En 2014, M. Jérôme Dupras, professeur au Département des sciences naturelles de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) et chercheur à l’Institut des sciences de la forêt tempérée (ISFORT), fondait le Laboratoire d’économie écologique. En 2019, ce bassiste du groupe Les Cowboys Fringants était nommé titulaire de la toute nouvelle Chaire de recherche du Canada en économie écologique.

La naissance du concept

Première dans ce domaine au pays, la Chaire vise à « mieux comprendre et à mesurer la contribution de la biodiversité et des écosystèmes au bien-humain. Pour ce faire, [elle a entrepris] une analyse des territoires agricoles, forestiers et urbains, en s’appuyant sur la modélisation socio-écologique (sic), la théorie économique et la gouvernance environnementale » (source : ISFORT).

 

Les travaux de la Chaire s’articulent autour de trois grands axes, soit une « modélisation socioécologique » du lien étroit entre l’environnement et les activités humaines, la théorie économique et la gouvernance environnementale. L’approche pragmatique de son titulaire l’incite à mettre l’accent sur la transformation des résultats de ses recherches et de ses réflexions  en programmes et en politiques publics.

 

Dans la mouvance des investissements socialement responsables (ISR) et de la prise en compte de plus en plus courante de critères autres que financiers, en l’occurrence des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), l’économie écologique est un concept qui mérite que l’on y porte attention.

 

Elle est apparue à la fin des années 1980 à la faveur d’un constat quant à l’« entêtement » de la science économique officielle à considérer la nature et les écosystèmes uniquement comme une question d’équilibre de marchés à réaliser, principale cause de l’inefficacité de ses réponses aux problèmes environnementaux.

 

Alors que l’économie de l’environnement (ou économie environnementale), apparue au début des années 1970, émane de la science économique, l’économie écologique, elle, n’est pas tant une discipline qu’un champ de recherche dont l’une des finalités est de contribuer au développement durable, et plus particulièrement à l’équilibre entre ses trois piliers (économie, environnement et social).

 

Elle est en quelque sorte un courant de pensée dont les tenants déplorent la pensée monolithique, réductrice et unidimensionnelle de l’économie néoclassique et de l’économie de l’environnement. À leurs yeux, ces dernières refusent de remettre en question la théorie néoclassique dominante qui considère l’économie en termes d’échange et de production et l’environnement comme un ensemble de biens à la disposition des préférences et des logiques individuelles.

Inclure l’écologie dans les considérations économiques

Pour les économistes écologiques, les défis auxquels l’humanité fait face commandent de ne plus se limiter uniquement à tenter d’appliquer les outils économiques aux questions environnementales en essayant de faire en sorte que les individus tiennent compte des effets externes de leurs actions. Cette approche séculaire de l’école néoclassique est appelée « internalisation des externalités ».

 

L’internalisation consiste à inclure, dans les charges d’une entreprise, le coût des effets externes de ses activités. Quant aux externalités, elles réfèrent, au plan environnemental, à tous les types de pollution, de détérioration ou de destruction de l’environnement par ces mêmes activités.

 

Sans rejeter cette approche, l’économie écologique considère qu’elle est insuffisante pour assurer, dans la perspective du maintien et du renouvellement de la biosphère, le respect du principe d’une durabilité forte selon lequel :

  • le rythme de consommation des ressources renouvelables ne doit pas excéder celui de leur régénération ni celui de développement de substituts renouvelables et durables;
  • le rythme d’émission de pollution ne doit pas excéder la capacité de son absorption et de son assimilation par l’environnement.

 

Autrement dit, elle n’empêche pas l’érosion du capital naturel et de ses composantes (ressources naturelles, terres, écosystèmes) ni ne permet une lutte efficace contre nombre d’impacts socioécologiques négatifs (inégalité, pauvreté, réchauffement climatique, pollution, épuisement de ressources naturelles, etc.). D’où la nécessité d’aller plus loin que l’approche prônée par l’économie de l’environnement. Aussi, contrairement à celle-ci qui modélise les comportements des acteurs et des décideurs, l’économie écologique s’emploie, entre autres, à développer des cadres et des outils d’évaluation susceptibles d’être utilisés par ces agents pour bâtir une économie respectueuse des conditions et des capacités de la nature et des communautés.

 

À titre d’exemple, selon une étude réalisée en 2015 par Jérôme Dupras et son équipe, la valeur annuelle de la ceinture verte de Montréal est évaluée à 2,2 milliards de dollars (2,2 G$) en termes de services non marchands (pollinisation, prévention des inondations, traitement de la qualité de l’eau).

 

Ils ont calculé aussi que, sur les 4 à 5 millions d’arbres plantés sur des terrains privés sur l’île de Montréal, ceux gérés par la Ville (environ 400 000) fournissent des services dont la valeur est estimée à quatre millions de dollars (4 M$) [contrôle des eaux de ruissellement lors de fortes pluies, diminution des coûts de santé publique dans la lutte aux îlots de chaleur et de séquestration de carbone en milieu urbain].

 

Tout en réaffirmant que l’économie et l’environnement n’ont pas à être en contradiction, l’économie écologique entend contribuer à une meilleure intégration de la dimension environnementale, un facteur clé de succès de la lutte contre le changement climatique, le réchauffement planétaire et la perte de la biodiversité.

 

Des appels à l’action qui se multiplient

Près de 50 années se sont écoulées depuis l’appel du Club de Rome invitant le monde à envisager une limite à la croissance économique. Plus de 30 ans nous séparent du rapport Bruntland sur le développement durable qui pressait les générations actuelles de  répondre à leurs besoins sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.

 

Pourtant, une portion importante des ressources naturelles de la planète est encore et toujours exploitée sans tenir compte du temps nécessaire à leur renouvellement, et sans reconnaître que tirer la majeure partie des ressources de son capital plutôt que de ses revenus, c’est se condamner à la faillite.

 

Preuve en est le Jour du dépassement de la Terre qui, année après année, recule la date à compter de laquelle l’humanité vit à crédit parce qu’elle a consommé la quantité de ressources que la planète arrive à régénérer en un an.

 

Heureusement, le temps n’est pas pour autant au découragement ni à la résignation, car de plus en plus d’individus et d’entreprises sont sensibles aux enjeux environnementaux et investissent en adéquation avec leurs valeurs, en incluant des critères d’ISR dans leurs processus d’investissement ou d’affaires.

 

Depuis plusieurs années maintenant, les rendements des titres ISR affichent en moyenne et de façon interrompue une performance supérieure à celle des titres traditionnels. Ils justifient ainsi l’existence d’une corrélation positive entre la performance d’une entreprise en matière d’acceptabilité sociale et sa rentabilité. Et ils brisent le mythe, tenace, selon lequel l’ISR et la performance sont antinomiques (source : « Investissement responsable », Polyfinances, 15 janvier 2020).

 

Il s’agit là d’une contribution significative à la préservation de l’avenir de la planète que promeuvent et défendent l’économiste écologique Jérôme Dupras et ses collègues à travers leurs réflexions et leurs travaux, sans doute dans l’espoir que ne se matérialise jamais le constat prophétisé par Les Cowboys Fringants dans la chanson Plus rien : Je suis maintenant le dernier humain de la terre / Au fond l’intelligence qu’on nous avait donnée / N’aura été qu’un beau cadeau empoisonné.

 

Par sa façon ouverte et rigoureuse de traiter des enjeux contemporains majeurs, l’économie écologique a beaucoup à offrir et les investisseurs ont beaucoup à apprendre d’elle. Il va sans dire que sa progression et ses contributions sont dignes d’intérêt.

 

Le 28 février 2020, la direction de santé publique du Québec confirmait officiellement un premier cas de personne atteinte de la maladie à coronavirus, détecté la veille. Dans les semaines qui ont suivi, l’éclosion significative de la COVID-19 a provoqué une crise sanitaire sans précédent, forçant le gouvernement à décréter, le 12 mars, l’état d’urgence sanitaire.

Des répercussions sans précédent

Après avoir pris une série de mesures exceptionnelles pour contenir la propagation de cette maladie infectieuse, le gouvernement a mis « le Québec sur pause » jusqu’au 4 mai, date à compter de laquelle un déconfinement progressif a été amorcé.

Plusieurs secteurs d’activité ont été paralysés de sorte qu’environ 40 % de l’économie du Québec et 44 % des emplois ont été immobilisés en à peine trois semaines, avec les conséquences déconcertantes que l’on connaît maintenant. En effet, le Québec a été la province canadienne la plus éprouvée avec, entre autres :

  • une réduction de 39,8 % des heures travaillées entre les mois de février et d’avril ;
  • une perte de 820 500 emplois en mars et en avril ;
  • un taux de chômage qui est passé de 4,5 % en février à 8,1 % en mars et à 17 % en avril.

En pratique, alors que la situation était au beau fixe lors du dépôt du budget 2020-2021 du Québec, le 10 mars, le ministre des Finances a été contraint d’esquisser un tout autre portait, le 19 juin suivant (TABLEAU).

TABLEAU — PIB réel et ses principales composantes au Québec

 

2019
(%)
2020
(%)
Demande intérieure
Consommation des ménages ↑ 1,7 ↓ 8,8
Investissements résidentiels ↑ 3,9 ↓ 8,5
Investissements non résidentiels des entreprises ↑ 1,8 ↓ 15,4
Secteur extérieur
Exportations ↑ 1,4 ↓ 7,4
Importations ↑ 0,1 ↓ 8,2
Produit intérieur brut (PIB) réel ↑ 2,7 ↓ 6,5

Source : Ministère des Finances du Québec, Portrait de la situation économique et financière 2020-2021, juin 2020, tableau C.3, page C.10.

Cette diminution de l’activité économique est non seulement la plus importante depuis le début de la compilation des statistiques des comptes économiques, en 1981, mais elle est aussi à l’origine de « la pire récession depuis la Seconde Guerre mondiale », selon le ministre.

