis Audet, grand patron chez Cogeco, redonnait de l’élan au débat en parlant d’un salaire minimum à 20 $ de l’heure. Valoriser le travail de chacun, disait-il, « contribue à protéger notre démocratie. » Un salaire minimum à 20 $ est-il réaliste? Peut-on donner un peu de perspective à ce vieux débat?
Pourquoi un salaire minimum?
Rappelons que le salaire minimum est un plancher légal de rémunération qu’un employeur peut verser à ses employés. Ce taux est présentement établi à 13,50 $ de l’heure au Québec, ce qui représente un salaire annuel d’environ 24 570 $ pour un travailleur à temps plein. Le salaire minimum, dit-on, est un outil privilégié de lutte contre la pauvreté.
Il faut comprendre, cependant, que se doter d’une loi sur le salaire minimum c’est chercher explicitement un compromis entre deux objectifs conflictuels. D’un côté, il s’agit d’établir et maintenir le salaire minimum au niveau le plus élevé possible pour réduire les inégalités et la pauvreté des ménages à faible revenu. De l’autre côté, il nous faut éviter de l’augmenter au point où les conséquences seraient néfastes pour l’emploi des travailleurs au bas de l’échelle salariale. Car voyez-vous, un salaire minimum trop élevé réduit la compétitivité des entreprises et décourage l’embauche.
Qui travaille au salaire minimum au Québec?
Environ 4,1 millions de personnes avaient un emploi au Québec en 2020 selon les données de l’Enquête sur la population active menée par Statistique Canada. De ce nombre, 212 300 travailleurs recevaient le salaire minimum pour leur labeur soit, un travailleur sur vingt dans la belle province. La travailleuse « type » dans cette catégorie d’emploi, car il s’agit de femmes à 60 %, a entre 15 et 24 ans, est à l’emploi d’une PME dans le secteur du commerce ou de l’hébergement et des services de restauration. Vous l’aurez deviné, ce sont majoritairement ces travailleurs qui ont fait les frais de la pandémie puisque plusieurs de ces emplois sont des services dits « de proximité ».
Impact d’une hausse du salaire minimum sur l’emploi, ce qu’en disent les économistes?
S’il est un sujet économique sur lequel un consensus n’existe pas, l’effet d’une hausse du salaire minimum sur l’emploi en est clairement un. D’un côté, les économistes de facture classique concluent généralement qu’une hausse du salaire minimum aura des effets pervers sur l’emploi, particulièrement chez les jeunes et les travailleurs peu qualifiés. Ces effets sont multiples, mais on parlera principalement de pertes d’emplois, de réduction de l’offre de formation sur les lieux de travail, de baisse de la fréquentation scolaire et de la réduction du nombre d’heures travaillées. Devant la hausse du salaire de base, les entreprises favoriseront les mises à pied pour garder sous contrôle leur masse salariale et leurs coûts. Par exemple, les études récentes s’appuyant sur les données canadiennes semblent assez claires à ce sujet : une hausse de 10 % du salaire minimum provoque une baisse de l’emploi de 3 % à 6 %, principalement chez les adolescents et les jeunes.
D’un autre côté, certains chercheurs soutiennent que l’augmentation du salaire minimum n’a que des effets marginaux sur l’emploi et la formation, ou encore parleront d’un impact indiscernable sur les emplois au bas de l’échelle salariale. C’est ce que conclut une étude réalisée dans le milieu des années 1990 par David Card, lauréat 2021 du prix Nobel d’économie, qui suggérait que l’emploi des petits salariés n’avait pas diminué dans l’industrie de la restauration rapide à la suite d’augmentations du salaire minimum dans certains États américains.
Le sujet s’avère extrêmement complexe et malgré bon nombre d’études, aucun consensus ne semble émerger chez les spécialistes. Pour résoudre cette impasse, certains chercheurs ont soulevé la possibilité d’une relation non linéaire entre le salaire minimum et l’emploi. C’est-à-dire que l’emploi ne réagirait pas de la même façon à une hausse du salaire minimum si ce dernier est faible (ou élevé) en relation au salaire moyen. L’idée véhiculée s’explicite comme suit : augmenter le salaire minimum lorsque ce dernier est élevé en proportion du salaire moyen, impacterait alors beaucoup de travailleurs afin de maintenir l’équité dans les échelles salariales. Un changement du salaire minimum aurait alors un effet prononcé sur l’emploi. Par opposition, lorsque le salaire minimum est faible en regard du salaire moyen, un nombre plus restreint de salariés seraient touchés, ce qui amoindrirait l’effet d’un changement sur l’emploi ou le rendrait négligeable.
Résoudre le dilemme
Si nous pouvions établir un niveau du salaire minimum de manière à permettre un niveau de vie adéquat sans réduire l’emploi de manière démesurée, nous aurions atteint un niveau de salaire minimum « optimal », à la frontière entre la valorisation du travail de chacun et la capacité financière de payer des entreprises. Pourvu, évidemment, qu’une telle intersection existe.
