Les définitions de l’intelligence artificielle (IA) sont innombrables, car elle revêt plusieurs sens et englobe des réalités différentes au fur et à mesure de l’accélération technologique. Selon sa plus simple acception, elle réside dans la recherche de moyens susceptibles de doter les systèmes informatiques de capacités intellectuelles comparables à celles des êtres humains.

 

Retour aux sources

Proclamée discipline scientifique à la suite du Dartmouth Summer Research Project on Artificial Intelligence (ou conférence de Dartmouth), en 1956, l’IA fait l’objet d’une multitude de travaux de recherche et d’expérimentation durant les décennies subséquentes. Ils ont presque tous une finalité commune : rendre les machines intelligentes en leur permettant d’imiter les différentes fonctions cognitives de l’être humain (perception, mémoire, raisonnement, apprentissage) ou de reproduire des compétences (organisation, description, traitement de l’information). Autrement dit, agir et réagir de la même façon que lui.

L’histoire de l’IA n’est pas un long fleuve tranquille : elle est marquée par des périodes d’hyperactivité et d’autres de dormance qui fluctuent selon les découvertes et les progrès technologiques, les disponibilités budgétaires ou les dispositions des acteurs financiers et politiques.

À la fin des années 1960 s’amorce une troisième révolution industrielle (informatique). C’est celle de l’électronique, du microprocesseur et des premières technologies de l’information. Au fil des décennies qui suivent, l’augmentation exponentielle de la puissance calculatoire et de la capacité de stockage des ordinateurs, les nombreuses ruptures technologiques ainsi que la naissance du Web concourent à une quatrième révolution (numérique) dont le rythme infernal bouscule les lignes de démarcation entre les disciplines et les secteurs.

Cette révolution provoque une métamorphose de systèmes entiers (production, gestion, gouvernance). Ses vagues technologiques (téléphone intelligent, Web 2.0, 3.0 et 4.0, infonuagique, Internet des objets, etc.) et leurs corollaires, l’hyperconnectivité et l’émergence incessante de fonctions et d’applications (messagerie texto [SMS], signaux GPS, transactions en ligne, etc.), s’avèrent autant de catalyseurs du développement de l’IA.

 

Le rythme s’accélère

La multiplication des données numériques, c’est-à-dire les actions réelles ou virtuelles d’utilisateurs sur Internet, est à ce point phénoménale qu’elles ne se mesurent plus en mégaoctets (106 octets), en gigaoctets (109), en téraoctets (1012), en pétaoctets (1015) ni même en exaoctets (1018), mais en zettaoctets (1021 octets).

Chaque seconde, 29 000 gigaoctets (Go) d’informations sont produits dans le monde, soit 912,5 exaoctets (Eo) par an. Nous générons maintenant autant d’informations en deux jours que l’humanité depuis son origine jusqu’au début du XXIe siècle. Ce n’est rien, car le volume de ces données, qui double tous les 18 mois, explosera d’ici 2020, alors que l’humanité devrait en produire 40 zettaoctets (40 Zo) par an. Des spécialistes estiment que la taille de l’univers numérique devrait doubler tous les deux ans.

Le rapport publié en 2015 par le Club informatique des grandes entreprises françaises (CIGREF) signalait que l’humanité produisait alors toutes les minutes 350 000 tweets, 15 millions de SMS et 200 millions de courriels, et que 1,01 milliard d’objets étaient connectés sur la planète, un nombre insignifiant en regard de celui de près de 100 milliards estimés en 2020. De plus, 90 % des données existantes en 2016 avaient été produites au cours des deux années précédentes.

Structurées ou non (c’est-à-dire représentées ou stockées sans format prédéfini), les données champignonnent. Les non structurées (celles émanant de textes, photos, vidéos, médias sociaux, téléphones intelligents, relevés de transactions électroniques, systèmes de localisation GPS, signaux de technologies médicales, etc.) enregistrent une croissance annuelle de 80 %.

En plus de rendre obsolètes les outils classiques de recherche et d’extraction de données, l’explosion de ces quantités produites en temps réel et en continu oblitère ceux, traditionnels, de gestion de bases de données. La valeur inestimable de ces informations stockées dans des gisements ou puits (wealths of data) ou dans des entrepôts de données (data warehouses) précipite, au début des années 1990, l’exploration (ou fouille, forage, prospection) de données (data mining). Cette technique de recherche et d’analyse permet, à l’aide d’algorithmes sophistiqués, de déceler des tendances, de faire des corrélations, de détecter des informations stratégiques, de développer un savoir ou d’accroître des connaissances. C’est au cours de cette décennie qu’apparaît le terme de « métadonnées » (metadata), c’est-à-dire des données sur les données.

 

Les données : l’or noir des temps modernes

La disponibilité de quantités astronomiques de données produites par les nouvelles technologies met en évidence l’inutilité de les posséder et de les emmagasiner à défaut de disposer d’un moyen adéquat et performant pour les analyser. L’écosystème technologique des mégadonnées (big data), permettant de les transférer, de les stocker et de les manipuler massivement, se révèle vite indispensable pour l’IA qui a un besoin insatiable de données pour alimenter des algorithmes de plus en plus pointus basés sur les apprentissages profond (deep learning) et automatique (machine learning). Dans ce dernier cas, les ordinateurs apprennent par eux-mêmes en développant des connaissances et des aptitudes nouvelles et en améliorant leur efficacité à partir des résultats obtenus lors d’opérations précédentes.

Les données ne représentent pas qu’une valeur stratégique. Le Boston Consulting Group a déjà évalué à 315 milliards de dollars (315 G$) la valeur marchande annuelle des données personnelles laissées gratuitement par les internautes européens et estime qu’elle devrait atteindre mille milliards de dollars (1 000 G$) l’an prochain.

Les géants du Web que sont les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) ont compris l’importance primordiale du cercle vertueux que constitue la convergence de l’IA (l’arme) et des mégadonnées (les munitions). Ils s’emploient donc à créer de plus en plus de services qui génèrent eux-mêmes de plus en plus de données et gagnent par le fait même en intelligence.

Les secteurs de l’assurance, des banques et des finances emboîtent le pas, conscients des bénéfices tangibles que constituent la création continue de valeur, des processus améliorés ainsi qu’une compétitivité et une agilité accrues. Aussi accélèrent-ils leurs efforts de recherche et développement en technologie financière (fintech) aux fins d’une utilisation optimale des technologies numériques les plus évoluées et les plus contemporaines.

Les développements de l’IA dans le secteur financier mettent l’accent sur l’augmentation de la productivité, la réduction des coûts, la minimisation des risques, la prévention de la fraude et l’expérience client, de même que sur l’analyse comportementale des investisseurs et de mégadonnées dans le but d’améliorer, par exemple, les stratégies de placement.

 

L’IA et la gestion de portefeuille

Il est vrai qu’un algorithme d’IA peut intégrer une quantité titanesque d’informations plus rapidement que l’humain, mais il n’en demeure pas moins que l’IA ne constitue pas un outil prévisionnel des marchés financiers et encore moins de gestion de portefeuille pour les investisseurs ayant un horizon de placement à long terme. Pourquoi ? Parce que les modèles ne résistent pas à des événements de marché extraordinaires et difficilement prévisibles comme les crises financières ou les dévaluations monétaires. Et parce que l’intelligence émotionnelle est proprement humaine. Quant au risque lié au portefeuille, le grand nombre de balises existant encore pour le limiter confirme l’incapacité des algorithmes à cet égard et l’immaturité technologique de l’IA en matière de gestion.

Une bonne diversification et un rééquilibrage efficace demeurent les éléments clés d’un portefeuille performant à long terme. Une bonne connaissance des entreprises et un bon jugement seront toujours préférables aux décisions basées principalement sur des rendements passés.

Un expert de l’IA de renommée internationale, M. Yoshua Bengio, déclarait récemment que le plus intelligent des ordinateurs possède à peine la même intelligence qu’une grenouille ou un chat à qui l’on aurait passé sa vie à apprendre une seule chose. Il rappelait que la recherche ne reproduit que de toutes petites parties de tout ce que le cerveau peut accomplir (La Presse +, 23 juin 2019). L’humain n’est donc pas près de créer une IA égale ou supérieure à la sienne, et l’IA n’est pas près de remplacer l’humain.