La récession provoquée par la pandémie de la COVID-19 a notamment causé une explosion des dépenses et une diminution des revenus des gouvernements, dont celui du Québec. Le Discours sur le budget 2020-2021 prévoyait le maintien de l’équilibre budgétaire après une contribution de 2,9 milliards de dollars au Fonds des générations. Quatorze semaines plus tard, la mise à jour économique du ministre faisait état d’un déficit historique de 14,9 milliards de dollars en 2020 et annonçait la ponction d’une somme identique dans la réserve de stabilisation de ce Fonds pour équilibrer les finances.

Il n’est pas surprenant que le nouveau gouverneur de la Banque du Canada, M. Tiff Macklem, ait signalé récemment que la pandémie a créé « un choc économique différent de tout ce que nous avons vu de notre vivant » et qu’elle va « infliger des dommages durables (…), notamment en nuisant longtemps à l’offre et à la demande ». Pour soutenir les marchés et pour amoindrir les coûts des emprunts des entreprises et des ménages, la Banque a procédé à des assouplissements quantitatifs, c’est-à-dire à des achats d’obligations et de dette du gouvernement.

Catalysée par un élément externe au monde financier, en l’occurrence une crise sanitaire, la crise financière actuelle est atypique, en raison de son absence de jalons et l’impossibilité de la comparer à aucune autre depuis plus d’un siècle.

De son côté, le Fonds monétaire international (FMI) estime que la pandémie se traduira, pour l’économie mondiale, par une perte cumulée de plus de 12 000 milliards de dollars (12 000 G$) cette année et l’an prochain. De fait, l’organisme s’attend à une récession mondiale plus importante et à une relance inégale et plus lente que prévu, notamment parce que la crise sanitaire n’est pas endiguée, des foyers d’infection se rallumant un peu partout à l’échelle de la planète.

Si l’ampleur de la récession est tributaire de la durée de la propagation de la COVID-19, le facteur clé du succès de la reprise réside dans un regain de confiance des ménages qui, face à l’état précaire de leurs finances, ne semblent pas prêts à dépenser.

Quelle forme de reprise aurons-nous ?

Même s’il est impossible de rattraper rapidement quelques mois d’inactivité économique, les mesures de soutien aux entreprises et aux travailleurs, de même que le devancement de certains projets d’infrastructures publiques par les gouvernements ont limité les dégâts et permettent d’entrevoir une relance qui s’annonce cependant ardue, ne serait-ce qu’en raison de l’incertitude qui perdurera d’ici la découverte d’un vaccin.

Il est toutefois permis d’espérer que les plans de déconfinement mis en place contribueront à revitaliser l’économie et à insuffler un élan ascendant marqué par un volume des activités et des investissements accrus ainsi que par un chômage en baisse.

Un certain optimisme quant à une reprise économique est de mise, alors que l’économie québécoise a enregistré 230 000 nouveaux emplois en mai et que le taux de chômage est passé de 17 % à 13,7 % en juin. Mais quelle forme cette reprise revêtira-t-elle ?

La reprise sera en V si l’activité économique rebondit rapidement après le choc et revient à son niveau initial en une douzaine de mois ou moins, en raison d’une croissance accélérée de la consommation et des dépenses des ménages de même que d’une récupération des pertes de production. Ce scénario d’une reprise tout aussi, voir plus forte que la chute de l’activité économique qui l’a précédée a été évoqué au début du confinement, alors que les citoyens s’attendaient à ce que le virus soit vaincu rapidement.

La reprise sera en U si l’activité économique, après avoir encaissé un choc s’étalant généralement sur un ou deux trimestres, retourne graduellement à son niveau initial en effectuant un rattrapage qui requiert souvent plus d’une année. Avec une relance moins prononcée que la chute, une telle reprise signifierait que le déconfinement ne porte pas les fruits attendus, le ralentissement économique durant plus longtemps que prévu. À cet effet, il faut noter que plus la courbe en U sera large, plus le retour à la pente de croissance initiale sera long.

Le schéma en L concrétisera le scénario du pire si rien ne bouge et que l’activité économique stagne à son niveau le plus bas durant de nombreuses années après sa dégringolade, que la maladie de la COVID-19 se chronicise et que les ménages reportent leurs dépenses. De fait, avec une croissance postreprise inférieure à la croissance prérécession, le choc encaissé serait suivi d’une période indûment longue avant que l’économie ne redémarre. On pourrait alors parler d’une dépression.

La reprise sera en W si la première vague de la maladie de la COVID-19 et d’autres vagues épidémiques ainsi que des périodes alternées de confinement et de déconfinement se traduisent par une relance suivie d’un autre fléchissement, lui-même suivi d’une nouvelle relance. Ce scénario est qualifié de double creux (double dip) ou d’économie en yoyo.

Les pessimistes prédisent un scénario en L, les alarmistes vont jusqu’à prophétiser une chute vertigineuse de l’économie en I ; et les plus optimistes misent sur une reprise en V. La vérité se situe probablement entre ces extrêmes, soit une reprise en U avec un creux plus long que prévu et une relance dans le courant de 2021, ou encore une reprise en W, c’est-à-dire une embellie suivie de nouveaux épisodes de la maladie de la COVID-19. C’est ce scénario que prévoit actuellement la Banque du Canada qui anticipe « une longue reprise en dents de scie ».

Quoi qu’il en soit, personne ne peut vraiment prévoir ce qu’il adviendra, alors que la sortie de crise dérivera de l’évolution de la pandémie, de la gestion de la crise, des mesures gouvernementales, de la découverte d’un vaccin et, par-dessus tout, de la capacité des citoyens à subordonner leur bien-être personnel à la responsabilité collective de se protéger les uns les autres en respectant les consignes de santé publique. La courbe de propagation ayant été aplatie, tout dépend désormais de tout un chacun. Même la reprise.

Tout adulte apte est le seul à pouvoir décider des soins qu’il accepte ou refuse de recevoir, quelle qu’en soit la nature. Il en va ainsi pour l’ensemble des traitements, examens et interventions de nature médicale, psychologique ou sociale requis ou non par son état de santé. Il en est de même pour ses soins de fin de vie.

 

Ces droits sont prévus par le Code civil du Québec et par les chartes des droits et libertés québécoise et canadienne qui consacrent notamment le droit à l’autodétermination de la personne. Un individu peut ainsi consentir à des soins, mais aussi les refuser ou demander l’interruption d’un traitement même si cela risque d’entraîner son décès.

 

Or, que se passe-t-il si un individu devient incapable, temporairement ou non, de manifester sa volonté au moment de consentir à ces soins ? Qui décidera pour lui ? Ses volontés seront-elles respectées ?

 

Heureusement, il est possible d’exprimer à l’avance ses volontés à cet égard. Plusieurs options peuvent être envisagées dont les directives médicales anticipées (« DMA »). Les autres options seront brièvement abordées un peu plus loin.

 

Les DMA ont été instaurées en 2015 par la Loi concernant les soins de fin de vie. Elles permettent aux personnes majeures et aptes qui le souhaitent d’exprimer à l’avance leur consentement ou leur refus de recevoir certains soins médicaux qui pourraient être requis par leur état de santé.

 

Conditions d’application

Les DMA seront utilisées uniquement si la personne concernée n’est pas en mesure de consentir aux soins pendant qu’elle se trouve dans l’une des situations cliniques suivantes :

  • elle souffre d’une condition médicale grave et incurable, et est en fin de vie;
  • elle est dans un état comateux jugé irréversible ou dans un état végétatif permanent; ou
  • elle est atteinte de démence grave, sans possibilité d’amélioration.

 

Par ailleurs, les seuls soins que les DMA permettent d’accepter ou de refuser sont les suivants :

  • réanimation cardiorespiratoire;
  • ventilation assistée par un respirateur ou par tout autre support technique;
  • traitement de dialyse;
  • alimentation forcée ou artificielle; et
  • hydratation forcée ou artificielle.

 

Les DMA ont une valeur contraignante : les professionnels de la santé y ayant accès sont obligés de les respecter. Si ce n’est pas le cas, un proche de la personne inapte peut demander au tribunal d’ordonner à l’équipe médicale de se plier aux DMA.

Démarche

Les DMA peuvent être faites devant notaire ou au moyen du formulaire Directives médicales anticipées en cas d’inaptitude à consentir à des soins signé devant deux témoins. Le caractère réglementé de leur forme et de leur contenu permet d’éviter toute interprétation pouvant les rendre inapplicables.

 

Par ailleurs, pour que les DMA d’une personne puissent être appliquées, il est important de s’assurer qu’elles puissent être retracées facilement et rapidement. C’est pourquoi la Loi a prévu la création d’un registre des DMA. Lorsque l’acte notarié (ou le formulaire prescrit) est dûment complété, il est conseillé de le déposer dans ce registre auquel peuvent accéder uniquement les personnes autorisées par la Loi, notamment les médecins.

 

Les DMA peuvent également être remises à un professionnel de la santé qui les déposera au dossier médical du patient, en s’assurant, au préalable, qu’elles sont toujours conformes aux volontés de la personne concernée.

 

Fonctionnement

Lorsque le médecin constate l’inaptitude d’une personne à consentir aux soins, il consulte le registre des DMA. Il doit le faire dans une situation de fin de vie ou d’atteinte sévère et irréversible aux fonctions cognitives (ex. : un coma irréversible ou une démence grave sans possibilité d’amélioration). Si des DMA concernant cette personne s’y trouvent, il les verse à son dossier médical.

 

Les DMA peuvent être révoquées en tout temps par leur auteur au moyen d’un formulaire prescrit à cet effet. Elles peuvent également être modifiées, mais seulement par la rédaction de nouvelles directives, lesquelles remplacent alors celles rédigées antérieurement.

 

En cas d’urgence, leur auteur, s’il est toujours apte, peut également les révoquer verbalement en exprimant des volontés différentes de celles se trouvant dans ses DMA.

 

Le médecin qui constate un changement significatif de l’état de santé d’une personne apte à consentir aux soins doit, si des DMA ont été versées à son dossier, vérifier auprès d’elle si ces directives correspondent toujours à ses volontés.

 

Les DMA ne permettent pas d’exiger des soins de santé non pertinents du point de vue médical ou non appropriés dans les circonstances. Il est également impossible de formuler une demande d’aide médicale à mourir au moyen des DMA.