Vous vous en doutez, il n’y a pas de consensus parmi les économistes ici non plus! Cependant, le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale indique dans son Plan stratégique 2019-2023 vouloir atteindre et maintenir comme cible un ratio de 50 % entre le taux de salaire minimum et le salaire horaire moyen. Le ministère aura vraisemblablement établi que ce seuil était raisonnable pour minimiser les pressions sur la capacité financière des entreprises, maintenir leur compétitivité à l’échelle locale et internationale et éviter de grandes vagues de délocalisation et d’automatisation au détriment des emplois à faible rémunération. Cet objectif a d’ailleurs été atteint au cours de l’année fiscale 2020-2021 puisque le salaire horaire de 13,50 $ de l’heure représente 51 % de la rémunération horaire moyenne au Québec. Nous sommes loin des 20 $ par heure.
Ainsi, pour résoudre le dilemme, la question devient : un salaire minimum à 13,50 $ offre-t-il un niveau vie suffisant aux travailleurs et aux familles à faible revenu dans le Québec d’aujourd’hui ? Encore faut-il savoir ce qu’est un « niveau de vie suffisant », concept subjectif s’il en est un. Au Canada, c’est la Mesure du panier de consommation (MPC) qui est privilégiée comme mesure de faible revenu. Elle indique le revenu nécessaire pour qu’une personne ou une famille puisse se procurer un ensemble de biens et de services de base comprenant l’habillement, l’alimentation, le logement et le transport. Selon cette métrique, il faudrait un revenu annuel de 20 767 $ pour qu’une personne seule puisse se procurer le panier minimum de consommation au Québec en 2021. À 24 570 $, c’est ce que semble permettre le salaire minimum actuel. Soyons francs, il ne s’agit là que d’un strict minimum socialement acceptable.
Élargir le débat
Chercher un compromis entre les deux objectifs conflictuels (maintenir le salaire minimum au niveau le plus élevé possible et éviter les conséquences néfastes pour l’emploi) est plus que souhaitable. Cependant, une analyse qui ne s’intéresse qu’au taux de salaire minimum serait incomplète. Pour obtenir une bonne lecture du revenu disponible des ménages qui travaillent au bas de l’échelle, il faut également tenir compte de la fiscalité et des prestations offertes aux différents types de ménages à bas revenu. À ce chapitre et sans être parfait, le Québec tire relativement bien son épingle du jeu dans les comparaisons interprovinciales et internationales.
Et alors? Un salaire minimum à 20 $ est-il réaliste au Québec en cette fin de pandémie? Puisque dans le marché du travail actuel, ce taux de rémunération représenterait 75 % du salaire horaire moyen, il semble que les effets négatifs sur le nombre d’emplois à bas salaire pourraient outrepasser les effets positifs d’une augmentation du revenu disponible. Les pertes d’emplois, particulièrement chez les jeunes et les petits salariés, seraient donc contreproductives dans notre lutte aux inégalités. Néanmoins, viser l’atteinte graduelle d’un salaire minimum à 20 $ au cours de la prochaine décennie pourrait être jouable. Pour y arriver, une croissance saine de l’économie du Québec ainsi que la poursuite ambitieuse, mais réaliste, de programmes fiscaux ciblés, pourraient assurément jouer un rôle dans l’atteinte de cet objectif.
« Acheter au prix le plus bas et vendre au prix le plus fort, là est le secret! »
Apprivoiser la notion de gain en capital
Du point de vue de la Loi sur l’impôt, un gain en capital peut s’avérer un sujet fort complexe compte tenu de la nature du traitement fiscal qui lui est réservé. Au sens commun, toutefois, un gain en capital est simplement le profit réalisé lors de la vente d’un actif : une action, une obligation, un terrain, une résidence principale ou secondaire, etc. Point important, pour qu’il y ait gain en capital il faut qu’il y ait vente d’actif. Ainsi, il ne faut pas le confondre avec le gain non réalisé, parfois appelé gain sur papier, qui ne reflète qu’une augmentation de la valeur d’un investissement au portefeuille. Les gains sur papier ne sont pas considérés comme des gains en capital et ne sont donc pas imposables.
La notion de gain en capital se juxtapose bien évidemment à celle d’une perte. On subit une perte en capital lorsqu’il y a une diminution de la valeur de l’actif au moment de la vente par rapport à son prix d’achat. Il est tout aussi important de comptabiliser les pertes que les gains puisque celles-ci réduiront votre « gain net » et ainsi, votre facture.
Le marché immobilier
Le calcul d’un gain en capital sur un bien immobilier est relativement simple. Il s’agit du montant total de la transaction de vente, duquel on soustrait le montant payé à l’achat. De cette somme, il est possible de déduire certaines dépenses assumées durant la période où vous étiez propriétaire. Il sera donc important de tenir un registre de ces dépenses dites « capitalisables » et pourquoi pas d’en garder les factures.