Dans le domaine financier, il existe un fossé énorme entre le battage médiatique autour de l’IA et la réalité. Il faut donc éviter le piège de croire que l’IA est plus sophistiquée qu’elle ne l’est vraiment. Les progrès notables de l’IA ne doivent pas faire oublier l’importance d’une approche pragmatique en la matière qui consiste à s’ouvrir aux innovations technologiques en faisant preuve de rationalité, de jugement et de vigilance. C’est encore et toujours le plus sûr.

Avec une espérance de vie qui ne cesse de s’allonger, vos enfants pourraient recevoir votre héritage à l’âge de la retraite. En donnant de votre vivant, vous pourriez donc leur offrir un sacré coup de pouce pour poursuivre leurs études, acheter une maison ou une voiture, ou encore financer un projet qui leur tient à cœur.

Beaucoup de mythes circulent au sujet de ce que l’on peut ou non donner à nos enfants avant notre mort. Pourtant, au Canada, il n’y a pas d’impôt sur les dons ni sur les successions. Les autorités fiscales considèrent toutefois que le don d’un bien constitue une disposition présumée soumise, pour la personne qui donne, aux mêmes impôts que si le bien avait été vendu.

Don d’un immeuble

Lorsqu’une personne vend sa résidence principale et qu’elle n’a désigné aucun autre immeuble à ce titre pendant toutes les années où elle était propriétaire, la vente profitera d’une exonération sur le gain en capital et le vendeur ne subira aucune répercussion fiscale.

Dans le cas d’une donation d’une résidence secondaire, le donateur sera considéré l’avoir vendue à sa valeur marchande aux fins fiscales. Un impôt sera donc calculé sur la moitié de l’augmentation, soit entre la valeur du bien lors de la donation et le coût d’acquisition.

La notion de résidence principale ne se limite toutefois pas à la maison où vous résidez habituellement. Votre résidence secondaire pourrait donc se qualifier de résidence principale.

Prenons le cas d’un médecin qui décide de donner le chalet familial d’une valeur de 250 000 $ à son enfant. Comme il l’a payé 150 000 $ lors de l’achat, le donateur devra inclure la moitié du gain en capital (100 000 $) qu’il a réalisé dans sa déclaration de revenus pour l’année du don, soit 50 000 $. En supposant un taux d’imposition de 50 %, le médecin devra donc payer 25 000 $ d’impôts. Le récipiendaire du don n’écopera quant à lui d’aucune imposition. De même, lorsque cet enfant vendra le chalet, son coût d’acquisition aux fins du calcul du gain en capital qu’il pourrait alors réaliser s’élèvera à 250 000 $, soit la JVM du bien lors du don.

Les problématiques associées au transfert de biens du vivant par des parents en faveur de leurs enfants surviennent principalement lorsque les parents ne souhaitent pas faire un vrai don, mais plutôt avantager un enfant en lui transférant un bien à un « prix de faveur ».

Reprenons l’exemple du médecin qui veut transférer, toujours à son enfant, le chalet familial d’une valeur de 250 000 $. Supposons cette fois-ci qu’il reste un solde d’hypothèque impayé sur le chalet d’un montant de 100 000 $ et que le médecin veut « vendre » la propriété à son enfant, à condition que ce dernier en assume le solde. Dans ce cas, les règles fiscales créeront une surimposition.

Les conséquences pour le médecin demeureront alors les mêmes que précédemment, soit payer 25 000 $ d’impôts. Du côté de l’enfant, le coût d’acquisition du chalet s’élèvera à 100 000 $, soit le solde de l’hypothèque, et non 250 000 $. Ainsi, si ce dernier devait revendre le chalet à un tiers dans la même année, il pourrait lui aussi réaliser un gain en capital calculé sur la différence entre le prix de vente du chalet à sa JVM (250 000 $) et son coût d’acquisition (100 000 $). Il inclura alors la moitié de son gain en capital (75 000 $) dans sa déclaration de revenus. En supposant un taux d’imposition de 40 %, l’enfant payera un impôt de 30 000 $ (soit 40 % de 75 000 $).

La donation d’un bien qui ne génère pas de plus-value, comme la donation d’une somme d’argent, n’entraîne pas d’imposition sur le gain en capital.

Don à des enfants mineurs

L’autre bête noire des autorités fiscales réside dans les transferts de biens ayant pour objectif le fractionnement de revenus générés par le bien transféré. Même s’il n’existe aucune limite à la valeur des biens que l’on peut transférer à nos enfants, le fisc refusera de reconnaître les effets de certains transferts de biens effectués dans le seul but de réduire les revenus du parent et d’augmenter ceux des enfants.

Les transactions les plus durement pénalisées demeurent les transferts de biens à des enfants mineurs, ainsi que les prêts sans intérêt ou à faible taux d’intérêt consentis aux enfants mineurs et majeurs.

Le principe est simple. Supposons qu’une professionnelle gagne des revenus d’emploi de plus de 150 000 $ et a accumulé des placements garantis d’une valeur de 500 000 $. Les revenus d’intérêts générés par ses placements s’ajoutent annuellement à ses revenus d’emploi de sorte qu’ils sont taxés à un taux d’imposition d’environ 50 %. Elle souhaite donner 250 000 $ à chacun de ses deux enfants mineurs qui ne gagnent aucun autre revenu, de façon à ce que les revenus d’intérêts générés par ce capital soient imposés dans leurs déclarations de revenus. En tant que tutrice, elle conserverait la gestion de ces sommes et elle pourrait utiliser les revenus après impôts pour acquitter les dépenses d’éducation, d’entretien et de loisir des enfants. Hélas, les autorités fiscales ne verront pas cette transaction du même œil et c’est plutôt la mère qui continuera d’être imposée sur les revenus produits par le capital donné aux enfants. C’est ce que les lois fiscales appellent les « règles d’attribution », qui ont pour but d’empêcher le transfert du fardeau fiscal à un enfant mineur.

Heureusement, il existe des façons tout à fait légales de fractionner certains revenus avec des enfants, même mineurs. Cette règle d’attribution ne s’applique pas au gain sur capital généré par des biens donnés à l’enfant mineur ou majeur (par exemple, certaines actions ou certains fonds communs de placement) ou encore lorsque le parent ouvre un régime enregistré d’épargne-études au bénéfice de l’enfant.

Concernant les dons de valeurs supérieures à 25 000 $, les lois en vigueur au Québec imposent d’importantes obligations aux deux parents de l’enfant mineur.

Don à des enfants majeurs

Vous pourriez aussi avoir envie de donner un coup de main financier à vos enfants majeurs lorsqu’ils quittent le nid familial, ou encore s’ils projettent d’acheter une propriété. Dans ce cas, sachez que les dons en argent n’entraînent aucune incidence fiscale s’ils ne sont pas utilisés pour générer un revenu, comme l’achat d’une résidence dans le but d’y vivre et non à des fins locatives.

Si vous devez vendre des actions ou des unités de fonds communs de placement en vue de rassembler les liquidités nécessaires pour faire le don, attendez-vous à être imposé sur le gain en capital qui en découlera. Ce concept s’applique toutefois quand ces placements sont détenus à titre personnel, et non dans un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou un compte d’épargne libre d’impôt (CELI).

C’est le même principe quand vous faites un don d’actions ou de fonds communs de placement à votre enfant (qu’il soit mineur ou majeur), pour la simple et bonne raison que vous serez réputé en avoir disposé à leur juste valeur marchande, comme si c’était une vente.

Prêt d’argent aux enfants

Il existe d’autres façons d’avantager ses enfants, par exemple avec un prêt sans intérêt ou à un faible taux d’intérêt, sans terme et sans modalités précises de remboursement.

Dans certains cas, il peut y avoir des incidences fiscales pénalisantes comme les règles d’attribution à l’égard des placements des enfants, dépendamment si l’enfant est mineur ou majeur.

Si le prêteur perçoit des intérêts, ceux-ci doivent être déclarés au fisc puisqu’ils demeurent imposables. Ils ne sont toutefois pas déductibles par l’enfant, sauf si la somme prêtée est utilisée pour générer des revenus.

Dans le cas où l’on souhaiterait faire un prêt à l’un de ses enfants, il est fortement recommandé de consigner la transaction par écrit pour éviter les malentendus et se protéger en cas de conflit, de décès, d’insolvabilité, de séparation ou de divorce. On y établira notamment les modalités de remboursement dans certains cas bien précis.