 

Toute personne démontrant un intérêt pour la personne inapte, le médecin ou même l’établissement de santé où elle se trouve peut contester les DMA devant le tribunal. Pour invalider les DMA, en tout ou en partie, il faudra prouver que la personne était déjà inapte au moment de la rédaction de ses DMA ou que les volontés qui y figurent ne correspondent pas à celles qu’elle aurait normalement exprimées dans une situation similaire.

 

Alternative aux DMA

Les DMA constituent un outil formidable pour faire valoir ses volontés à l’égard des soins de fin de vie en cas d’inaptitude. D’ailleurs, les DMA prévalent sur les volontés exprimées dans tout autre document; elles sont contraignantes, facilement accessibles et n’impliquent l’intervention d’aucun tiers pour leur mise en œuvre. Toutefois, elles sont limitées à des situations cliniques et à des soins bien précis.

 

D’autres moyens existent pourtant pour faire connaître ses volontés de soins de fin de vie ou encore préciser celles énoncées dans les DMA. Le patient peut en discuter avec son médecin, lequel les consignera dans son dossier médical au moyen d’un formulaire Niveaux de soins et réanimation cardiorespiratoire. Ce formulaire détaille les préférences du patient concernant les examens, les soins ou les traitements à recevoir.

 

Le mandat de protection en prévision de l’inaptitude permet au mandataire désigné d’accepter ou de refuser pour son mandant les soins de fin de vie proposés. Ce document offre plus de souplesse que les DMA en matière d’instructions relatives aux soins de fin de vie et aussi quant à la façon dont la personne désire que la fin de sa vie se déroule. Toutefois, le mandat ne prend effet qu’après son homologation par le tribunal, soit lorsque l’inaptitude de la personne et la validité du mandat sont constatées. Si le mandat n’a pas été homologué au moment où il faut consentir aux soins, les dispositions qu’il contient pourront néanmoins servir de guide au représentant de la personne inapte.

 

Finalement, il est possible de rédiger un document appelé « testament de vie » ou « testament biologique » dans lequel sont exprimées les volontés de soins en cas d’inaptitude de son auteur. Ce document pourra être utilisé comme guide par la personne appelée à représenter la personne devenue inapte.

 

Toutefois, le mandat de protection et le testament biologique n’ont pas le caractère impératif des DMA. Le Code civil du Québec impose certaines balises supplémentaires au mandataire qui devra, en tentant de faire respecter les volontés énoncées dans ces documents, « s’assurer que les soins seront bénéfiques, malgré la gravité et la permanence de certains de leurs effets, qu’ils sont opportuns dans les circonstances et que les risques présentés ne sont pas hors de proportion avec le bienfait qu’on en espère ».

 

En l’absence de DMA et de représentant légal, les décisions relatives aux soins de fin de vie seront confiées au conjoint de cette personne si elle est mariée ou en union de fait ou civile. À défaut de conjoint, ou en cas d’empêchement de celui-ci, ce sera un proche parent ou une personne qui démontre pour elle un intérêt particulier. Il faut agir dans l’intérêt de la personne inapte et faire respecter, dans la mesure du possible, les volontés qu’elle a exprimées alors qu’elle était apte à le faire.

 

En conclusion

Finalement, il faut souligner que même si un individu a préparé des documents relatifs à ses soins de fin de vie, le Code civil du Québec prévoit que le personnel médical n’a pas à obtenir le consentement aux soins lorsqu’il ne peut être obtenu en temps opportun en cas d’urgence et lorsque la vie du patient est en danger ou son intégrité menacée.

 

Au moment de préparer vos volontés de soins en prévision de l’inaptitude, il est important de réfléchir à vos valeurs et d’en discuter avec vos proches. Cela permettra de réduire leurs doutes et leurs craintes dans l’éventualité où ils vous représenteront dans la mise en œuvre de vos volontés.

Vos régimes enregistrés subissent de fortes répercussions dans le contexte de la volatilité accrue des marchés. Cette situation peut toutefois offrir certaines opportunités dont il faut être conscient pour savoir en tirer profit.

Mesures d’assouplissement pour les FERR et les FRV

Le retrait minimal d’un fonds enregistré du revenu de retraite (FERR) pour une année est toujours déterminé en fonction de sa valeur marchande en début d’année. Toutefois, puisque la pandémie de la COVID-19 a provoqué une chute importante de la valeur d’une grande majorité des FERR depuis février 2020, le montant du retrait minimal de ce régime pour 2020, tel que déterminé au 1er janvier 2020, a été réduit de 25 %. Par exemple, si votre minimum à retirer du FERR était initialement de 40 000 $ pour 2020, il sera maintenant de 30 000 $ (40 000 $ x 75 %). En revanche, si vous avez retiré plus que le nouveau montant du retrait minimal pour 2020, aucun remboursement à votre FERR ne sera possible. Cette mesure fiscale vise également les FERR immobilisés et les fonds de revenu viager (FRV).

Le 16 avril 2020, dans le contexte de la COVID-19, le gouvernement du Québec a également annoncé une mesure temporaire permettant l’assouplissement des règles de décaissement des fonds de revenu viager (FRV) pour 2020. Pour plus de détails, nous vous invitons à consulter le site de Retraite Québec :

https://www.retraitequebec.gouv.qc.ca/fr/actualites/2020/Pages/20200416-1.aspx

Décès du détenteur d’un REER ou d’un FERR

Au décès du détenteur d’un REER ou d’un FERR, la valeur de ces régimes au jour du décès est entièrement imposable dans les déclarations de revenus du défunt pour l’année de son décès. Le « roulement fiscal au décès » qui consiste à transmettre ces régimes au conjoint (marié ou de fait) ou à un enfant à charge qui est mineur ou handicapé permet de reporter l’imposition de ces régimes. Pour ce faire, le REER ou le FERR devront être transférés dans un régime établi au nom du conjoint ou de l’enfant (REER, FERR ou contrat de rente admissible) selon ce que la loi permet.

La chute des marchés boursiers pourrait représenter une opportunité fiscale fort intéressante à l’égard du REER ou du FERR d’un détenteur récemment décédé, qui ne peuvent pas être transmis par roulement fiscal (ex. : le REER ou le FERR légué à des enfants majeurs non handicapés).

Prenons l’exemple d’un REER ou d’un FERR dont la valeur des placements constitue 500 000 $ au jour du décès, en décembre 2019. Selon le testament du défunt, tous ses biens (incluant son REER) sont légués à son fils âgé de 35 ans. Au moment de la terminaison du REER en avril 2020, la valeur des placements représente 400 000 $.

Aux fins fiscales, le montant de 500 000 $ sera ajouté au revenu imposable du défunt pour l’année 2019. Cependant, la baisse de valeur de 100 000 $ pourra être déduite du revenu imposable du défunt en 2019. Le montant net imposable en 2019 sera donc de 400 000 $ à l’égard du REER. Pour avoir droit à cette déduction, le REER doit être terminé au plus tard le 31 décembre 2020. La terminaison d’un REER ou d’un FERR signifie que les placements détenus dans ceux-ci peuvent être transférés dans le compte de placement non enregistré de la succession. Ce transfert n’est jamais assujetti aux retenues d’impôt à la source.

Revenons à notre exemple. Pour la succession et l’héritier, les placements obtenus à la suite de la terminaison du REER auront un coût fiscal de 400 000 $ (soit la valeur du REER au moment de sa terminaison). Par conséquent, en cas de vente ultérieure, toute augmentation de valeur au-delà de 400 000 $ sera traitée comme un gain en capital, dont seulement la moitié sera imposable. Par exemple, un prix de vente de 500 000 $ déclenchera un gain en capital de 100 000 $, dont seulement la moitié (50 000 $) sera ajoutée au revenu imposable de l’année de la vente.

Dans cet exemple, la terminaison du REER au moment opportun (en avril 2020) aura permis de convertir un revenu de 100 000 $, qui aurait été autrement pleinement imposable au décès, en un revenu de 50 000 $ qui sera imposable ultérieurement, soit lors de la vente des placements à un moment où ils auront remonté à leur valeur de 500 000 $. Il arrive parfois que la reprise des marchés boursiers soit assez rapide, surtout lorsque leur chute aura été rapide et prononcée.

Dans un marché baissier, il est donc nettement plus avantageux pour les héritiers de terminer le REER à un moment où sa valeur se trouve à son niveau le plus bas. Les épargnes fiscales seront d’autant plus colossales que la valeur du REER au décès sera substantielle et que sa baisse sera significative. Malheureusement, il est impossible de prévoir le meilleur moment pour terminer le REER. Si la valeur des placements poursuit sa baisse après la terminaison du régime et que lesdits placements sont éventuellement vendus, la succession ou l’héritier, selon le cas, pourra au moins réaliser une perte en capital pour la dévaluation additionnelle.

Pour fins de comparaison, si le REER du défunt est terminé avant sa baisse de valeur (500 000 $ dans notre exemple), tout ce montant sera imposable au décès; et la vente ultérieure des placements à un prix de 500 000 $ ne déclenchera aucun gain ni perte en capital pour les héritiers. Si ce prix de vente est différent, il y aura alors un gain ou une perte en capital, selon le cas.

Si le marché est haussier

Lorsque le décès du rentier survient lors d’un marché haussier, le liquidateur aura avantage à terminer le REER ou FERR le plus rapidement possible après le décès.

À partir de notre exemple, supposant que les placements affichent une plus-value non réalisée de 50 000 $ entre le jour du décès et la terminaison du REER. Le montant imposable au décès sera de 500 000 $. Quant à la somme de 50 000 $, elle constituera un revenu pleinement imposable pour la succession (et non un gain en capital). Pour la succession et l’héritier, les placements auront un coût fiscal de 550 000 $.

Si le REER est plutôt terminé avant cette hausse de valeur de 50 000 $, le coût fiscal des placements sera de 500 000 $ pour la succession. La vente ultérieure des placements à un prix de 550 000 $ déclenchera un gain en capital de 50 000 $, dont seulement la moitié (25 000 $) sera imposable. Il s’agit d’un avantage fiscal intéressant.