Par exemple, si vous avez acheté un chalet au prix de 150 000 $ et que vous le vendez 250 000 $, votre gain en capital sera de 100 000 $. Notez cependant que seulement 50 % de ce montant est imposable. Vous devrez alors ajouter un montant approximatif de 50 000 $ à vos revenus imposables.
De plus, sachez que si vous donnez à vos enfants ce même chalet, toujours acheté au prix de 150 000 $, mais que sa juste valeur marchande est estimée à 250 000 $, on considérera que vous aurez généré un gain en capital de 100 000 $ sur lequel vous serez imposé même s’il s’agit d’un don. Et si vos enfants revendent éventuellement le chalet 300 000 $, ils seront également imposés sur les 50 000 $ de profit supplémentaire.
Dans le cas de transaction immobilière, le gain en capital réalisé sur la vente d’une résidence principale est exempt d’impôt au Canada. Cependant, une seule propriété peut se voir accorder ce titre à un moment précis dans le temps. Il est également possible d’éviter l’imposition lors d’un transfert de propriété entre conjoints.
Le marché boursier et obligataire
Les gains, ou les pertes, en capital perçus sur transactions boursières sont également imposables (ou déductibles) à hauteur de 50 % de leur valeur au même titre que vos revenus d’emploi si ces transactions sont effectuées dans un compte au comptant. Le constat est aussi valable pour les obligations.
On oublie trop souvent que même si les obligations sont des contrats de dette standardisés, ils peuvent également donner lieu à des gains ou des pertes en capital si l’outil est revendu avant échéance sur le marché secondaire. Par exemple, une obligation avec un coupon de 3 %, achetée au pair à l’émission, pourrait voir sa valeur s’apprécier sur le marché secondaire si les taux d’intérêt de marché diminuaient au cours de la période de détention. En l’occurrence, si les taux de marché atteignaient 1 %, une obligation dont la valeur faciale est de 1 000 $ dont l’échéance est dans 1 an pourrait se vendre sur le marché secondaire pour 1 020 $. Un gain en capital généré sera de 20 $.
Vous pouvez cependant contourner en partie l’impôt sur le gain en capital en détenant vos actions, obligations, fonds communs ou autres fonds négociés en Bourse dans votre CELI ou votre REER. Par exemple, dans un CELI, le revenu de placement et les gains en capital tirés des placements admissibles vont croître à l’abri de l’impôt. Bien que les cotisations versées au CELI ne réduisent pas votre revenu imposable, leur avantage réside dans le fait que les retraits sont libres d’impôt. De son côté, le REER offre également l’avantage d’éviter l’impôt à vos gains en capital. Cet avantage est cependant temporaire. Puisque les cotisations au REER sont déductibles, tous les retraits seront assujettis à l’impôt selon le taux d’imposition marginal du contribuable.
Il serait donc tentant d’utiliser des régimes enregistrés (comme le CELI et le REER) pour des placements à fort rendement espéré afin d’éviter l’imposition du gain en capital. La prudence s’impose toutefois, car des investissements qui rapportent le plus sont généralement associés à un risque de perte plus élevé. Il faut donc garder à l’idée que, bien que les revenus de placement soient libres d’impôt, les pertes en capital subies à l’intérieur de ces régimes ne peuvent en revanche pas être déduites à l’encontre des gains en capital.
Le traitement fiscal des gains en capital
Nous l’avons déjà établi, règle générale au Canada, seulement 50 % du gain en capital est soumis à l’impôt sur le revenu. De même, 50 % de la perte en capital sera déductible. Cependant, une telle perte ne peut être déduite que des gains en capital imposables. Il vous faudra ainsi avoir réalisé des gains pour être en mesure de déduire des pertes. Cela dit, il faut rappeler que toute perte en capital non déduite dans une année peut être reportée et déduite des gains en capital imposables de l’une ou l’autre des trois années antérieures ou de toute année subséquente.
Restez à l’affût. Les experts recommandent une révision annuelle approfondie de votre portefeuille. Cette dernière vous permettra, entre autres, d’optimiser la gestion de vos gains et pertes en capital. Si vous prévoyez vendre des placements ayant entraîné d’importants gains en capital, vous pourriez envisager de reporter la vente après le 1er janvier. Une façon de différer l’impôt au 30 avril de l’année suivante. De plus, si votre revenu varie, vendre au cours d’une année où il est faible peut vous faire économiser beaucoup d’argent, puisque vos gains en capital seront imposés à un taux marginal moindre.