Conclusion

Avant d’effectuer un don ou de consentir un prêt à l’un de vos enfants de votre vivant, vous devriez, entre autres, tenir compte de votre état matrimonial et de celui de votre enfant, et surtout des incidences juridiques en cas de décès ou d’insolvabilité.

Par ailleurs, pour éviter de léser les enfants qui n’ont pas été avantagés, il convient d’ajouter une clause à votre testament qui entraînera un rééquilibrage avant que votre patrimoine ne soit divisé.

N’hésitez donc pas à consulter un professionnel pour prendre une décision éclairée.

Les stéréotypes sont tenaces et les préjugés ont la vie dure : par exemple, la prudence excessive dont feraient preuve les femmes en matière de placements ou encore la défiance que leur inspirerait le risque. Ce genre de généralisation est malheureuse parce qu’elle renforce un vieux cliché, celui du manque de confiance des femmes quant à leurs compétences face à la complexité des produits financiers ou encore d’une posture à considérer leur avoir sous l’angle de la sécurité plutôt que des possibilités.

Il y a indéniablement des gens qui font preuve de prudence et qui sont réticents à prendre des risques lorsqu’il s’agit d’investir ou de gérer leur argent. Cette réalité n’est pas exclusive aux femmes. C’est précisément pour cette raison qu’en matière de placements, le profil d’investisseur, la tolérance au risque et l’horizon de placement figurent parmi les éléments essentiels pour bien connaître une personne et l’aider à déterminer les types de placements qui pourraient lui convenir le mieux, compte tenu de ses objectifs.

Perpétuer des poncifs sur les rapports des femmes avec l’argent, c’est aussi faire fi d’une réalité indéniable, celle du parcours parsemé d’écueils que doivent emprunter nombre d’entre elles vers la retraite, car ce sont elles qui arrêtent le plus souvent de travailler au cours de leur vie active.

Une égalité difficile à atteindre

Outre la maternité et l’éducation des enfants, le rôle d’aidantes naturelles, par exemple, les place très majoritairement (75 %) au sein de la « génération sandwich », celle des adultes de 45 à 64 ans qui se sentent pris en étau entre, d’une part, les exigences des soins à prodiguer aux enfants et, d’autre part, à des parents ou à des personnes apparentées (beaux-parents, autres membres de la famille, etc.), vieillissantes ou malades.

Merrill Lynch et Age Wave évaluent qu’aux États-Unis, en moyenne, l’écart cumulatif entre les revenus des femmes (se retirant du marché du travail pour des raisons familiales) et des hommes (continuant leur carrière) se chiffre à 1 055 000 $US (figure).

FIGURE  Revenu cumulatif de retraite

Il ne faut pas oublier non plus les disparités qui persistent sur le plan de la rémunération en dépit de l’amélioration de la situation économique et des conditions de vie des femmes au cours des dernières décennies. Il est vrai que nous sommes loin du milieu des années 1960, alors qu’elles ne pouvaient pas conclure de contrats, gérer leurs propres biens, ni posséder un compte de banque. Certes, les mentalités ont changé au cours des 55 dernières années et les choses évoluent très rapidement, mais il y a encore beaucoup de distance à parcourir sur la longue route vers l’égalité.

À cet égard, il convient de rappeler ici l’article Gender equality. Who is minding the gap? paru sous la plume de Travia Grant dans l’édition du Globe and Mail qui signalait que l’économie canadienne réaliserait des gains annuels de 105 milliards de dollars si les femmes parvenaient à combler tout leur retard sur les hommes en matière de rémunération et de participation au marché du travail.

Malheureusement, le Portrait des Québécoises 2018 du Conseil du statut de la femme confirme que les femmes ont beau être plus nombreuses à aller à l’université, elles gagnent toujours en moyenne un salaire inférieur à celui des hommes lorsqu’elles en sortent, quel que soit leur niveau d’études. En 2017, 57,4 % des personnes qui détenaient un baccalauréat et 56,5 % de celles qui possédaient une maîtrise étaient des femmes, et elles gagnaient en moyenne moins de 90 % du salaire de leurs homologues masculins.

De fait, les arrêts qui surviennent au cours de la vie active des femmes ont pour conséquence de mettre en veilleuse la progression de leur carrière et d’affecter directement leur capacité à épargner. Leurs cotisations au régime des rentes du Québec (RRQ) ou à un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) étant moindres, la période au cours de laquelle elles peuvent accumuler de la richesse pour se constituer un capital-retraite est généralement plus courte que celle des hommes.

Alors qu’une épargne insuffisante ou une retraite mal planifiée amplifient le risque d’épuiser rapidement les économies et de se retrouver en précarité financière, l’espérance de vie des femmes est supérieure à celle des hommes. Non seulement leur retraite risque-t-elle d’être plus longue, mais elles vivent en moyenne sept (7) ans de plus que leurs conjoints.

L‘augmentation de l‘espérance de vie a pour corollaire des défis financiers majeurs dont il faut impérativement tenir compte, en particulier en ce qui concerne la retraite. En clair, les femmes qui épargnent moins et moins longtemps doivent consacrer un pourcentage plus élevé de leur rémunération pour atteindre le même niveau d’épargne que les hommes.

Une affaire de personnalité, pas de sexe

Si personne ne nie qu’il y existe une multitude de façons d’aborder les finances personnelles ou d’investir, les résultats préliminaires d’une récente étude de Comptables professionnels agréés du Canada tendent à démontrer que le sexe revêt beaucoup moins d’importance que la personnalité en matière de littératie et de capacités financières.

Ainsi, les hommes et les femmes manifestent un comportement très semblable dans les aspects relatifs au suivi de l’argent et à la planification financière lorsque les autres caractéristiques sont prises en considération (âge, revenu, niveau de scolarité et traits de personnalité).

Le tempérament de la personne semble jouer un rôle plus important dès qu’il s’agit de choisir des produits financiers ou de subir un test de connaissances financières objectives.

Aussi bien pour les femmes que pour les hommes, le problème ne réside pas tant dans la prudence, le profil d’investisseur, la tolérance au risque ou l’horizon de placement, mais plutôt dans l’absence de planification et de considération de ces éléments de même que dans l’inutilisation des stratégies et des outils existants pour maximiser l’épargne-retraite.

Le meilleur moyen de maximiser le rendement de son patrimoine, c’est encore de se connaître soi-même, de miser sur ses forces et de travailler sur ses lacunes.

Épargner le plus tôt possible dans la vie active, en particulier en versant un montant mensuel fixe dans un REER par exemple, demeure toujours la règle d’or. C’est ce qu’on appelle la magie de l’intérêt composé qui consiste à investir et à laisser travailler ses économies afin de pouvoir récolter de l’intérêt sur les intérêts.

Dans le respect de son profil d’investisseur et de son seuil de tolérance au risque, il faut examiner avec un conseiller les produits susceptibles de générer les rendements les plus intéressants en regard des objectifs fixés. Un plan d’épargne et une diversification du portefeuille s’avèrent aussi des incontournables.

Par-dessus tout, le plus important consiste encore à se renseigner pour avoir une bonne compréhension de ses décisions financières. Autrement dit, éviter de déléguer systématiquement à quelqu’un d’autre les questions d’argent et se familiariser avec les notions financières de base.

C’est d’autant plus important que la plupart de nos projets de vie (accession à la propriété, éducation postsecondaire, retraite et autres) se basent sur le bon choix de véhicules de placement, de produits d’investissement et d’assurance. Savoir tirer profit de ces outils permet de réaliser ses objectifs plus rapidement et à moindre coût.

Le plus récent UBS Investor Watch, intitulé Votre patrimoine est entre vos mains, aborde l’implication des femmes du monde entier dans leurs finances. Il en ressort que celles qui participent aux décisions financières à long terme augmentent leurs chances d’assurer leur sécurité financière et sont plus optimistes face à l’avenir. De fait, ce sont elles qui ont sans doute le mieux saisi l’à-propos de cette remarque judicieuse du philosophe Maurice Blondel : « L’avenir ne se prévoit pas, il se prépare ».

À la suite du vif succès qu’a remporté, en mars dernier, la conférence sur le modèle scandinave auprès de vos collègues, nous publions ici son résumé et vous invitons à visionner le contenu au complet sur le portail en ligne CyberStudio.