Revenus gagnés dans le REER ou FERR après le décès

Tant que le régime n’aura pas été terminé, tous les revenus générés par les placements après le décès demeureront à l’abri de l’impôt (intérêts, dividendes et gains en capital). Cette règle fiscale s’applique jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit l’année du décès.

Toutefois, ces revenus accumulés dans le REER ou le FERR seront pleinement imposables pour la succession au moment de la terminaison des régimes et ne pourront pas bénéficier de l’imposition favorable des dividendes de source canadienne et des gains en capital, ni donner droit à des crédits pour impôts étrangers.

Si le régime est terminé avant la réalisation de ces revenus de placement, ceux-ci seront aussi imposés dans la succession, mais en tenant compte des particularités fiscales de chaque type de revenus. Lorsque ces revenus sont importants, il sera avantageux de terminer le REER ou le FEER le plus tôt possible après le décès.

Conclusion

Puisque la terminaison du REER ou du FERR du défunt doit être effectuée à un moment stratégique, il revient au liquidateur de s’assurer qu’il pourra le faire le temps venu. À cet égard, il doit remettre promptement à l’émetteur du REER ou du FERR tous les documents juridiques requis afin de démontrer qu’il a tous les pouvoirs pour agir comme liquidateur. Il devra ensuite ouvrir un compte non enregistré au nom de la succession. Ces étapes administratives peuvent parfois entraîner de longs délais.

 

Le compte d’épargne libre d’impôt (CELI) existe depuis le 1er janvier 2009. Toutefois, son fonctionnement et son traitement fiscal suscitent plusieurs questions de la part des investisseurs.

Le CELI en bref

 

Bien que désigné « compte d’épargne », le CELI constitue en fait un régime fiscal dans lequel il est possible d’investir plusieurs types de placement (unités de fonds communs de placement, actions de sociétés cotées en Bourse, obligations, CPG, liquidité, etc.).

 

L’attrait principal du CELI réside dans le fait que ses revenus de placement (intérêts, dividendes et gains en capital) ne sont pas imposables autant durant la détention des placements dans le régime qu’au retrait. Toutefois, les cotisations déposées dans un CELI ne sont jamais déductibles du revenu imposable.

 

Les revenus de placement gagnés dans un CELI n’ont donc aucune incidence sur les crédits d’impôt et les prestations gouvernementales, lesquels peuvent être réduits ou ramenés à zéro en fonction du revenu imposable (ex. : montant de la pension de la Sécurité de la vieillesse).

 

Les droits de cotisation au CELI sont accordés annuellement à tout résident canadien âgé de 18 ans et plus (6 000 $ en 2020). Une personne âgée d’au moins 18 ans en 2009 n’ayant jamais cotisé à un CELI a donc droit d’y déposer une somme maximale de 69 500 $ en 2020. Le montant maximal sera évidemment moindre pour la personne ayant eu 18 ans après 2009. Contrairement au REER, il n’y a pas d’âge limite pour détenir un CELI ou y cotiser. Tous les droits de cotisation inutilisés s’accumulent et sont reportés indéfiniment.

 

Les retraits ne réduisent pas votre marge CELI. En effet, en plus d’être non imposable, tout retrait donne le droit de cotiser, à compter de l’année suivante, une somme égale au montant du retrait.

 

Le CELI du conjoint

 

Vos droits de cotisation au CELI ne peuvent être utilisés que pour votre propre CELI. Contrairement au REER, vous ne pouvez pas vous servir de vos droits de cotisation au CELI pour cotiser au CELI de votre conjoint.

 

Cependant, vous pouvez effectuer un don ou un prêt d’argent (avec ou sans intérêt) à votre conjoint afin qu’il puisse cotiser à son propre CELI selon ses propres droits de cotisation.

 

 

Le CELI au décès : la règle générale

 

Au décès, les droits de cotisation inutilisés au CELI seront perdus et ne pourront pas être transférés au conjoint. La succession ne pourra pas non plus cotiser à un CELI au nom du défunt ou au nom de son conjoint.

 

Par ailleurs, la valeur accumulée du CELI au jour du décès n’est jamais imposable que ce soit dans l’année du décès ou au moment de l’encaissement final par la succession.

 

De plus, le CELI demeurera en vigueur jusqu’à ce qu’il soit terminé et encaissé par la succession. La terminaison et l’encaissement final du CELI devraient préférablement être effectués au plus tard le 31 décembre de l’année suivant celle du décès.

 

Après la date du décès en revanche, toute augmentation de la valeur des placements du CELI et tous les revenus gagnés dans celui-ci deviennent imposables pour la succession au moment de l’encaissement final du CELI. À noter que ce revenu sera imposé comme un revenu ordinaire sans bénéficier d’une imposition avantageuse (ex. : gain en capital ou dividende) ou de crédits pour impôt étranger. Ce revenu imposable n’est assujetti à aucune retenue d’impôt et sera indiqué sur des feuillets d’impôt.

 

Il est d’ailleurs généralement recommandé d’encaisser le CELI le plus rapidement possible après le décès afin de minimiser cette imposition à titre de revenu ordinaire. En effet, à compter de cet encaissement, la plus-value réalisée et les revenus provenant des placements hors CELI pourront bénéficier d’une imposition avantageuse dans la succession, à titre de gain en capital ou de dividende, et donneront droit aux crédits pour impôt étranger. Les pertes en capital pourront également être admissibles.

 

Par ailleurs, en cas de baisse de valeur des placements au moment de la fermeture du CELI du défunt, aucune déduction fiscale ne pourra être réclamée. Par conséquent, toute augmentation de valeur des placements après cette fermeture sera éventuellement imposable à titre de gain en capital. Pour cette raison, il est fortement recommandé de fermer le CELI le plus tôt possible après le décès afin de limiter la baisse de valeur des placements à l’intérieur du CELI, ce qui permettra de minimiser le gain en capital réalisé postérieurement à la fermeture du CELI.

 

 

Le roulement du CELI en faveur du conjoint survivant

 

Cela étant dit, il est toutefois possible de transmettre son CELI par testament à son conjoint fiscal. Ce roulement permet à ce dernier de transférer le CELI du défunt dans son propre CELI, sans égard au solde inutilisé de ses propres droits de cotisation. Cette option avantageuse permet donc au conjoint d’augmenter les cotisations à son CELI au-delà de ses droits inutilisés.

 

Le terme de « conjoint fiscal » désigne la personne mariée (ou unie civilement) avec le défunt, ou encore la personne ayant vécu en union de fait avec le défunt pendant une période consécutive d’au moins douze mois ou avec qui elle a eu un ou des enfants.

 

La date limite pour effectuer ce roulement fiscal est le 31 décembre de l’année qui suit l’année du décès. Par ailleurs, ce roulement ne sera valide que si le conjoint survivant produit le formulaire fédéral RC240 au plus tard le 30e jour après le transfert dans son CELI.

 

Il y a généralement deux options pour effectuer le roulement fiscal du CELI en faveur du conjoint survivant : 1) transfert direct du CELI du défunt au CELI du conjoint; 2) encaissement du CELI du défunt et ensuite cotisation au CELI du conjoint.

 

Le montant maximal que le conjoint survivant pourra transférer dans son CELI correspond à la valeur du CELI du défunt au jour de son décès. Par conséquent, lorsque la valeur du CELI du défunt augmente après son décès, l’excédent ne pourra faire l’objet du roulement fiscal, sauf si le conjoint possède lui-même des droits inutilisés suffisants. Il faut donc être très prudent lorsque le CELI du défunt est entièrement transféré dans le CELI du conjoint afin d’éviter une cotisation excédentaire. Comme mentionné précédemment, l’excédent de valeur constitue un revenu pleinement imposable.

 

Toutefois, si la valeur du CELI du défunt subit une baisse après le décès du détenteur, le montant maximal pouvant bénéficier du roulement fiscal sera plutôt la valeur moindre dont le conjoint héritera.

 

Par conséquent, qu’il y ait une hausse ou une baisse de la valeur du CELI après le décès, il sera toujours préférable d’effectuer le roulement au conjoint le plus rapidement possible après le décès.

 

Le CELI au testament

La transmission du CELI au conjoint survivant se fait généralement par testament, selon l’une des trois formulations les plus courantes qui suivent :

  1. Je lègue mon CELI à mon conjoint;
  2. Je lègue tous mes biens à mon conjoint;
  3. Je lègue un pourcentage de mes biens à mon conjoint (ex. : 50 %). Le CELI devra ensuite être attribué au conjoint dans sa part d’héritage.

 

Il n’est donc pas obligatoire que le CELI soit spécifiquement légué au conjoint pour qu’il puisse bénéficier d’un roulement fiscal.

 

Il sera même possible d’effectuer le roulement fiscal du CELI au conjoint survivant dans le cadre du legs d’une somme d’argent en sa faveur, mais à condition que le CELI ne soit pas légué spécifiquement à une autre personne et que ce legs soit payé au conjoint à même l’encaissement du CELI du défunt.

 

Quelques recommandations

Puisque le solde inutilisé des droits de cotisation au CELI est totalement perdu à votre décès, il est fortement recommandé, en cas de décès imminent, de maximiser votre CELI afin qu’au décès, votre CELI puisse être transféré dans le CELI de votre conjoint par roulement fiscal.

 

Il est recommandé de réviser votre testament afin de vous assurer que votre CELI pourra bénéficier du roulement fiscal en faveur du CELI de votre conjoint si telle est votre intention.

 

 

Note : Le traitement fiscal décrit dans le texte s’applique au type de CELI appelé « CELI en fiducie ».

Les fonds communs de placement constituent un mode d’investissement comportant de nombreux avantages. Toutefois, leur mode de fonctionnement et certaines de leurs caractéristiques méritent des explications plus poussées d’autant plus que certains mécanismes propres à ces fonds jouent un rôle important dans la protection de l’argent et des droits des investisseurs.

Les fonds communs de placement sont constitués des sommes mises en commun par les investisseurs qui obtiennent en retour des parts de ces fonds. Chaque investisseur devient alors un porteur de parts de ces fonds. L’accumulation des sommes déposées dans ces fonds leur donne accès à une gamme d’investissements qui, autrement, serait hors de leur portée : marché monétaire, obligations gouvernementales ou corporatives, actions canadiennes ou étrangères, actions privilégiées, immobilier, infrastructures, dette privée, etc.