Vous faites des dons de bienfaisance? Une autre façon de minimiser votre facture d’impôt serait de considérer le don d’actif. Vous pourriez ainsi réduire votre impôt sur les gains en capital. Par exemple, si vous prévoyez faire un don de 1 000 $ à un organisme de bienfaisance, vous pouvez donner des actions qui ont une valeur de 1 000 $, mais qui, à l’origine, vous ont coûté beaucoup moins cher. Ainsi, au lieu de vendre les actions, de payer l’impôt sur les gains en capital et d’ajouter de l’argent pour compenser le don de 1 000 $, le fait de faire le don en actions vous donne droit au reçu de don de bienfaisance de 1 000 $ aux fins de l’impôt, sans que vous ayez à payer d’impôt sur les gains en capital.
Attention, toutefois, certains biens donnés de votre vivant à votre famille donneront lieu à un gain en capital, c’est le cas du chalet dans notre exemple précédent. Dans le doute, il sera toujours préférable de consulter un fiscaliste pour en savoir plus sur la façon de déclarer et de gérer correctement vos gains et vos pertes en capital. Si seulement nous pouvions nous en tirer avec « acheter au prix le plus bas et vendre au prix le plus fort! »
En raison de son rôle unique, le bilan de la Banque du Canada n’est pas comme celui des autres institutions financières puisque son objectif premier ne vise pas à générer des profits, mais bien à favoriser une croissance saine de l’activité économique tout en assurant la stabilité des prix et celle du système financier.
En temps normal, la taille du bilan de notre banque centrale évolue au rythme de la croissance de l’économie canadienne et de ses besoins en liquidités. Un savant mélange de billets de banque et de réserves bancaires est alors mis à notre disposition pour soutenir nos transactions et l’activité de prêts bancaires. La composition du bilan d’actif demeure simple, la banque centrale se contentant d’acquérir des titres garantis par le gouvernement du Canada et d’assurer la gestion au jour le jour du bilan via les opérations de pension, des prêts de 24 heures consentis aux banques à charte en contrepartie de garanties admissibles.
Cependant, lorsque le taux cible du financement à un jour, principal outil de politique monétaire au pays, atteint sa borne inférieure, la banque centrale se doit de considérer des outils de politique monétaire jugés non conventionnels ; ce qui implique généralement l’expansion du bilan de l’organisation. Pour la deuxième fois de notre histoire, le taux cible du financement à un jour a atteint son plancher en mars 2020. Les pressions économiques liées à la pandémie auront forcé la Banque du Canada à agir avec promptitude et véhémence. Au moment d’écrire ces lignes, le bilan de la banque centrale se chiffre à 491,7 milliards de dollars, soit 20 % du PIB (il a atteint un sommet de 576,4 milliards de dollars en février dernier, soit 23,9 % du PIB), alors qu’en temps normal, le bilan ne représente que 5 % du PIB (graphique).
Graphique | Bilan d’actif de la Banque du Canada de 2010 à 2021
De l’assouplissement quantitatif…
Que s’est-il passé ? Face à la pandémie, notre grand argentier a jugé bon d’étendre la valeur de son bilan de façon à soutenir sa politique monétaire et à assurer la stabilité de notre système financier. Dans le cadre de son programme d’assouplissement quantitatif lancé au printemps 2020, la Banque du Canada a procédé à des achats massifs de bons du Trésor et d’obligations du gouvernement du Canada. Combinés aux opérations de pension, le programme d’assouplissement quantitatif a pour objectif de permettre aux principaux marchés financiers de fonctionner adéquatement et de stimuler les dépenses au sein de l’économie. Des achats de titres de maturités ciblées serviront, par exemple, à faire baisser les taux d’intérêt à plus ou moins longue échéance et dynamiseront l’activité entrepreneuriale ainsi que celle des ménages ayant recours au crédit. L’objectif : favoriser l’emploi et soutenir la reprise post-pandémique en facilitant l’accès aux liquidités.
… à l’assouplissement du crédit
Il appert cependant que de démocratiser au sens large l’accès au crédit n’est pas suffisant. De toute évidence, la crise sanitaire aura également provoqué des tensions sur certains segments clefs des marchés financiers. Pour contourner le blocage du canal du crédit provoqué dans ces sous-segments, la Banque du Canada a jugé bon de prendre exemple sur la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) en procédant à des achats d’actifs inédits. La Fed et la BCE ont toutes deux expérimenté avec les méthodes non conventionnelles de politique monétaire lors de la crise financière de 2008 et, pour la petite histoire, ni l’une ni l’autre n’est parvenue à normaliser la taille de son bilan avant la pandémie. Un prélude possible de ce qui pourrait bien attendre l’institution canadienne.