 

Le  « miracle » suédois

Depuis quelques années, on observe un retour en vogue du modèle scandinave. En effet, la Suède, le Danemark et la Finlande caracolent en tête de très nombreux indicateurs internationaux de performance économique et sociale. La réussite de la Suède est si impressionnante que le World Economic Forum, qui organise annuellement le forum de Davos en Suisse, a publié en 2018 une analyse intitulée « Pourquoi la Suède surpasse-t-elle tous les autres pays dans à peu près tous les domaines? ».

La Suède, comme généralement tous les autres pays nordiques, se classe en effet parmi les meilleurs au monde dans de nombreux domaines. Avec Stockholm comme centre de gravité du miracle technologique scandinave, la Suède se trouve au sommet des palmarès en matière de climat pour les affaires, l’innovation et la technologie.

La Suède se classe première au monde pour sa capacité à créer des marques de commerce mondiales, comme IKEA, H&M, Electrolux, Ericsson ou Spotify. Champions dans le domaine numérique, les Suédois apprennent la programmation dès le primaire et sont parmi les plus grands utilisateurs de paiements électroniques. Il est même proposé d’éliminer, d’ici quelques années, la circulation des billets.

Au-delà de la performance économique, il y a aussi la performance sociale. La Suède compte parmi les meilleurs pays au monde pour la place des femmes, des enfants et des aînées dans la société. Les politiques familiales suédoises, qui ont beaucoup inspiré le Québec, et l’éducation de qualité font en sorte que le taux d’emploi des femmes demeure parmi les plus élevés au monde.

La population bénéficie d’un système de retraite et des soins aux personnes âgées de très grande qualité. Leur système de santé se classe 6e mondialement selon le Legatum Institute. Le pays détient la palme en matière de lutte contre le changement climatique et de  protection de l’environnement.

 

De la crise à la prospérité

Dans les années 1990, les pays scandinaves étaient plongés dans une crise profonde. Comment avaient-ils réussi à se réinventer pour se propulser à nouveau au sommet des classements internationaux?

En 2019, les pays scandinaves forment un groupe d’économies dont le PIB par habitant dépasse considérablement la moyenne de l’OCDE. Leur taux d’emploi, c’est-à-dire le pourcentage de personnes âgées de 16 à 65 ans qui occupent un emploi, se situe, une fois de plus, parmi les plus élevés des pays de l’OCDE. Leur productivité par heure travaillée est supérieure à celle du Canada, du Québec, de la France, mais aussi des États-Unis ou de la Grande-Bretagne. Étonnamment, ils sont plus ouverts à la mondialisation que les États-Unis ou le Canada vu le volume de leurs exportations et importations par rapport à la taille de leur économie.

Les pays scandinaves possèdent d’excellentes cotes de crédit auprès des agences de notation qui évaluent la situation budgétaire des gouvernements. Toutes proportions gardées, leur dette publique est presque deux fois inférieure à celle des États-Unis ou du Canada. Finalement, les inégalités sociales dans les pays scandinaves sont moins prononcées qu’aux États-Unis, au Canada ou au Québec, ils affichent aussi des taux de pauvreté plus bas, entre autres, chez les aînées et les jeunes.

Le rebond du modèle scandinave ne cesse d’étonner, car il y a 25 ans la majorité des analystes pensaient que ces pays peineraient à confronter la mondialisation et la croissance de la compétition mondiale en raison de leurs très forts taux de taxation, leurs dépenses sociales élevées, leur taux de syndicalisation (qui oscille autour de 70 % actuellement en Suède, au Danemark et en Finlande), sans parler des politiques d’égalité entre les hommes et les femmes et leurs normes environnementales élevées.

 

L’éducation au cœur des préoccupations

Pour certains l’explication de la réussite passe par l’éducation. Les pays scandinaves ont-ils plus de diplômés universitaires que le Québec? Dans les faits, non. Le taux de diplomation universitaire de la population active (personnes âgées de 25 à 64 ans) demeure très similaire : 25 % au Danemark, 23 % en Suède et de 20  % en Finlande contre 23 % au Québec.

Selon les résultats des tests PISA de l’OCDE, une grande enquête menée tous les trois ans auprès des jeunes de 15 ans, le Québec surclasse la Suède et le Danemark pour se comparer au pays devenu la référence mondiale en la matière : la Finlande.

Le Québec livre une performance enviable en mathématiques où il devance même la Suède, le Danemark et la Finlande; il excelle en lecture où il n’est dépassé que par la Finlande. On observe toutefois un fort déclin en sciences depuis 2000. En effet, alors que le Québec était au 3e rang mondial en 2000, il se classe 24e en 2013. La Finlande pour sa part est passée de la 2e à la 5e position pendant la même période (tableau). À noter que nous avons exclu les chiffres de 2016, car les écoles publiques québécoises ont décidé de boycotter l’exercice, ce qui a rendu les résultats du Québec encore meilleurs. Ce faisant, elles ont fait la démonstration de l’excellence des écoles privées…

 

TABLEAU : Résultats des tests PISA de l’OCDE

2000
2003
2006
2009
2013
Mathématiques
Québec
2
6
5
5
8
Finlande
4
2
2
6
12
Suède
15
17
21
26
38
Danemark
12
15
15
19
22
Lecture
Québec
2
4
5
6
13
Finlande
1
1
2
3
6
Suède
9
8
11
19
36
Danemark
16
19
19
23
23
Sciences
Québec
3
11
6
10
24
Finlande
2
1
1
2
5
Suède
10
15
24
29
34
Danemark
22
31
22
26
27

 

L’imposition

Est-ce qu’une part de la différence pourrait également s’expliquer par la fiscalité? Comme on s’en doute, les pays scandinaves taxent beaucoup, plus que la moyenne des pays de l’OCDE, plus que la moyenne des pays du G7, plus que les États-Unis, le Canda ou le Québec. Seule la France a un taux de pression fiscale (46,2 %) supérieur au Danemark (46 %); il est de 44 % en Suède, de 43,3 % en Finlande contre 37,3% au Québec, 33 % au Canada et 27,1 % aux États-Unis.

Il est difficile cependant de parler de « fiscalité scandinave » tant les différences entre les pays sont importantes. En matière d’impôt sur le revenu, le Danemark est le pays de l’OCDE qui impose le plus ses citoyens. Le Québec se classe deuxième, devant la Suède et la Finlande.

Lorsqu’on compare les taxes sur les biens et services (comme la TPS et la TVQ), les pays scandinaves taxent plus que le Québec (en moyenne 25 % contre moins de 15 % au Québec).

Finalement, la part de l’impôt des sociétés dans les prélèvements totaux s’élève à 14,1 % au Québec, alors qu’il est de 17,4 % en Suède et de seulement 6,3 % au Danemark et en Finlande.

 

L’innovation et la recherche

Le domaine dans lequel le Québec accuse du retard par rapport aux pays scandinaves est bien celui de l’innovation, de la recherche et du développement. Classé pourtant 5e au monde en 2016 pour l’investissement en recherche et développement, le Québec fait globalement mieux que le Canada et dépasse la moyenne des pays de l’OCDE. Il est devancé par le Japon, l’Allemagne, mais également la Suède. Sur une longue période, le Québec se place généralement derrière les pays scandinaves.

La provenance de cet investissement diverge pourtant : l’investissement privé en recherche et développement représente 60 % au Québec ; ce taux est de 70 % en Finlande et de 74 % en Suède. En clair, le Québec dépend plus des fonds publics dans ce secteur que les pays scandinaves.

Portés sur l’innovation, les pays scandinaves déposent plus de brevets triadiques par habitant que le Québec, le Canada, les États-Unis, l’Allemagne ou la France. Ce terme désigne un ensemble de brevets déposés en même temps dans plusieurs offices de brevets (souvent l’Union européenne, le Japon et les États-Unis) pour protéger une invention à fort potentiel de mise en marché. Sur ce plan, le Québec pourrait manifestement tirer des leçons.

Les médecins, comme de plus en plus de Canadiens, devront compter principalement sur leurs propres économies pour générer des revenus à la retraite. Même si le Régime de rentes du Québec (RRQ) se trouve grandement amélioré, à partir du 1er janvier 2019, et que le gouvernement fédéral a renoncé à repousser de 65 à 67 ans l’âge d’admissibilité à la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV), ces bonnes nouvelles ne suffisent pas pour assurer la retraite des médecins.