 

Ce regroupement des actifs et des ressources permet aussi de diminuer les frais que chaque investisseur est appelé à assumer individuellement.

 

Avantages

Les fonds communs de placement offrent également plusieurs autres avantages :

  • La diversification: chaque fonds contient un nombre de titres beaucoup plus élevé que ce qu’un investisseur indépendant pourrait se permettre, ce qui contribue à répartir le risque et à réduire les effets de la volatilité du marché sur les rendements. Certains fonds peuvent également permettre à leurs porteurs de parts d’investir dans une gamme d’actifs qui requiert des investissements trop importants pour la grande majorité des investisseurs.

 

  • Une gestion professionnelle: l’argent placé dans les fonds est géré par des professionnels du placement qui prennent leurs décisions en se fondant sur leur expérience et leur expertise, bien sûr mais aussi sur de l’information, des recherches et des logiciels qui sont difficilement accessibles à des investisseurs individuels.

 

  • La liquidité: les parts de fonds peuvent généralement être achetées et vendues tous les jours ouvrables ce qui permet à chaque porteur de parts d’accéder facilement et rapidement à son argent. Cette souplesse leur permet également de transférer leur argent d’un fonds à un autre en fonction de l’évolution de leurs besoins et de leurs objectifs de placement.

 

 

Intervenants

La gestion d’un fonds commun de placement est complexe et requiert l’implication de nombreux acteurs qui y jouent chacun un rôle indispensable et souvent méconnu. Voici donc quelques explications à ce sujet.

 

Les fonds communs de placement sont généralement constitués en fiducie ou parfois en société par actions. Ils sont représentés par un fiduciaire dans le cas d’une fiducie ou par des administrateurs dans le cas du fonds constitué en société. Ces derniers assument la responsabilité ultime des fonds et doivent notamment représenter les intérêts de l’investisseur, veiller à ce que les placements demeurent conformes aux objectifs de placement du fonds et exercer un rôle de surveillance du gestionnaire des fonds à qui ils délèguent l’administration du fonds.

 

Le gestionnaire des fonds agit un peu comme leur chef d’orchestre. C’est lui qui administre l’ensemble des affaires et activités quotidiennes des fonds, fournit les installations et le personnel nécessaires à leurs affaires, établit les objectifs et la politique d’investissement des fonds et approuve leurs états financiers. Il choisit les divers fournisseurs de services (dépositaire, gestionnaires de portefeuille, etc.) et s’acquitte également de certaines fonctions qui lui sont déléguées par le fiduciaire dans la supervision de la gestion des portefeuilles de placement des fonds. Il prépare aussi l’aperçu du fonds, le prospectus simplifié et l’ensemble des rapports relatifs aux fonds et mis à la disposition des porteurs de parts pour qu’ils puissent disposer de toute l’information requise. En exerçant ses fonctions et pouvoirs, le gestionnaire est tenu d’agir dans l’intérêt des fonds.

 

Le dépositaire agit comme gardien des actifs du fonds. C’est à lui qu’est confiée la garde de l’argent et des valeurs mobilières appartenant aux fonds. Et c’est lui qui recevra les titres achetés par le gestionnaire de portefeuille ou qui les remettra à ceux à qui ils ont été vendus.

 

Le rôle le mieux connu est probablement celui des gestionnaires de portefeuille. Ils sont responsables de l’analyse, des recommandations et des décisions d’investissement de chacun des fonds communs de placement. Ils sont également responsables des opérations sur les titres en portefeuilles des fonds. Ce sont eux qui gèrent les fonds quotidiennement et décident quand acheter et vendre des placements selon les objectifs de placement de chaque fonds et leur appréciation, notamment, de l’évolution du contexte économique et des marchés financiers.

 

Toutefois, pour l’investisseur, l’intervenant le plus important est certainement le représentant du courtier en épargne collective qui agit comme intermédiaire entre lui et les distributeurs des différents fonds communs de placement. Ce représentant joue un rôle primordial car c’est lui qui guidera l’investisseur vers le ou les fonds qui lui conviennent le mieux en fonction de sa tolérance au risque, ses objectifs de placement et son profil d’investisseur. Quant aux distributeurs, ils s’occupent du marketing et de la vente de parts dans les fonds dont ils sont responsables. Leur rôle consiste à accroître les actifs du fonds en vendant des parts et en sollicitant des investisseurs.

 

L’agent chargé de la tenue des registres tient les registres des porteurs de parts pour chacun des fonds et maintient à jour la liste des noms et coordonnées des porteurs de parts et le nombre de parts qu’il détiennent respectivement en fonction de toutes les transactions qui se déroulent à chaque jour.

 

En général, c’est le dépositaire ou l’agent chargé de la tenue des registres qui procède au calcul de la valeur liquidative des parts de chaque fonds. Le prix des parts change quotidiennement pour tenir compte de l’évolution de la valeur des placements détenus par le fonds. Le prix des parts suit l’évolution des placements : lorsque ceux-ci prennent de la valeur, le prix des parts augmente, et lorsqu’ils en perdent, le prix des parts diminue.

 

Fréquemment, le même acteur peut agir à plusieurs titres. Ainsi, le fiduciaire peut également agir à titre de dépositaire et/ou d’agent chargé de la tenue des registres.

 

L’auditeur indépendant est un autre intervenant jouant un rôle important. Il consiste à auditer les livres et pratiques comptables des fonds ainsi que leurs états financiers annuels. L’auditeur doit obtenir l’assurance raisonnable que les états financiers pris dans leur ensemble sont exempts d’anomalies significatives et vérifier que l’information rapportée correspond bien à la réalité.

 

Le gestionnaire des fonds doit également mettre sur pied un comité d’examen indépendant des fonds (« CEI »). Le CEI est composé d’au moins trois personnes indépendantes du gestionnaire, des fonds concernés et des sociétés et entités qui leur sont apparentées.

 

Le mandat du CEI est de se pencher sur toutes les questions de conflits d’intérêts qui lui sont soumises par le gestionnaire, dont les suivantes :

– Les situations dans lesquelles le gestionnaire, ou une entité qui lui est apparentée, a un intérêt qui peut entrer en conflit avec la capacité du gestionnaire d’agir de bonne foi et dans l’intérêt des fonds;

 

– Une disposition relative aux conflits d’intérêt ou aux opérations intéressées prévues par les lois sur les valeurs mobilières applicables qui interdit par ailleurs aux fonds, au gestionnaire ou à une entité apparentée de mettre en œuvre une mesure projetée sans le consentement du CEI.

 

Le CEI peut également avoir à se pencher sur des restructurations ou des cessions d’actifs impliquant les fonds et sur tout changement d’auditeur indépendant.

 

Le CEI a l’obligation d’informer l’Autorité des marchés financiers (AMF), le cas échéant, de tout cas où il a connaissance d’une opération mise en œuvre par le gestionnaire en violation de la législation sur les valeurs mobilières ou d’une condition imposée par le CEI dans une approbation.

 

Chaque année, le CEI se penche sur les différentes politiques mises en place par le gestionnaire dans le cadre de la gestion des conflits d’intérêts potentiels et s’assure d’en être satisfait. Le CEI prépare et soumet également aux porteurs de parts des fonds un rapport annuel sur ses activités.

 

Finalement, il importe de rappeler que chacun des intervenants mentionnés ci-devant est assujetti à la réglementation applicable en valeurs mobilières et que chacune de ces entités et chacun de leurs représentants doivent être dûment inscrits auprès de l’AMF. Celle-ci s’assure que toutes ces personnes possèdent la formation, les compétences et les aptitudes requises par la loi et procède périodiquement à des inspections de leurs activités pour s’assurer du respect des exigences en la matière.

 

 

S’il a fallu deux millénaires pour que la monnaie sonnante et trébuchante devienne immatérielle (fiduciaire et scripturale), quelques décennies à peine ont suffi pour assister à sa dématérialisation accélérée induite, d’une part, par l’électronisation (going electronic) associée aux nouvelles technologies et, d’autre part, par les nouvelles habitudes de vie et les préférences des consommateurs qui redéfinissent littéralement la conception et l’utilisation de l’argent.

 

Des modes de paiement non pécuniaires ont d’abord pris la forme de cartes de crédit, la première étant celle émise par Diners Club dans les années 1950, suivie quelques années plus tard par American Express et, dans les années 1960, par Visa et MasterCard. Quant aux premières cartes de débit, elles sont apparues vers les années 1970.

 

Les paiements effectués à l’aide de ces instruments « traditionnels » dotés d’une puce ou d’une bande magnétique destinée à être « lue » au contact physique d’un lecteur intégré à un terminal sont en voie d’être supplantés par les paiements sans contact, et ce, à une vitesse vertigineuse.

 

Aux États-Unis, par exemple, il a fallu 28 ans pour dénombrer 100 millions de comptes de cartes de crédit à bande magnétique, mais seulement 12 pour atteindre le même nombre de cartes de débit et uniquement sept pour un nombre identique de comptes PayPal. Des experts sont d’avis que cinq ans seront nécessaires pour compter 100 millions de cartes de crédit ou de débit sans contact.

 

Depuis le début des années 2000, la progression fulgurante des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) et leurs impacts sur la transmission des données accélèrent l’émergence de nouveaux modes de paiement ou de virement dématérialisés qui sont des dispositifs d’accès à des fonds, mais pas de la monnaie numérique (ou argent électronique).

 

Cette monnaie est une valeur monétaire qui n’est pas libellée dans une monnaie nationale et qui possède donc sa propre unité de compte. Stockée sur un support électronique ou magnétique (ex. : un ordinateur, un téléphone cellulaire) ou dans le nuage (cloud), elle circule grâce à deux instruments de paiement :

 

  • le porte-monnaie électronique, c’est-à-dire une « carte à montant prépayé, non personnalisée, émise par une banque ou une société, qui permet à son détenteur de régler, en argent électronique, le paiement de produits et services, et ceci de façon anonyme, sans autorisation ou signature, comme avec de l’argent comptant » (Le grand dictionnaire terminologique);

 

  • le porte-monnaie virtuel, soit « un système de paiement sécurisé qui, par l’intermédiaire d’un logiciel installé directement chez le consommateur, permet de stocker de la monnaie virtuelle sur le disque dur, laquelle servira pour le règlement en ligne des achats de faible montant » (idem).