Comme premier pas dans cette direction, la Banque du Canada a choisi de déployer son programme d’achat d’obligations hypothécaires du Canada. Cette initiative fournit à la banque centrale une plus grande latitude dans le choix des actifs de haute qualité qu’elle peut acquérir. Dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons, la Banque travaille de concert avec la Société canadienne d’habitation et de logement (SCHL) pour réaliser des achats d’obligations hypothécaires afin de régulariser le fonctionnement de ce marché et de soutenir plus spécifiquement la capacité des prêteurs à financer les prêts hypothécaires qu’ils consentent à leurs clients-propriétaires. C’est en partie grâce à ce soutien que les taux hypothécaires sont demeurés très attrayants et que les ventes de maisons ont surpris l’observateur lambda au plus fort de la crise.
Une autre première, la Banque du Canada s’est portée acquéreur d’obligations provinciales dès mars 2020, alors que certaines provinces, dont Terre-Neuve-et-Labrador, se sont montrées vulnérables lors de leur émission de dette respective. De façon à assurer la neutralité de ce geste, la banque centrale s’est engagée à acquérir des obligations de chacune des provinces à hauteur de leur part dans le PIB canadien. La taille de ce programme a été plafonnée à 50 milliards de dollars. Le programme d’aide aura dans les faits atteint 20 milliards de dollars, soit à peine plus de 1 % de la dette provinciale en circulation. Une boîte de Pandore vient néanmoins de s’ouvrir et, pour certains, cette situation risque de relâcher la discipline fiscale des provinces.
Des risques liés à l’expansion du bilan
Nul doute, les outils associés à l’expansion du bilan de la banque centrale sont puissants pour soutenir et relancer l’activité. Leurs effets à long terme sur l’économie demeurent cependant mal connus. Ainsi, des drapeaux rouges se lèvent chez certains économistes. D’abord, la présence d’importantes liquidités dans le système financier pourrait s’avérer inflationniste une fois le plein emploi atteint, ce qui ne saurait tarder, vue la solidité de la reprise. Bien que la poussée actuelle des prix s’appuie sur des effets de base, soit une normalisation des prix suivant une période de fort repli, rien ne nous assure le retour rapide de l’inflation vers la cible de 2 %. Les attentes d’inflation sont déjà en hausse chez nos voisins du sud et se rapprochent de 3 % au pays, soit la limite supérieure de la cible d’inflation. Face à la pénurie de main-d’œuvre, il n’y a qu’un pas à franchir pour voir resurgir le bon vieux cercle vicieux de la hausse salaire-prix.
De plus, l’expansion rapide du bilan de la banque centrale pourrait devoir être renversée si les conditions économiques et financières s’améliorent plus rapidement que prévu, particulièrement en cas d’inflation persistante. Une telle situation exigerait que la Banque du Canada vende des actifs dans un environnement de taux d’intérêt haussiers, évènement propice à d’importantes pertes en capital résultant des divers programmes d’achat d’actifs.
Ainsi, une convention d’indemnisation a été conclue avec le gouvernement du Canada afin de renflouer la banque centrale en cas de pertes. Un point important est à souligner ici. Tant et aussi longtemps que les gains ou pertes encourus par la Banque du Canada dans l’exercice de ses programmes ne sont pas réalisés, le taux de financement effectif du gouvernement canadien demeurera inconnu. Cela dit, sur papier, l’indemnisation atteint actuellement 4,2 milliards de dollars, une somme marginale en regard du budget du gouvernement fédéral. De plus, rien n’indique que cette somme devra être effectivement déboursée. Une saine gestion de la durée du portefeuille de notre banque centrale permettrait la normalisation du bilan au fur et à mesure que l’actif arrive à échéance. Une situation qui élimine la perte (ou le gain) en capital. Facile à dire, mais encore faut-il arriver à le faire.
La fin des achats, mais le bilan demeure gonflé
En début d’automne 2021, la plupart des programmes d’achat d’actifs avaient pris fin, la banque centrale ayant cessé ses acquisitions liées à l’assouplissement du crédit. Seul le programme d’assouplissement quantitatif demeurait actif. Le 8 septembre dernier, alors que la Banque du Canada maintenait le taux cible du financement à un jour à sa valeur plancher de 0,25 %, elle annonçait du même souffle vouloir poursuivre ses achats d’obligations au rythme cible de 2 milliards de dollars par semaine. Dans l’état actuel des choses, les justifications entourant l’utilisation d’un programme d’assouplissement quantitatif sont devenues obscures et le défi de savoir quand et comment inverser la dernière année et demie d’expansion du bilan devient de plus en plus réel. La transparence et le doigté seront de mise pour les prochaines étapes. Nos banquiers centraux naviguent en territoire inexploré.
L’engouement pour le marché immobilier ne se dément pas malgré la pandémie. L’excellente tenue du revenu disponible, évidemment dopé par les programmes d’aide gouvernementale, la faiblesse historique des taux hypothécaires, combinée à la quête d’espace en cette ère de télétravail, se sont avérées suffisantes pour dynamiser le secteur du logement à l’échelle du Québec. Le nombre de transactions effectuées ne cesse de progresser depuis le printemps 2020 et la valeur des propriétés continue d’augmenter sans essoufflement apparent.