Un grand éventail d’options d’épargne s’offre aux particuliers : régime enregistré d’épargne-retraite (REER), compte d’épargne libre d’impôt (CELI), régime de retraite individuel (RRI), placement non enregistré ou dans une société par actions (SPA), immobilier, etc. Le choix et la combinaison optimale de ces outils dépendent de plusieurs facteurs (niveau de revenu, situation familiale, incorporation, etc.), notamment de la durée de financement de la retraite.

Espérance de vie

Bien qu’essentielle à toute planification de retraite, l’espérance de vie demeure une donnée statistique qui a ses limites une fois appliquée à une situation particulière. En effet, elle correspond au moment auquel la moitié (50 %) des membres d’un groupe homogène (en termes d’âge atteint et de genre) seront décédés. Par exemple, si l’espérance de vie d’une femme de 60 ans est de 92 ans, cela signifie que la moitié des femmes âgées de 60 ans aujourd’hui seront décédées à cet âge ou avant.

Notons que l’espérance de vie à 60 ans dépasse celle à la naissance (ce qui peut paraître paradoxal). Cela est dû au fait que le particulier de 60 ans a déjà survécu jusqu’à cet âge. Statistiquement, à mesure que l’on vieillit, l’âge de décès présumé tend à s’éloigner.

Durée raisonnable de décaissement

Lors de la planification de la retraite, utiliser l’espérance de vie comme date cible d’épuisement des actifs représente un risque important. Rappelons-nous que, statistiquement, 50 % des particuliers devraient dépasser cet âge. Or, si 50 % des personnes survivaient à leur capital, cela signifierait qu’une planification de retraite tablant sur l’espérance de vie pour épuiser le capital risque de ne pas tenir la route une fois sur deux. Il s’agit ici du risque de survie, c’est-à-dire le fait de survivre à son capital.

Une pratique prudente et reconnue consiste donc à ajouter quelques années à l’espérance de vie du particulier dans les projections de retraite. Appelée « durée raisonnable de décaissement », cette donnée représente l’âge auquel 75 % (plutôt que 50 %) des membres d’un groupe homogène ne seront plus en vie. Une planification de retraite basée sur la durée raisonnable de décaissement plutôt que sur l’espérance de vie a trois chances sur quatre de fonctionner. Le tableau suivant présente la différence entre l’espérance de vie et la durée raisonnable de décaissement selon les normes de projection de revenu de l’Institut québécois de planification financière (IQPF) (tableau).

TABLEAU : Espérance de vie et durée raisonnable de décaissement selon l’âge atteint

Âge atteint Espérance de vie (ans) Durée raisonnable de décaissement (ans)
Homme Femme Homme Femme
40 ans 89 92 94 97
60 ans 89 92 94 97
80 ans 90 93 95 98

Source : www.iqpf.org

À titre d’exemple, même si l’espérance de vie d’un homme de 60 ans constitue 89 ans, l’épuisement de son capital de retraite devrait toutefois être planifié au moins jusqu’à 94 ans. Dans le même ordre d’idées, une femme de 60 ans devrait baser ses projections de retraite sur l’âge de 97 ans (durée raisonnable de décaissement) plutôt que 92 ans (espérance de vie). Enfin, ce tableau relève qu’en matière de longévité, il subsiste encore un écart entre les hommes et les femmes, bien que ce dernier se soit amenuisé au fil des ans.

Toutefois, la conséquence directe d’utiliser une durée de décaissement plus longue consiste à se contenter d’un revenu plus faible durant toute cette période. Cette prudence a donc un coût. Le particulier devra composer avec deux risques :

  • d’une part, miser le décaissement des actifs sur l’espérance de vie, toucher un revenu plus élevé et donc prendre le risque de survivre à son capital et de passer les dernières années de sa vie dans la pauvreté; ou
  • d’autre part, faire ses projections en se basant sur la durée raisonnable de décaissement, toucher un revenu plus faible et donc risquer de laisser des actifs substantiels à son décès. Notons par ailleurs que plus le particulier compte sur ses propres actifs financiers pour assurer son revenu à la retraite, plus il s’expose au risque de survie. À l’inverse, plus sa retraite sera financée par des sources récurrentes (ex. : RREGOP, revenus locatifs ou rente viagère), moindre sera son exposition au risque de survie.

Essentiellement, il s’agit de choisir entre le risque de vivre pauvre (si on dépasse l’espérance de vie) ou de mourir riche (si on décède avant la durée raisonnable de décaissement). La seconde option semble moins grave.

Risque de survie

L’exemple ci-après nous vient d’Europe. En France, il existe le concept de vente en viager. Il s’agit d’une transaction par laquelle un particulier, habituellement âgé, vend sa résidence et reçoit de l’acquéreur, en contrepartie, un revenu viager (c’est-à-dire jusqu’à sa mort). Le vendeur conserve toutefois le droit d’habiter sa résidence tant qu’il vit. L’acheteur paie le bien sous la forme d’une rente versée au vendeur tant que ce dernier est vivant.

Voici l’histoire de Jeanne Calment née en France le 21 février 1875. En 1965, âgée de 90 ans et n’ayant aucun héritier, elle décide de vendre son appartement en viager à son notaire, Me André-François Raffray. Ce dernier, alors âgé de 47 ans, accepta de lui verser 2 500 francs par mois tant qu’elle vivra après quoi l’appartement lui appartiendrait. Il versa les paiements prévus au contrat durant trente ans jusqu’à sa propre mort en 1995. Il avait alors 77 ans. Son épouse continua les paiements jusqu’à la mort de Jeanne Calment, survenue le 4 août 1997 (à l’âge de 122 ans). Les parties ont assurément établi le montant du paiement (2 500 francs par mois) sur l’espérance de vie d’une femme de 90 ans, c’est-à-dire qu’il lui restait moins de 10 ans à vivre. La suite de l’histoire nous montre que ce fut une grave erreur pour le notaire, Madame Calment ayant grandement bénéficié de cette entente.

Madame Calment était devenue la doyenne des Français le 20 juin 1986, puis la doyenne de l’humanité le 11 janvier 1988, titre qu’elle conservera plus de 9 ans, au grand dam, on présume, de la famille Raffray. On la considère aujourd’hui comme l’être humain ayant vécu le plus longtemps parmi tous ceux dont la date de naissance est prouvée. On notera que l’histoire de Madame Calment a fait les manchettes récemment, certains mettant en doute qu’elle ait vraiment vécu si longtemps.

Cette histoire démontre qu’il est possible de déjouer les statistiques et qu’en planification financière individuelle, la prudence est de mise, car toute erreur peut s’avérer lourde de conséquences. En effet, un régime de retraite ou une compagnie d’assurance vie se basera notamment sur l’espérance de vie pour établir la valeur d’une série de paiements. Si une telle entité avait conclu une entente avec Madame Calment, la perte substantielle découlant de ce contrat aurait été épongée par des milliers d’autres rentiers. En raison de la loi des grands nombres, leur risque est très contrôlé et une telle histoire aurait été au pire anecdotique pour eux, ou, au mieux, une opportunité de marketing. Pour les Raffray, cette décision a peut-être eu des conséquences désastreuses sur les finances familiales.

En conclusion

Si l’espérance de vie est une donnée statistique extrêmement importante pour les régimes de retraite et les assurances vie, il demeure risqué de l’utiliser pour la planification de retraite des particuliers. Ainsi, quand vient le temps de faire vos projections de retraite et d’établir le moment d’épuisement de vos actifs, pensez plutôt en termes de durée raisonnable de décaissement même au risque de pécher par excès de prudence.

Depuis octobre 2018, la République française, dont la devise est « liberté, égalité, fraternité », est plongée dans une crise sociale dont la forme, l’ampleur, la virulence et la durée déstabilisent la classe politique. Aux yeux de certains, ce soulèvement sape même les fondements de la démocratie représentative en raison d’une forte rancœur envers les gouvernants.

Origine du mouvement

Dépeinte entre autres comme la « révolte des oubliés » et la « poudrière du ras-le-bol fiscal », la « crise des gilets jaunes » émane d’une fronde contre une hausse, programmée par le gouvernement Macron, des taxes sur les carburants, et plus particulièrement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Il est d’ores et déjà acquis que les remous hebdomadaires des foules, qui ont cours depuis octobre 2018, seront lourds de conséquences. En effet, l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et la Banque de France évaluent respectivement le coût de la « crise des gilets jaunes » à 0,1 et à 0,2 point de produit intérieur brut (PIB).