 

Bien que la première tentative de créer de la monnaie virtuelle à l’aide d’algorithmes date de la fin des années 1980, c’est à compter du début des années 2010 que l’intérêt pour la cryptomonnaie s’est généralisé. La plus connue, le Bitcoin, a été lancé en 2009 et a suscité un tel engouement que cinq (5) ans plus tard, on en dénombrait plus de 500 autres (ex. : le litecoin, le ripple, le dogecoin, l’ethereum, le peercoin, le darkcoin, etc.).

 

Le réseau social Facebook n’entendait pas être de reste avec son projet Libra qu’il comptait lancer en 2020, mais un comité du Congrès américain semble avoir sonné le glas du rêve de Mark Zuckerberg en octobre 2019. Quelques mois auparavant, les ministres des Finances des pays du G7 et leurs régulateurs financiers avaient exprimé eux aussi leurs craintes et leur méfiance, et opposé un refus catégorique, notamment au nom de la souveraineté monétaire des États.

 

La Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a également pris les grands moyens pour mettre un terme à l’ambition du réseau social russe Telegram de lancer sa monnaie virtuelle sur le sol américain.

 

Indéniablement, les monnaies numériques et les technologies qui les portent génèrent des gains d’efficacité pour les personnes et les organisations qui les utilisent. Indiscutablement, elles comportent aussi des risques qu’il ne faut surtout pas sous-estimer :

  • elles n’ont qu’une valeur spéculative et leur très grande volatilité affecte leur fiabilité comme réserve de valeur; c’est la raison pour laquelle elles ne servent pas d’unité de compte;
  • elles ne sont pas protégées par des régimes d’assurance-dépôts fédéraux ou provinciaux;
  • l’absence de réglementation a pour corollaire une protection lacunaire, voire inexistante de leurs utilisateurs;
  • l’absence de tiers dignes de confiance pour authentifier et valider les transactions expose leurs utilisateurs à la fraude, au vol ou au piratage informatique;
  • elles ne donnent accès à aucun processus de traitement des plaintes;
  • les trouver et les échanger facilement peut s’avérer d’autant plus ardu qu’il n’y a aucune obligation de les accepter comme paiement ni de les échanger contre de la monnaie « traditionnelle » (ex. : le dollar canadien);
  • les achats et les transactions effectués avec la monnaie numérique ne sont pas réversibles, c’est-à-dire qu’il est impossible pour leurs utilisateurs de renverser les frais en cas de non-réception d’un bien, de récupérer leur argent sans l’approbation du vendeur, ni d’arrêter le paiement;
  • toutes les transactions sont enregistrées dans une base de données à code source libre (chaîne de blocs ou block chain) contenant des renseignements sur les montants des transactions, les adresses des portefeuilles ou les clés publiques des expéditeurs et des destinataires, et que tous les utilisateurs peuvent consulter;
  • la défaillance d’une cryptomonnaie est susceptible de provoquer une perte de confiance envers les autres émetteurs et, par le fait même, envers le système de paiement; le cas échéant, l’État et les contribuables seraient contraints d’assumer les pertes causées par l’émetteur d’une monnaie privée;
  • elles peuvent être utilisées pour financer des activités illégales (ex. : le blanchiment d’argent, le financement d’activités terroristes ou d’autres activités criminelles).

 

Il est important de noter qu’à l’instar de la Banque du Canada qui considère les devises virtuelles comme des produits de placement et non de l’argent, l’Agence du revenu du Canada (ARC) estime qu’elles constituent une marchandise susceptible d’être achetée ou vendue et que tout profit réalisé avec de la cryptomonnaie doit être déclaré en tant que gain en capital.

 

Au Canada, les transactions effectuées avec de l’argent liquide ont diminué de moitié au cours de la dernière décennie. Selon des données de Paiements Canada (anciennement l’Association canadienne des paiements), les transactions en espèces représentaient 31 % en 2016 comparativement à 42 % 2011. Durant la même période, les transactions par carte de débit sont passées de 20 % à 26 %, et celles par carte de crédit de 17 % à 23 %. Quant aux transactions par cartes bancaires, elles comptaient en 2017 pour 64 % du volume des paiements effectués aux points de vente, en personne ou en ligne.

 

Les statistiques confirment donc une diminution des transactions en argent comptant au profit du paiement électronique, une tendance lourde et irréversible qui pourrait signifier éventuellement la fin des billets de banque et des pièces de monnaie.

 

Toutefois, la dématérialisation intégrale de la monnaie suscite un vif débat entre, d’un côté, ses partisans qui considèrent qu’elle constitue un moyen efficace de lutter contre les activités illégales, et, de l’autre, ses opposants pour qui elle permet un profilage des utilisateurs, dont plusieurs redoutent l’exploitation par les acteurs du secteur privé.

 

La disparition de l’argent liquide, tout comme celle du chèque d’ailleurs, est annoncée depuis plusieurs décennies, mais elle ne s’est toujours pas matérialisée. Son utilisation a beau régresser, il n’est pas impossible qu’une monnaie virtuelle officielle soit créée avant sa disparition définitive.

 

En effet, une monnaie numérique publique, qui serait émise par les banques centrales et qui garantirait une protection pour les consommateurs (sécurité totale, célérité, simplicité et gratuité des transactions), est une idée formulée par l’ancienne directrice générale du Fonds monétaire international (FMI). À ses yeux, les cryptomonnaies des banques centrales bénéficieraient de l’encadrement réglementaire et de la reconnaissance de leur fiabilité.

 

La perspective d’une guerre entre les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et les États sur le terrain de la monnaie n’est sans doute pas étrangère à la décision de la France de créer un groupe de travail du G7 dédié aux projets de monnaies virtuelles. En effet, si l’une d’entre elles parvenait à se doter d’une valeur d’échange, c’est-à-dire à servir de moyen de paiement à un grand nombre d’utilisateurs à l’échelle planétaire, l’économie mondiale pourrait être sérieusement perturbée.

 

La lutte engagée entre Big State et Big Tech s’annonce fort palpitante.

 

La monnaie se définit surtout par ses trois fonctions d’unité de compte, d’intermédiaire des échanges et de réserve de valeur, telles que décrites par Aristote dès l’Antiquité. Qualifiée aussi de « langage » ou de « rapport social » fondé sur un ensemble de règles permettant la coordination de différentes actions économiques, la monnaie est aussi un instrument politique, sa valeur demeurant toujours un indicateur de la force, voire de la puissance d’une nation ou d’une zone monétaire.

 

Les types de monnaie

Monnaie marchandise

 

De l’Antiquité jusqu’au XIXe siècle, la monnaie marchandise a été la toute première apparue après le troc, une forme primitive de l’échange consistant à échanger un bien contre un autre et dont le succès est tributaire de la coïncidence des besoins des parties concernées. Dépendamment des pays où elle était utilisée, cette monnaie revêtait plusieurs formes : céréales, grains, fèves, épices, thé, bétail, fourrures, vin, coquillages, perles, outils, etc.

 

Monnaie divisionnaire

 

Au fil du temps, la monnaie marchandise s’est métamorphosée en monnaie métallique ou divisionnaire, alors qu’elle a pris la forme de pièces métalliques qui ont été échangées successivement sous forme pesée, comptée et frappée. Jadis, ces pièces étaient fabriquées avec de l’argent, de l’or ou du cuivre, leur poids variant considérablement selon les époques et les émetteurs. Aujourd’hui, elles sont produites à l’aide d’alliages, car leur valeur ne dépend plus de leur poids en métaux précieux.

 

La monnaie divisionnaire désigne l’ensemble des pièces de monnaie émises par une banque centrale. La valeur faciale (ou nominale) d’une pièce, c’est-à-dire celle attribuée conventionnellement par les autorités qui procèdent au frappage, apparaît généralement sur son revers; dans la plupart des cas, elle est supérieure à sa valeur intrinsèque, c’est-à-dire celle des éléments dont elle est constituée.

 

Comme la valeur faciale est fixée par convention, elle peut être annulée de la même manière. Le cas échéant, la pièce n’a plus de valeur légale, mais si elle devient rare, elle peut avoir une valeur numismatique.

 

Monnaie fiduciaire

 

De son côté, la monnaie papier ou fiduciaire est constituée des pièces et des billets de banque valides qui circulent dans un pays donné. Elle comprend aussi les comptes de dépôt et, par le fait même, les chèques qui y sont associés. La valeur de son support (papier ou autre) n’influe nullement sur sa valeur légale garantie par une autorité (ex. : un État, une banque centrale, etc.) et qui repose sur la confiance (du latin fiducia) des utilisateurs. La valeur faciale (ou nominale) de cette monnaie correspond précisément à celle inscrite sur celle-ci.

 

À l’heure actuelle, la plupart des monnaies en circulation dans le monde sont des monnaies fiduciaires. Tout comme les monnaies métalliques, elles ont dans la plupart des cas un cours légal, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent d’aucune façon être refusées en paiement de tout achat ni en règlement de toute dette, sous réserve cependant de certaines limites légales décrétées aux fins de la lutte contre le blanchiment d’argent.

 

Au Canada, la Loi sur la monnaie définit le cours légal comme étant 1) les billets émis par la Banque du Canada selon la Loi, et 2) les pièces émises en vertu de la Loi sur la Monnaie royale canadienne.

 

Les monnaies fiduciaires ont aussi très souvent un cours forcé. Ceci signifie que le papier-monnaie (les billets) ne peut pas être converti en or, comme c’était le cas jadis avec l’étalon-or, alors que la valeur d’une unité monétaire était déterminée par rapport à celle de ce métal précieux. La quantité de monnaie créée était liée au stock d’or détenu par les autorités monétaires qui s’engageaient à acheter et à vendre l’or au prix fixé.