Bien que l’immobilier demeure généralement beaucoup plus accessible au Québec que dans d’autres provinces canadiennes, la plupart des indicateurs d’abordabilité se sont récemment détériorés. Le prix de vente moyen atteignait 450 000 $ au Québec en juin 2021 selon l’Association canadienne de l’immeuble, une progression de près de 100 000 $ sur douze mois; de quoi décourager les jeunes ménages qui sont de plus en plus nombreux à s’interroger sur leur capacité à accéder à la propriété, et pour cause. En considérant l’évolution récente du prix de vente moyen, une mise de fonds de 5 % sur la propriété est passée de 17 500 $ à 22 500 $ en un an. Le rêve d’être propriétaire s’éloigne de la réalité.
Comment aider la prochaine génération à accéder à la propriété?
Êtes-vous familier avec le « don d’équité »? Un moyen créatif d’aider les jeunes qui souhaiteraient acquérir la résidence ou le chalet familial, un terrain ou un immeuble locatif. Le don d’équité consiste à céder à un enfant ou à un proche parent une propriété détenue par un autre membre de la famille, à un prix réduit. L’écart entre le prix ajusté et la valeur marchande sera considéré comme « un don » et remplacera ou bonifiera la mise de fonds de l’acquéreur. Dans tous les cas, la valeur marchande de la propriété devra être évaluée par un professionnel pour valider la légitimité de la transaction.
Il s’agit d’une pratique tout à fait légale qui permet au bénéficiaire du don d’acquérir une propriété sans aucune mise de fonds. Attention, toutefois, cette façon de faire ne met pas le donateur à l’abri du fisc. Le bien immobilier faisant l’objet du don sera traité comme s’il avait été vendu à sa juste valeur marchande, soit le prix le plus élevé qui peut être obtenu dans un marché libre. Ce prix devra être ici « estimé » par un évaluateur professionnel externe. Le but étant d’éviter que le vendeur ne gonfle la valeur de sa résidence ou en sous-évalue le prix afin d’avantager l’une ou l’autre des parties impliquées.
D’entrée de jeu, le don d’équité n’est possible que si le donateur détient une valeur nette sur la propriété, c’est-à-dire que la valeur marchande de la propriété est supérieure au solde hypothécaire. C’est d’une certaine façon assez logique, un individu ne peut pas donner ce qu’il ne possède pas, non?
Lors du don d’équité, la transaction immobilière, bien que basée sur la valeur marchande réelle du bien immobilier, sera effectuée à une valeur moindre. La différence entre la juste valeur marchande du bien et le montant « officiel » de la transaction sera considérée comme un don d’équité, un généreux don qui va du vendeur vers l’acheteur. Le don servira ici de mise de fonds pour l’acheteur dont l’hypothèque sera moindre que la valeur marchande de la propriété. Quant au prêteur hypothécaire, il exigera, dans la majorité des cas, une lettre officielle attestant de l’irrévocabilité du don.
Rien de mieux qu’un exemple
Les grands-parents de Maja ont décidé de lui vendre leur résidence principale. La juste valeur de la résidence a été évaluée à 450 000 $ par un expert, mais ils désirent la céder à leur petite-fille pour la somme de 350 000 $. Le montant du don correspond alors à 100 000 $, soit la différence entre la juste valeur estimée et le réel coût d’acquisition pour Maja. Le don assure à Maja une mise de fonds d’environ 22 %. Puisque cette somme est supérieure à 20 % de la valeur de la maison, Maja pourra éviter l’assurance prêt hypothécaire pouvant atteindre 4,50 % de la valeur du prêt. Une économie substantielle dans notre exemple.
Évidemment, il est possible que le don d’équité ne soit pas suffisant pour couvrir la mise de fonds au minimum requis de 5 % (22 500 $ dans notre exemple). Maja aurait alors pu bonifier cette dernière avec ses économies personnelles ou celles de son conjoint. De plus, dans la plupart des cas, le don d’équité peut être appliqué en même temps que d’autres programmes d’aide financière offerts aux acheteurs, notamment l’Incitatif à l’achat d’une première propriété, ou le régime d’accession à la propriété (RAP).
Même si le don d’équité prévoit que la maison familiale sera vendue « à rabais » afin qu’un certain montant puisse servir de mise de fonds, du point de vue fiscal, la transaction doit s’appuyer sur la juste valeur marchande de la propriété. Cela dit, comme les grands-parents de Maja habitent la propriété et qu’ils en ont toujours fait leur résidence principale, ils peuvent procéder à la transaction sans qu’il y ait d’impact fiscal. Le lecteur se souviendra que le gain en capital empoché lors de la vente de la résidence principale est exempt d’impôt.