Hétéroclite et spontané, ce soulèvement populaire s’est propagé comme une traînée de poudre et est vite devenu une mobilisation citoyenne sans précédent contre les conditions de vie qui stagnent et un pouvoir d’achat qui s’érode. Ensuite, elle s’est métamorphosée en exutoire pour une masse d’« exclus » qui condamnent notamment la pauvreté, l’inégalité du partage de la richesse, l’augmentation exponentielle de la rémunération des dirigeants, le capitalisme, la mondialisation et l’immigration massive, sans oublier l’indifférence, l’arrogance et la condescendance des « élites » économiques, financières, patronales, syndicales et, surtout, politiques. Au comble de l’exaspération et hors de contrôle, la société civile pourfend les inégalités et la fracture sociale qui s’approfondit.

Alors que nos médias diffusent des images de concitoyens et concitoyennes qui ont décidé de revêtir des gilets jaunes eux aussi, on peut se demander si l’embrasement français est susceptible de se propager de ce côté-ci de l’Atlantique. Sur la seule base de la fiscalité, il est permis d’en douter, car la situation du Québec et celle de l’Hexagone diffèrent considérablement. À cet égard, le taux de pression fiscale, c’est-à-dire la part de la richesse nationale accaparée par la fiscalité, est un outil de comparaison fort utile.

Fardeau fiscal et inégalités

Dans son tout récent Bilan de la fiscalité au Québec – Édition 2019, la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques (CFFP) de l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke note que, parmi 38 pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ce taux variait en 2017 de 16,2 % au Mexique à 46,2 % en France où sévit un taux de chômage de 9,2 %. Au Québec, où le taux de chômage est légèrement supérieur à 5 %, le poids de la fiscalité représentait 37,3 % du PIB (tableau I).

TABLEAU I : taux de pression fiscale en pourcentage du PIB 2017

 

1. France 46,2 19. Pologne 33,9
2. Danemark 46,0 20. Espagne 33,7
3. Belgique 44,6 21. Royaume-Uni 33,3
4. Suède 44,0 22. Canada 33,0
5. Finlande 43,3 23. Estonie 33,0
6. Italie 42,4 24. République slovaque 32,9
7. Autriche 41,8 25. Israël 32,7
8. Grèce 39,4 26. Nouvelle-Zélande 32,0
9. Pays-Bas 38,8 27. Japon (2016) 30,6
10. Luxembourg 38,7 28. Lettonie 30,4
11. Norvège 38,2 29. Lituanie 29,8
12. Hongrie 37,7 30. Suisse 28,5
13. Islande 37,7 31. Australie (2016) 27,8
14. Allemagne 37,5 32. États-Unis 27,1
15. Québec 37,3 33. Corée 26,9
16. Slovénie 36,0 34. Turquie 24,9
Moyenne du G7 35,7 35. Irlande 22,8
17. République tchèque 34,9 36. Chili 20,2
18. Portugal 34,7 37. Mexique 16,2
Moyenne de l’OCDE 34,2

Source : OCDE (2018)

Même si le poids de la fiscalité au Québec est supérieur à la moyenne du Canada (33 %), de l’OCDE (34,2 %) et des pays du G7 (35,7 %), il diminue depuis 2016.

Autre outil d’évaluation intéressant, le coefficient de Gini mesure l’inégalité des revenus dans un pays. Plus il se rapproche de 0, plus les revenus sont égalitaires; plus il se rapproche de 1, plus les revenus sont inégalitaires

L’analyse de la CFFP indique qu’avec un coefficient de Gini de 0,284, le Québec se classe au 11e rang parmi 38 pays observés et qu’il est en bien meilleure position que des pays comme le Mexique (0,459), les États-Unis (0,391) et même la France (0,295) (tableau II).

TABLEAU II : Coefficient de Gini sur le revenu disponible

1. Islande 0,246 21. Luxembourg 0,306
2. Slovénie 0,250 Moyenne de l’OCDE 0,317
3. République slovaque 0,251 Moyenne du G7 0,328
4. République tchèque 0,258 22. Estonie 0,330
5. Finlande 0,259 23. Japon 0,330
6. Danemark 0,263 24. Italie 0,333
7. Belgique 0,268 25. Portugal 0,336
8. Norvège 0,272 26. Australie 0,337
9. Autriche 0,276 27. Grèce 0,340
10. Suède 0,282 28. Espagne 0,345
11. Québec 0,284 29. Israël 0,346
12. Pays-Bas 0,285 30. Lettonie 0,347
13. Hongrie 0,288 31. Nouvelle-Zélande 0,349
14. Pologne 0,292 32. Royaume-Uni 0,351
15. Allemagne 0,293 33. Lituanie 0,372
16. France 0,295 34. États-Unis 0,391
17. Corée 0,295 35. Turquie 0,404
18. Suisse 0,296 36. Chili 0,454
19. Irlande 0,297 37. Mexique 0,459
20. Canada 0,306

Source : OCDE (2018)

Force est de constater que le Québec (0,284) est l’une des sociétés les moins inégalitaires au monde. En regard de la situation qui prévaut au Canada dans son ensemble, les inégalités y sont plus faibles au Québec depuis 1976.

De plus, la CFFP rappelle qu’en 2015, 70 % des impôts sur le revenu au Québec ont été payés par 20 % des contribuables les plus riches qui ont obtenu plus de la moitié des revenus totaux.

Bien que la réalité du Québec diffère de celle de la France sur plusieurs plans, il ne faut pas perdre de vue que l’imposition excessive fragilise le système démocratique en poussant les citoyens à remettre en question la légitimité du gouvernement.

Quand la « classe moyenne » acquiert lentement mais sûrement la conviction que « le système » enrichit un groupe de plus en plus restreint d’individus au détriment de la masse, les éléments d’une tempête parfaite se mettent en place progressivement. Sans compter l’effet ravageur de statistiques comme celles du plus récent document d’information d’Oxfam (Services publics ou fortunes privées?) sur les inégalités dans le monde. En effet, ici comme partout ailleurs sur la planète, les citoyens et citoyennes ont pris acte du fait que les fortunes de milliardaires ont augmenté de 2,5 milliards de dollars par jour en 2018 et que vingt-six personnes possédaient autant de richesses que la moitié la plus pauvre de l’humanité.

Dans un contexte de stagnation des revenus moyens, la croissance infinie de ceux du « 1 % » exacerbe la montée des inégalités et provoque un ressentiment social qui débouche sur une perte relative de légitimité des institutions, tout en s’avérant un terreau fertile pour les solutions simplistes du populisme.

Conclusion

À l’instar de nombreuses autres sociétés occidentales, la nôtre n’est pas totalement à l’abri de ce genre de poussées contestatrices déclenchées par des étincelles a priori anodines, mais que l’actuel climat délétère de désabusement et de cynisme généralisés rend carrément détonantes.

Puisque les inégalités s’avèrent généralement des catalyseurs de déflagrations sociales, les données susmentionnées peuvent raisonnablement inciter à penser que le Québec est à l’abri d’une crise similaire à celle des gilets jaunes. Ce serait toutefois une erreur grave que de ne pas y déceler un voyant rouge.

À plus forte raison lorsque le Fonds monétaire international (FMI) prend la peine de rappeler, comme il l’a fait avant l’ouverture du tout récent Forum économique mondial à Davos, la nécessité, pour l’élite économique mondiale et les dirigeants politiques, de répondre rapidement au mécontentement populaire que nourrissent des inégalités toujours plus criantes telles que révélées par des économistes de renom comme Thomas Piketty, et des institutions crédibles comme Oxfam et la Banque mondiale.

Parce qu’ils sont souvent porteurs de revendications multiples et hétéroclites, voire contradictoires, les mouvements de masse comme celui des gilets jaunes sont perçus par certains comme la révolte d’une classe moyenne qui ne sait pas vraiment ce qu’elle veut. Une chose est sûre cependant : cette classe sait ce qu’elle ne veut pas et, surtout, ce dont elle ne veut plus.

Le débat sur le mode de rémunération optimal pour le médecin incorporé semble éternel. Devrait-on se verser un salaire, un dividende ou une combinaison des deux? Dans le dernier cas, quelle est la répartition idéale? Les règles changent constamment et, puisque cette décision peut être revue annuellement, la question revient souvent.