Il importe cependant de retenir que la monnaie fiduciaire fait partie intégrante d’un ensemble, la masse monétaire, qui englobe plusieurs autres instruments de paiement, dont la monnaie électronique qui gagne en popularité.

 

Monnaie scripturale

 

Parallèlement, les soldes des comptes, dont la valeur est connue grâce aux écritures bancaires, ont fait apparaître la monnaie scripturale, un qualificatif créé en 1912 par un économiste belge (Maurice Ansiaux) pour désigner « une monnaie qui passe de compte en compte au lieu de circuler de la main à la main ».

 

Finalement, la monnaie scripturale représente, comme sa désignation l’indique, une « écriture » en compte. Sans existence « matérielle », elle regroupe l’ensemble des dépôts à vue détenus par les agents économiques auprès des institutions financières et circulant par le biais de chèques, de cartes (crédit, débit), de virements, d’effets de commerce (lettres de change, billets à ordre) ou d’avis de prélèvement (automatique) qui ne sont pas en soi des monnaies.

 

De nos jours, un virement ou un prélèvement ne s’accompagne d’aucun transfert matériel de monnaie. Il s’agit simplement de créances déplacées entre des institutions financières par des jeux d’écriture. En pratique, le gros de la masse monétaire est constitué des dépôts auprès de ces dernières, voire des données stockées dans des mémoires d’ordinateurs.

 

Ainsi, au fil des siècles, la monnaie « réelle », sonnante et trébuchante, dont la valeur était liée au poids du métal précieux dont elle était fabriquée, s’est progressivement transformée en monnaie fiduciaire, dont la valeur n’est pas intrinsèque, mais déclarée. Largement répandue dans les économies modernes, elle représente plus de 90 % de la monnaie en circulation.

 

Fonctions de la monnaie

 

Comme mentionné précédemment, la monnaie se définit surtout par ses trois fonctions, à savoir :

 

  • un moyen d’échange en ce sens qu’elle sert d’instrument de base pour régler des échanges commerciaux entre agents économiques;

 

  • une unité de compte, car elle s’avère un moyen uniforme d’exprimer en une unité commune les prix, les revenus, les dettes et les actifs au moment de prendre des décisions de production, de consommation, d’épargne ou d’investissement;

 

  • une réserve de valeur dans la mesure où elle peut être conservée pour utilisation future (ex. : une consommation différée par la constitution d’une épargne), et ce, sans risque de défaillance.

 

Il est possible d’y en ajouter une autre, soit un moyen de paiement universel, immédiat et sans coût.

 

Alors que les fonctions de la monnaie ont été définies durant l’Antiquité, ses formes tendent vers une dématérialisation de plus en plus importante… et préoccupante.

À suivre.

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Quelques faits intéressants

L’argent sonnant et trébuchant

L’expression remonte à une pratique du Moyen-Âge qui consistait à faire sonner les pièces sur une table afin de vérifier leur authenticité, puis à les peser à l’aide d’une petite balance à plateaux appelée trébuchet. Utilisée initialement pour désigner les pièces de monnaie en métal, la formule a été étendue à l’ensemble de l’argent en liquide pour le distinguer des chèques, des cartes de crédit, etc.

 

L’étalon-or (Gold Standard)

Le Royaume-Uni et le Canada ont abandonné ce système lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté, puis l’ont réintroduit en juillet 1926. En janvier 1929, le Canada a cessé de convertir les billets du Dominion en or et mis par le fait même un terme à son adhésion à l’étalon-or. En 1944, la célèbre Conférence de Bretton Woods a été à l’origine de l’instauration d’un système économique centré sur le dollar qui est devenu l’unique monnaie échangeable contre de l’or. C’est à compter de ce moment que le dollar s’est substitué à l’or en tant que monnaie de référence. En 1971, le président des États-Unis a suspendu la possibilité de procéder à cette conversion de sorte que la plupart des monnaies mondiales sont devenues fiduciaires.

Avec l’élimination de l’étalon-or, les institutions émettrices n’étaient plus tenues d’échanger la monnaie fiduciaire contre ce métal précieux et la création de la monnaie ne dépendait donc plus de la possession d’un bien matériel.

 

Même le légendaire Monopoly n’y échappe pas!

La version Monopoly Ultrabanque comprend une unité ultrabancaire qui remplace l’argent de papier et dans laquelle chaque joueur insère sa carte bancaire en début de partie. Cette machine électronique, qui peut influencer le marché, se charge des transactions, numérise par balayage les titres de propriété et calcule la fortune (argent et propriétés) de chaque joueur pour déterminer le gagnant à la fin de la partie, en l’occurrence celui qui est parvenu à mettre ses adversaires en faillite. Lorsqu’un joueur passe la case Go, il n’a plus besoin de réclamer de l’argent : la banque le lui transfère sur sa carte.

 

 

La période hivernale à peine entamée et l’année financière terminée, la saison des régimes enregistrés d’épargne-retraire (REER) se pointe, entamant du coup le compte à rebours de la période de cotisation pour l’année 2019. Ce moment s’avère aussi particulièrement propice pour optimiser le potentiel d’un REER en le combinant à un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) et pour profiter du coup d’une complémentarité dont le potentiel est souvent méconnu, voire sous-estimé. En d’autres mots, une réflexion sérieuse est de mise.

Le REER est perçu comme un régime visant l’accumulation d’un capital-retraite, alors que le CELI est considéré comme un outil d’épargne pour des projets à plus court terme (ex. : des rénovations, des voyages, etc.). Le REER peut cependant servir, lui aussi, à réaliser de tels projets (ex. : l’achat d’une première habitation), et ce, à des conditions fiscalement avantageuses. Puisque le plafond de cotisation au CELI s’apprécie année après année, celui-ci peut également compléter l’épargne-retraite sans impact fiscal, les retraits n’y étant pas imposables.

Ces deux véhicules de placement donnent droit à des avantages fiscaux intéressants. Une cotisation à un REER permet d’obtenir une déduction d’impôt à court terme, mais les retraits sont imposables. Quant au CELI, il n’est pas assorti d’un allègement fiscal à la cotisation, mais il n’y a pas de prélèvement d’impôt au retrait ni sur le capital ni sur le rendement.

Les deux véhicules en revanche offrent l’avantage de garder à l’abri de l’impôt tout revenu de placement généré par vos investissements (intérêts, gains en capital, dividendes).

 

Date limite

Il est possible de contribuer à un REER entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année ou durant les 60 premiers jours de l’année suivante. Les contributions au CELI n’étant pas déductibles d’impôt, il est possible d’y cotiser à n’importe quel moment de l’année.

Le début de 2020 s’avère un temps fort opportun pour amorcer ou planifier des cotisations s’échelonnant sur toute l’année, l’épargne fructifiant plus longtemps à l’abri de l’impôt et le contribuable profitant davantage de la magie des intérêts composés.

 

 

Âge minimal ou maximal

Il n’y a pas d’âge minimal pour cotiser à un REER : dès qu’une personne déclare des revenus admissibles, elle possède des droits de cotisation. Elle peut y cotiser jusqu’au 31 décembre de l’année de ses 71 ans, date limite à laquelle le REER doit être converti en fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) ou en rente. Il est encore possible de cotiser au REER du conjoint si ce dernier est âgé de moins de 72 ans. Quant au CELI, les droits sont accordés annuellement à compter de 18 ans (sous réserve de la possession d’un numéro d’assurance sociale valide), sans égard au revenu, et il n’y a pas d’âge maximal pour y contribuer.

 

Cotisation maximale

La cotisation maximale au REER s’élève à 18 % des revenus admissibles gagnés au cours de l’année précédente, sous réserve d’un plafond annuel de 26 500 $ pour 2019 et de 27 230 $ pour 2020. Le montant maximal est indiqué sur l’avis de cotisation de l’Agence du revenu du Canada (ARC). En ce qui concerne le CELI, le plafond annuel est indexé en fonction de l’inflation. Comme les droits de cotisation ont été majorés d’un montant supplémentaire de 6 000 $ à compter du 1er janvier 2020, le plafond cumulatif, depuis 2009 (année de la création du CELI), s’élève donc à 69 500 $.

Droits de cotisation à un CELI  

Année Montant
2009 à 2012 5 000 $
2013 et 2014 5 500 $
2015 10 000 $
2016 à 2018 5 500 $
2019 et 2020 6 000 $

Dans les deux régimes, les cotisations sont cumulatives en ce sens que celles qui ne sont pas utilisées une année peuvent l’être les années suivantes. Par contre, attention aux cotisations excédentaires, lesquelles entraînent des pénalités coûteuses.

 

Déductibilité des cotisations

Les cotisations à un REER sont déductibles du revenu imposable, mais tout montant retiré du régime s’ajoute au revenu imposable. Celles au CELI ne sont pas déductibles, mais les sommes qui en sont retirées ne sont pas imposables.

 

Retraits

Les montants retirés d’un REER ne donnent pas lieu à de nouveaux droits de cotisation, tandis que les montants des retraits d’un CELI s’ajoutent aux droits de cotisation dès l’année suivante, de sorte qu’il est possible de cotiser de nouveau l’équivalent des montants retirés.

Puisque les montants retirés d’un REER s’ajoutent au revenu imposable, ils sont susceptibles d’impacter sur les droits aux prestations et aux crédits gouvernementaux fondés sur le revenu. Ainsi, les prestations de la Sécurité de la vieillesse (SV), du Supplément de revenu garanti (SRG) et d’assurance-emploi (AE) sont réduites par les revenus gagnés ou les montants retirés du régime. Ceux-ci affectent également l’admissibilité aux crédits fédéraux comme l’Allocation canadienne pour enfants (ACE), l’Allocation canadienne pour les travailleurs (ACT) ou le crédit pour la taxe sur les produits et services et la taxe de vente harmonisée (TPS/TVH).

Il est important de noter que les montants retirés d’un REER donnent lieu à des retenues d’impôt.

Les retraits d’un CELI sont sans conséquence sur l’admissibilité à ces prestations et à ces crédits; ils n’affectent aucunement le droit à ces derniers.