Autre bonne nouvelle pour Maja : puisque la transaction s’effectue au sein de la famille le long d’une branche montante de l’arbre généalogique, elle n’aura pas à payer les droits sur les mutations immobilières (la fameuse « taxe de bienvenue »). Cette exemption est valide quand on accède à la propriété par legs ou par achat et que l’on se déplace vers le haut ou vers le bas de l’arbre généalogique, c’est-à-dire, de grands-parents à parents ou à enfants, ou des enfants à leurs parents ou à leurs grands-parents. Lorsqu’on sait que le droit de mutation peut coûter quelques milliers de dollars, ça devient tout de même intéressant de racheter la maison familiale. Petit bémol, vous l’aurez compris, selon cette définition, l’exemption à cette taxe ne fonctionne pas entre frères et sœurs.
Et si les grands-parents de Maja lui avaient vendu le chalet?
En supposant que les valeurs monétaires ne changent pas dans notre précédent exemple. Que se serait-il passé si l’objet du don avait été une résidence secondaire plutôt qu’une résidence principale? Comme nous l’avons vu, les dons de biens sont traités comme une vente à la juste valeur marchande. Dans le cas de la vente d’une résidence secondaire (d’un terrain ou d’un immeuble locatif), les grands-parents de Maja devront payer de l’impôt sur le gain en capital réalisé. Puisqu’ils avaient acheté le chalet moyennant une somme de 125 000 $ il y a belle lurette, leur gain en capital s’élève à 325 000 $, soit la juste valeur marchande moins le coût d’acquisition. La moitié du gain en capital étant imposable, 162 500 $ devront être ajoutés à la déclaration de revenus des donateurs. En supposant un taux marginal d’imposition de 50 %, un impôt additionnel de 81 250 $ sera ainsi généré pour les grands-parents de Maja.
Mot d’ordre : faites-vous accompagner
Le don d’équité est une façon intéressante de favoriser l’accès à la propriété pour la prochaine génération. Les règles encadrant le processus sont simples et les impacts fiscaux généralement prévisibles. Cependant, pour naviguer entre l’évaluation de la juste valeur, la lettre officialisant le don d’équité et la gestion des impacts fiscaux, il est préférable d’être bien accompagné. Comme pour toute transaction de cette envergure, d’ailleurs.
Le 10 juillet dernier, Venise, capitale de la région de la Vénétie au nord de l’Italie, a été le théâtre d’un événement que l’on peut qualifier d’historique, alors que les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du G20 (hormis un petit groupe de pays, dont l’Irlande et la Hongrie) se sont entendus sur le principe d’une révision radicale de la fiscalité internationale.
L’importance de cette avancée est mise en lumière par le fait qu’elle émane d’un organisme qui regroupe 19 grands pays développés et émergents ainsi que l’Union européenne, et qui représente les deux tiers de la population mondiale et plus de 90 % du produit mondial brut, c’est-à-dire la somme des produits intérieurs bruts (PIB) de tous les pays membres.
La taxation des entreprises multinationales
En pratique, ces représentants d’une portion éléphantesque de l’économie mondiale ont donné leur aval à un projet de taxation des entreprises multinationales que les États du G7 avaient approuvé à Londres, au mois de juin dernier.
Ce projet repose sur deux piliers, soit 1) une répartition équitable, entre les pays, des recettes fiscales provenant des 100 entreprises les plus rentables de la planète, incluant les Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft (GAFAM) de ce monde, et 2) un impôt mondial sur les bénéfices des entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 750 000 000 euros (1 112 358 750 de dollars canadiens) à un taux effectif minimum de 15 % afin de dissuader les grandes sociétés de recourir à des paradis fiscaux à faible taux.
En clair, cet impôt mondial signifie qu’advenant le cas où les profits réalisés à l’étranger par une filiale d’une société canadienne étaient imposés en deçà de ce taux minimum, le gouvernement pourrait réclamer à cette société un impôt sur les bénéfices de sa filiale, et ce, à un taux égal à la différence entre le taux minimum et le taux appliqué dans le pays.
L’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (projet BEPS)
Réalisé sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le projet approuvé par le G7 puis par le G20 a été élaboré dans le Cadre inclusif sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (en anglais, Inclusive Framewok on BEPS [Base Erosion and Profit Shifting]). Ce Cadre est en fait un organe technique et politique qui rassemble 139 pays et juridictions dans le but d’améliorer la transparence et la collaboration fiscales entre les pays participants.
Lancé en 2012, le projet BEPS vise à créer un ensemble unique de règles fiscales internationales qui font consensus pour protéger l’assiette imposable et assurer aux contribuables une prévisibilité et une certitude accrues.
Implanté en 2015, le projet a débouché sur des mesures concrètes comme la déclaration pays par pays et les accords d’échange automatique de renseignements fiscaux. La première oblige les sociétés multinationales à produire une déclaration de revenus dans chaque pays où elles sont actives. Ce faisant, il est possible de mieux connaître leurs opérations réelles à l’échelle de la planète. La deuxième permet aux pays d’échanger automatiquement entre eux des déclarations de revenus d’entreprises et de contribuables.