Pour une seule année, l’analyse de l’avantage d’un ou de l’autre mode de rémunération est relativement simple à effectuer : fréquemment, le versement de dividende s’avère plus profitable. Toutefois, si l’on souhaite examiner la situation dans un contexte plus large, incluant notamment des considérations de retraite, la démarche devient plus complexe.

Il faudra alors évaluer la pertinence de cotiser au régime de rentes du Québec (RRQ), au régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou à tout autre régime de retraite. Se concentrer strictement sur l’aspect fiscal ne suffira pas pour parvenir à une conclusion valable. Cet article traite surtout de l’intérêt de cotiser (on non) au RRQ.

Commençons par un simple rappel des préalables pour le versement de salaire ou de dividende.

Salaire

Le versement de salaire est conditionnel à ce que des services soient réellement rendus à la société par actions (SPA). Précisons également que cette rémunération doit aussi être justifiable, c’est-à-dire en lien avec ce que le marché paierait pour le travail fourni. Cette restriction implique qu’on ne peut pas rémunérer son enfant à raison de 100 000 $ par année pour nettoyer les locaux de la SPA ou encore de le payer, à partir de la SPA, pour couper le gazon ou ranger sa chambre.

De plus, le salaire constitue une dépense déductible pour la SPA; cette dernière n’est donc pas imposée sur ces sommes. Le versement de salaire entraîne en revanche l’acquittement de charges sociales au niveau de la SPA (RRQ, Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), Fonds des services de santé (FSS)) et au niveau personnel (RRQ, RQAP). Le revenu touché sous forme de salaire est imposé à un taux relativement élevé (maximum de 53,305 % en 2019 pour les hauts salariés).

Dividende

Contrairement au salaire, le paiement de dividende ne nécessite pas que des services soient rendus à la SPA. Si la SPA déclare un dividende à une classe d’actions, il est versé aux détenteurs d’actions de cette classe. Toutefois, la réforme fiscale pilotée par le ministre Morneau en 2017 a énormément diminué l’avantage de verser des dividendes à des tiers (conjoint ou enfants).

Le dividende ne constitue pas une dépense déductible pour la SPA; cette dernière sera imposée sur ces sommes. Toutefois, aucune charge sociale ne sera imputée à la SPA même si l’actionnaire devra tout de même débourser une cotisation au FSS. Le dividende est imposé moins lourdement que le salaire (maximum de 46,247 %[1] en 2019 par rapport à 43,939 % au début de 2018). Il ne suffit pas de comparer simplement le taux maximal d’imposition du dividende (46,247 %) à celui du salaire (53,305 %), car le dividende versé à l’actionnaire a été, en premier lieu, imposé au niveau de la SPA, ce qui n’est pas le cas du salaire.

Analyse des éléments à caractère retraite

Au-delà de la charge fiscale, il faut considérer d’autres éléments en lien avec la retraite, à savoir la participation au RRQ et l’octroi de droits REER. Dans la mesure où le salaire dépasse l’exemption annuelle de 3 500 $, son versement implique le paiement des cotisations au RRQ tant par la SPA que par le médecin. Or, ces dernières ne constituent pas une dépense comme telle, mais plutôt une forme d’épargne forcée, souvent lucrative d’ailleurs (à l’exception de la situation où le médecin a déjà accumulé la rente de retraite maximale du RRQ).

Valeur du RRQ

Avant de quantifier la valeur de ce régime, il sera important de qualifier celui-ci. Le RRQ est essentiellement un régime de retraite à prestations déterminées. Sa prestation maximale s’élève à 13 855 $ à 65 ans en 2019 (sans tenir compte de la bonification annoncée en 2017); et elle est versée sous forme viagère. De plus, le régime offre des prestations en cas d’invalidité et au moment du décès (prestation forfaitaire, rente aux enfants mineurs et rente au conjoint survivant).

Les préoccupations concernant la pérennité du régime ont fait couler beaucoup d’encre, surtout dans les années suivant la débandade boursière de 2008-2009. Si les évaluations actuarielles du régime ont effectivement causé souci, force est d’admettre que les ajustements apportés entre 2012 et 2016, notamment l’augmentation du taux de cotisation (pour l’employeur et l’employé) et des pénalités en cas de retraite anticipée, l’ont grandement stabilisé. Le régime est actuellement en très bonne santé financière.

Maintenant, comment quantifier la valeur du RRQ? Il s’agit de comparer le coût des cotisations à verser tant par la SPA que par le particulier et les prestations à recevoir. Sans tenir compte de la bonification du régime annoncée en 2017, prenons un exemple d’un médecin incorporé âgé de 60 ans qui a cotisé le maximum au RRQ au cours des 35 dernières années. Il prévoit prendre sa retraite à 65 ans et demander sa prestation du RRQ à ce moment. Son relevé de participation au RRQ fait état des montants mensuels suivants payables à 65 ans :

  • Montant actuel :             1 012 $
  • Montant projeté :           1 155 $

On peut donc conclure que le fait de cotiser au RRQ durant les cinq prochaines années permettra au médecin d’accumuler une rente supplémentaire de 143 $ par mois (différence entre 1 012 $ et 1 155 $), soit 1 716 $ annuellement. Notons que le montant de cette rente supplémentaire est présenté en dollars de 2019, la rente supplémentaire versée en 2024 sera effectivement plus élevée. Rappelons que les prestations seront également indexées. La conclusion découlant de cette analyse pourrait être différente si, par exemple, le médecin était en mauvaise santé ou s’il avait déjà cotisé au régime les sommes nécessaires pour recevoir la rente maximale.

En utilisant des hypothèses de calcul[2], on peut estimer que cette rente supplémentaire vaut aujourd’hui 34 800 $. On peut donc conclure que le fait de cotiser durant la prochaine année au RRQ permet d’accumuler une valeur approximative de 6 960 $ (20 % du montant de 34 800 $ accumulé en cinq ans). Pour la prochaine année, les cotisations maximales au RRQ représenteront un déboursé de 2 991 $[3] pour la SPA et un même montant pour le particulier. Sans considérer les éléments de fiscalité, un total de 5 982 $ aura été versé au régime et aura permis d’acquérir une rente annuelle supplémentaire d’une valeur estimée de 6 960 $. La décision de cotiser au régime s’avère donc profitable.

Le montant actuel représente, en dollars d’aujourd’hui, la rente payable à 65 ans si aucune autre cotisation n’est effectuée au RRQ (si le médecin décidait de se verser exclusivement des dividendes d’ici ses 65 ans). Le montant projeté constitue, en dollars d’aujourd’hui, la rente payable à 65 ans si on continuait de cotiser au régime jusqu’à 65 ans (si le médecin décidait de se verser annuellement des salaires dépassant le salaire cotisable au RRQ d’ici ses 65 ans).

Conclusion

Nous avons présenté ici un élément de réflexion, parmi tant d’autres à considérer, quant au choix annuel du mode de rémunération. La décision de se payer à salaire ou à dividende influence les aspects liés à la retraite du médecin. N’hésitez donc pas à consulter des professionnels pour prendre des décisions éclairées pouvant avoir des conséquences importantes à court et à long terme.

[1]  Il s’agit d’un taux d’imposition de dividendes ordinaires (essentiellement ceux provenant de sa propre SPA). Les dividendes déterminés, notamment ceux reçus de grandes corporations, sont imposés à un taux plus faible (maximum de 39,998 % en 2019).

[2] Âge au décès : 90 ans, rendement annuel : 3,5 %, inflation annuelle : 2 %, croissance future des salaires : 3 %.

[3] Aux fins de l’illustration, nous n’incluons pas la bonification au RRQ annoncée en 2017, mais utilisons le taux de cotisation supplémentaire découlant de cette dernière.

Une des principales nomenclatures sectorielles utilisées dans le monde de la finance, la classification GICS (Global Industry Classification Standard) a récemment subi une refonte majeure. Qu’en est-il maintenant et quelles en sont les raisons?

Changement historique

En septembre dernier, plus de 3 000 milliards de dollars de capitalisation boursière en Amérique du Nord ont changé de secteur à la suite de la révision des normes GICS. Ce remaniement, le plus important depuis la création du système de classification en 1999, altère considérablement la composition des secteurs des télécommunications, des technologies de l’information et de la consommation discrétionnaire.