 

Retour dans le régime des sommes retirées

Les sommes retirées d’un REER ne peuvent pas y être retournées à moins qu’elles le soient aux fins d’un régime d’accession à la propriété (RAP) ou d’un régime d’encouragement à l’éducation permanente (REEP). Celles retirées d’un CELI peuvent l’être, mais uniquement l’année suivante.

 

Compte de conjoint

Le REER permet de cotiser à un compte de conjoint; et c’est le cotisant et non le conjoint qui bénéficie de la déduction fiscale. Le CELI ne l’autorise pas, mais il s’avère possible de donner un montant à un conjoint pour qu’il puisse cotiser dans son propre régime.

 

Placements admissibles

À l’exception des fonds de travailleurs qui peuvent être placés uniquement dans un REER (et pas dans un CELI), les deux régimes peuvent recevoir des certificats de placement garanti (CPG), des actions, des obligations, des fonds communs de placement, etc. Quant aux revenus générés par ces placements, ils ne sont pas imposables; par contre, les sommes retirées d’un REER sont assujetties à l’impôt.

 

Garantie de prêt

Il n’est pas possible d’utiliser un REER comme garantie de prêt, mais le CELI peut l’être.

 

Fin du régime

Comme mentionné précédemment, le REER se termine au plus tard le 31 décembre de l’année du 71e anniversaire de naissance de son détenteur qui doit alors en retirer les sommes, les transférer dans un FERR ou acheter une rente. Le CELI prend fin au décès de son détenteur.

 

Impact fiscal du décès du détenteur

Un REER est imposable au décès de son détenteur à moins que celui-ci ne l’ait légué par testament ou autrement à son conjoint survivant, à un enfant mineur ou à un enfant handicapé à charge. Dans le cas d’un CELI, il n’y a pas d’imposition au décès. Si le conjoint en est l’héritier, il peut transférer les sommes accumulées dans son propre CELI sans affecter ses droits de cotisation.

 

Alors, REER ou CELI?

Beaucoup de contribuables se posent cette question à laquelle il n’y a pas de réponse unique, chaque cas étant particulier. Plusieurs facteurs doivent être pris en considération pour formuler une réponse : l’âge, les revenus, les projets à court et à long terme, etc. Une chose est sûre : chacun des régimes comporte ses avantages et ses limites, et aucun n’est meilleur que l’autre.

Pour la plupart des gens, les deux régimes répondent à des objectifs d’épargne différents, et ils peuvent également s’avérer complémentaires. L’épargne CELI peut en effet servir à majorer la mise de fonds pour l’acquisition d’une première habitation, ou encore accroître l’épargne-retraite sans impact fiscal, les retraits n’étant pas imposables.

Comme les deux régimes peuvent contenir les mêmes types de placement, il ne faut pas considérer le CELI comme un compte d’épargne ordinaire dans lequel sont déposées uniquement des liquidités, car on se prive alors de son avantage premier, à savoir l’accumulation d’épargne libre d’impôt.

Avant de prendre une décision, il est préférable de consulter un professionnel afin de déterminer le régime le plus approprié ou encore la répartition la plus judicieuse de l’épargne entre ces deux régimes.  Nos conseillers demeurent à votre service pour vous aiguiller dans vos choix.

Depuis l’année dernière, les pourparlers entourant la négociation d’un nouvel accord commercial entre la Chine et les États-Unis dominent les nouvelles financières.

Deux puissances – deux styles

Au cœur de ces affrontements réside un enjeu crucial : la taille des exportations nettes de biens chinois vers les États-Unis. Alors que le déficit commercial de l’économie américaine par rapport à la Chine se chiffrait à 6 millions de dollars en 1985, il a atteint près de 420 milliards de dollars en 2018 (figure 1). L’origine de ce phénomène s’explique, entre autres, par la disparité entre les habitudes d’épargne des populations des deux géants économiques : tandis que les ménages chinois sont des champions de l’épargne (37 % des revenus nets disponibles), les Américains affichent un taux d’endettement parmi les plus élevés au monde. Par ailleurs, la Chine détient 19 % de la dette étrangère des États-Unis. 

Ce phénomène se reflète de toute évidence dans les échanges commerciaux entre les deux pays. La population américaine continue de consommer à crédit les biens importés de Chine (articles électroniques, vêtements, chaussures, etc.) et contribue par le fait même à accentuer le déficit commercial américain. À l’opposé, la grande capacité d’épargne des Chinois permet de financer le surplus commercial du géant asiatique auprès de l’économie américaine.

FIGURE 1 — Le déficit commercial des États-Unis avec la Chine : 420 milliards de dollars en 2018

 

Importations américaines
en provenance de Chine :
540 milliards de dollars Exportations américaines vers la Chine : 120 milliards de dollars
Principaux produits d’importation Principaux produits d’importation
Téléphones cellulaires : 77 milliards de dollars Produits aérospatiaux : 18 milliards de dollars
Ordinateurs : 60 milliards de dollars Produits chimiques : 16 milliards de dollars
Vêtements et chaussures : 50 milliards de dollars Véhicules automobiles : 6 milliards de dollars

 

Vers un renversement de tendance ?

Cependant, un changement démographique en cours pourrait transformer la nature des échanges commerciaux entre les deux économies et, du même coup, redéfinir la nature du conflit qui les oppose en ce moment : l’émergence économique des millénariaux chinois. Ce terme désigne la tranche de population chinoise née entre les années 1980 et 2000 qui représente aujourd’hui 400 millions de personnes.

Il est important de se rappeler que ce n’est qu’en 1978 que la Chine a entamé une série de réformes visant à réorienter son économie vers celle de marché et à ouvrir ses frontières aux échanges commerciaux internationaux. À cette époque, la Chine se trouvait essentiellement au stade de l’économie de subsistance où les pénuries et famines faisaient partie du quotidien. Ces réformes ont finalement permis au pays de connaître une période de prospérité sans précédent dans son histoire contemporaine.

La génération du millénaire a donc été la première à grandir dans une Chine prospère et présente aujourd’hui des habitudes de consommation drastiquement différentes des générations précédentes. Leur pouvoir d’achat inégalé remet aussi en question l’évolution du surplus commercial du pays dans les prochaines années.

En effet, les jeunes Chinois épargnent une portion beaucoup moins importante que leurs parents. Cette attitude s’explique premièrement par le fait que cette nouvelle génération demeure très optimiste quant à son avenir économique et beaucoup plus confiante quant à la croissance future de ses revenus comparativement aux générations antérieures.

L’exemple d’un jeune Chinois né en 1990 et qui possède aujourd’hui quelques années d’expérience sur le marché du travail permet d’illustrer ce phénomène. À sa naissance, le revenu national net ajusté par habitant s’établissant à 271 $US, le chiffre que la croissance économique du pays a propulsé à 6 568 $US en 2017, ce qui représente une progression de 2 228 % durant cette période. Même si le niveau de richesse en Chine demeure toutefois modeste par rapport aux économies développées, les jeunes Chinois ont grandi dans des conditions relativement prospères comparativement à leurs parents et grands-parents. Pour ces derniers, l’essentiel des dépenses était constitué des biens de première nécessité, et l’accumulation d’un coussin de sécurité représentait l’objectif financier principal.

Le contexte démographique inédit dans lequel se trouvent les millénariaux chinois constitue un second facteur qui les amène à dépenser une part plus importante de leurs revenus. En effet, craignant les dangers de la surpopulation, le gouvernement chinois avait mis en place, au début des années 1970, des politiques de planification familiale rigoureuses qui ont débouché sur le concept de l’enfant unique en 1979. Cette mesure accentuée par l’industrialisation rapide du pays s’est soldée par une diminution fulgurante du nombre de naissances par femme en Chine, passant de 6,4 enfants par femme en 1965 à 1,5 en 2000. Ainsi, les millénariaux chinois viennent des familles peu nombreuses, dont plusieurs sont constituées de quatre grands-parents, de deux parents et d’un seul enfant. Ce phénomène démographique profite aux jeunes qui bénéficient de façon disproportionnée de l’épargne accumulée par leur ascendance. La volonté des parents et des grands-parents d’offrir à leur progéniture tout ce à quoi ils n’avaient pas accès se traduit par la mise à leur disposition des ressources pécuniaires excessives. Leurs dépenses extravagantes financées à même l’épargne des générations précédentes, ainsi que leur penchant pour le luxe leur ont valu le surnom de « petits empereurs » en Chine.

La mondialisation et la balance commerciale

Autrefois isolée et exempte de toute influence étrangère, la Chine ouvre ses frontières économiques à la fin des années 1970. Les millénariaux chinois, dont plus de 90 % des membres possèdent un téléphone intelligent, ont donc grandi dans un monde numérique influencé par la culture occidentale. Fait intéressant : les 15 à 35 ans représentent aujourd’hui deux tiers des détenteurs de passeport en Chine.

Cette ouverture sur le monde se reflète immanquablement dans les choix des jeunes consommateurs : parmi les dix marques préférées de la génération du millénaire, six sont occidentales alors que quatre représentent des plateformes électroniques chinoises (figure 2). Cet appétit croissant pour les produits occidentaux avec une prédilection marquée pour les articles de luxe aura pour effet de stimuler les importations chinoises et finira par peser sur la balance commerciale au fur et à mesure que les jeunes Chinois consolideront leur place dans l’économie du pays.

FIGURE 2 — Les marques préférées des jeunes Chinois

 

1. Apple 6. Zara
2. WeChat 7. Nike
3. Alipay 8. UNIQLO
4. Taobao.com 9. Baidu
5. Adidas 10. H&M
Selon les résultats du sondage de la firme RTG (2017).

L’enjeu du déficit commercial substantiel des États-Unis envers la Chine demeure au cœur du conflit qui oppose actuellement les deux plus grandes économies. Il est cependant primordial de garder à l’esprit que malgré la taille de son économie, la Chine est un pays en pleine évolution, pour lequel l’industrialisation constitue un phénomène relativement récent. L’arrivée à l’âge adulte des millénariaux chinois pourra redéfinir la nature des échanges commerciaux de la Chine avec ses partenaires.