Ces retombées tangibles du projet BEPS s’avèrent d’autant plus utiles qu’elles permettent aux pays membres d’obtenir des renseignements précieux pour percer l’hermétisme et l’opacité des paradis fiscaux.
Un phénomène à endiguer
Pour l’OCDE, le phénomène de l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices découle de stratégies de planification fiscale qui exploitent les failles et les différences entre les règles nationales et internationales. Les manœuvres auxquelles s’adonnent des sociétés ont pour but de transférer artificiellement leurs bénéfices dans des pays ou territoires où elles n’exercent guère d’activités réelles, mais où ces profits sont faiblement taxés, de sorte que leur charge fiscale est faible, voire nulle.
Cette pratique nuit à l’équité et à l’intégrité des systèmes fiscaux, car les sociétés opérant dans plusieurs pays peuvent utiliser les stratégies d’érosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices pour obtenir un avantage concurrentiel par rapport à celles opérant à l’échelle nationale.
Une convention multilatérale
Afin de contrer et de prévenir ce phénomène, l’OCDE a élaboré la Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices [en anglais, Multilateral Convention to Implement Tax Treaty Related Measures to Prevent BEPS]. Nommée également « Instrument multilatéral » (IM), la Convention modifie l’application des conventions fiscales bilatérales entre les juridictions participantes afin de permettre l’adoption de règles internationales et de réduire les possibilités d’évasion fiscale par les entreprises multinationales.
Le Canada a signé l’IM en 2017 et adopté, en 2019, le projet de loi C-82 (Loi mettant en œuvre une convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices). Quatre-vingt-quatre des 93 conventions fiscales canadiennes figurent aujourd’hui sur la liste des conventions couvertes visées par l’IM.
Un peu d’histoire
Il faut savoir que, depuis l’ère des gouvernements de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher et jusqu’à tout récemment, le monde était témoin d’une baisse continue des taux d’imposition des bénéfices des sociétés : de 38 % en 1993, la moyenne mondiale est passée à 24 % en 2021. Supérieur à 10 % dans certains endroits (p. ex. les îles anglo-normandes de Guernesey et de Jersey, l’île de Man et les Îles Vierges britanniques) en 2005, ce taux y a même été ramené à zéro en 2009.
Les choses ont commencé à bouger lors de la crise financière de 2007-2008 qui a contraint les États à intervenir pour sauvegarder leurs systèmes bancaires. Ils ont alors fini par reconnaître que la concurrence fiscale et la libre circulation des capitaux avaient leurs limites et, surtout, que l’érosion de leur base d’imposition et les transferts de bénéfices constituaient une menace gravissime. La pandémie de la COVID-19 de même que l’explosion des dépenses publiques qu’elle a provoquée ont amplifié cette prise de conscience alors que les États ont vu leurs déficits s’embraser et saisi par le fait même l’urgence de stabiliser leurs recettes.
Une nouvelle dynamique
Il va sans dire que l’entrée en scène d’un nouveau président américain plus conciliant et coopératif que son prédécesseur s’est avérée un facteur déterminant dans la mesure où des impératifs politiques majeurs obligent Joe Biden à changer drastiquement la politique fiscale des États-Unis. Pensons à son programme d’investissement dans les infrastructures et les énergies propres qui va requérir des sommes d’argent titanesques, ou encore aux relations tendues avec la Chine, deuxième économie mondiale qui est en voie de devenir la première puissance économique de la planète.
La fin des paradis fiscaux?
D’aucuns évoquent maintenant « la fin des paradis fiscaux », une prédiction qui peut sembler téméraire dans la mesure où elle reprend mot pour mot celle formulée par un ancien président de la République française, il y a 12 ans maintenant.
De fait, le défi d’encadrer la concurrence fiscale avec des limites convenues multilatéralement est loin d’être relevé. D’abord, parce qu’il y a des pays qui n’ont pas souscrit à l’accord, ensuite, parce que des travaux techniques doivent être parachevés et qu’un plan de mise en œuvre effective en 2023 est à élaborer. De plus, plusieurs pays ne disposent pas des moyens ni des ressources pour appliquer et faire respecter les mesures.
Fait à noter, les États-Unis n’ont pas signé l’IM! Le président Biden a beau clamer America is back, cela ne signifie pas pour autant que nos voisins du sud vont concourir à la réussite d’une démarche internationale s’ils en viennent à la conclusion qu’elle est susceptible de nuire à leurs intérêts ou d’affaiblir leurs positions dans le monde.
Force est de reconnaître qu’en dépit des progrès indéniables des dernières années, et plus particulièrement de la récente avancée historique, il y a toujours loin de la coupe aux lèvres avant d’assister à la fin des paradis fiscaux.