Plus précisément, plusieurs entreprises auparavant attitrées aux technologies de l’information et à la consommation discrétionnaire fusionneront avec le secteur des télécommunications. Ce transfert révolutionnera la structure du secteur, composé autrefois en majorité de câblodistributeurs, tels que Bell, Rogers et Telus. Pour refléter ces modifications profondes, le secteur sera rebaptisé « services de communication ».

Les répercussions de cette révision demeurent relativement limitées au Canada. Les titres touchés par ces changements sont constitués d’entreprises qui opèrent dans le secteur médiatique, comme Quebecor, Shaw Communications ainsi que Cogeco Communications, et qui relevaient jusqu’à récemment de la consommation discrétionnaire.

L’impact se fera plutôt sentir du côté américain où plusieurs géants des technologies de l’information, tels que Facebook et Alphabet (société mère de Google), sont passés au secteur des services de communication. L’exclusion de ces joueurs du secteur des technologies de l’information permettra de recentrer ce dernier sur des entreprises dont le cœur des activités repose sur la production de biens et services informatiques, comme Apple, Microsoft, Oracle et Intel.

 

Principaux titres touchés par la refonte des GICS

 

Pays Entreprise Nouveau secteur Ancien secteur
Capitalisation boursière
(en milliards de dollars)
Canada Quebecor Services de communication Consommation discrétionnaire
6,1
Canada Shaw Communications Services de communication Consommation discrétionnaire
12,3
Canada Cogeco Communications Services de communication Consommation discrétionnaire
3,2
États-Unis Alphabet (Google) Services de communication Technologies de l’information
739,0
États-Unis Facebook Services de communication Technologies de l’information
432,2
États-Unis Netflix Services de communication Consommation discrétionnaire
137,0
États-Unis Disney Services de communication Consommation discrétionnaire
172,0

 

La croissance exponentielle des entreprises technologiques au cours de la dernière décennie a forcé cette refonte sectorielle au sein de l’indice phare américain. Les compagnies relevant des technologies de l’information représentaient 26 % du S&P 500 à l’aube du remaniement alors que ce segment ne pesait que 15,9 % de l’indice en 2007. Correspondant à 1,8 % de l’indice avant la réforme, le secteur des télécommunications, devenu « services de communications », compose dorénavant 10,4 % du S&P 500.

La refonte de la classification GICS
Changement dans les secteurs de l’indice S&P 500

 

 

Répercussions

Ce remaniement altérera le côté défensif des titres du secteur des services de communication américain. Dominé par les entreprises de télécommunications aux opérations stables dans des industries consolidées, ce secteur a traditionnellement été perçu par plusieurs investisseurs comme une alternative viable au marché obligataire étant donné sa faible volatilité et le haut rendement en dividende des titres qui le composaient.

La révision du mois de septembre a perturbé le caractère stable et homogène des titres du secteur dans le marché américain. Dorénavant, les titres d’Alphabet et de Facebook, qui représentent aujourd’hui 23 % et 17 % respectivement, dominent le secteur des services de communications. Ces entreprises pour qui la croissance est cruciale évoluent dans des industries en pleine transformation et ne versent aucun dividende.

Alors que la progression moyenne des ventes des entreprises de télécommunications du S&P 500 s’est établie à 3,1 %[i] au cours des trois dernières années, celle des entreprises du nouveau secteur de communication a atteint 20,4 %. L’effet inverse s’observe dans le domaine des technologies de l’information où les ventes ont diminué de 11,9 % à 7,5 % à la suite de la refonte.

Le profil de croissance différent des nouvelles entreprises de communication se traduit de façon tout aussi marquée dans le rendement en dividende des titres du secteur. Le nouveau secteur des services de communication offre un rendement de 1,07 % alors que celui des entreprises plus matures de services de télécommunications se chiffrait à plus de 5 %.

La mondialisation du nouveau secteur des services de communication constitue un autre élément marquant du remodelage des GICS. Les câblodistributeurs, noyau du secteur avant le remaniement, exerçaient leurs activités principalement au niveau local, seulement 3 % du chiffre d’affaires de ces entreprises étant réalisé à l’international. Dans le nouveau secteur des services de communication, cet indicateur est passé à 32 %.

Il s’avère donc important pour l’investisseur de prendre en compte la nouvelle composition du secteur lors de l’analyse de son portefeuille. Il n’est aujourd’hui plus adéquat de considérer l’allocation de son portefeuille au secteur des communications comme des actifs stables et défensifs qui réagiront bien lors d’un repli boursier. Un examen plus granulaire est requis afin de déterminer le type de titres détenus, leur volatilité ainsi que leur exposition au climat économique, aux risques technologiques et de devises.

Raisons du remaniement

Au-delà des répercussions sur les différents indices boursiers, il est intéressant d’examiner les motivations à l’origine de ce remaniement sectoriel majeur.

Au cours des deux dernières décennies, de jeunes pousses de la Silicon Valley se sont immiscées dans notre façon de communiquer et de nous divertir. Alliant le savoir-faire technologique à l’innovation, elles se sont fait une place prépondérante dans plusieurs industries, dominées autrefois par des entreprises aux activités plus traditionnelles.

Ce phénomène s’observe dans plusieurs marchés concurrentiels. La progression du commerce en ligne permet à Amazon de représenter la menace la plus importante à Walmart qui semblait auparavant immunisé contre toute forme de compétition. L’industrie du transport partout dans le monde subit aujourd’hui les effets de la plateforme électronique d’Uber. La popularité sans cesse grandissante du service en ligne de Netflix remet en question la mainmise des studios de cinéma et des chaînes de télévision traditionnelles sur le contenu de divertissement.

Peu de secteurs semblent être à l’abri des bouleversements provoqués par l’arrivée de ces entreprises avant-gardistes et de leurs nouvelles façons de faire.

De nombreux joueurs importants des secteurs traditionnels réagissent à cette menace en investissant massivement en recherche et développement, et plusieurs compagnies dominantes identifient le besoin d’innovation comme un enjeu majeur. La frontière entre le secteur technologique et les autres domaines continuera ainsi de s’estomper au cours des prochaines années.

[i] Source : FactSet en date du 31 mai 2018

 

« La connaissance des êtres, l’étude de leur comportement est le commencement de la sagesse. »
– Madeleine Ferron

Homo œconomicus

C’est une représentation abstraite de l’être humain qui sert à faciliter l’élaboration de modèles en économie. La notion a été conçue par les théoriciens dits « néoclassiques » pour qui l’économie est constituée de données chiffrées, de variables et, par le fait même, mathématisable. En plus de développer des outils mathématiques, comme des courbes d’offre et de demande, ces penseurs ont élaboré le concept d’équilibre entre plusieurs variables.

L’équilibre général, par exemple, réfère à une économie stable dépourvue de chômage, où l’offre égale la demande sur tous les marchés, et où chaque individu maximise sa satisfaction en fonction des contraintes. Conséquemment, chaque variation de celles-ci se traduit par un ajustement permettant au système économique de recouvrer l’équilibre.

Aux yeux des « utilitaristes », l’Homo œconomicus est un être parfaitement rationnel qui calcule son intérêt afin d’optimiser sa satisfaction économique sur le marché avec un minimum d’efforts et de moyens. Efficace et dénué de passion, cet individu cartésien ordonne ses préférences et évalue les avantages et les inconvénients de ses choix économiques (par exemple, produire, acheter ou vendre). Il se trouve au cœur de la conception théorique (paradigme) dominante sur laquelle se construit l’économie telle que nous la connaissons depuis des décennies.

Selon ce modèle, comme les ressources sont disponibles en quantités restreintes, il faut les employer de façon à en tirer la satisfaction la plus élevée possible et, par le fait même, considérer leur utilité. L’Homo œconomicus se sert donc de son intelligence pour faire des échanges librement consentis et motivés uniquement par son propre intérêt ou par son profit personnel.

Vraiment rationnel ?

Au fil des décennies, des réflexions et des travaux d’autres penseurs ont démontré que le choix rationnel n’est pas forcément celui ayant la plus forte probabilité de gain et que la rationalité humaine est tributaire de la capacité de l’individu de traiter les informations en un temps limité. L’humain étant ce qu’il est, ses habitudes influencent, voire dictent son comportement devant des choix complexes. Ses décisions ne représentent pas tant l’expression de « meilleurs choix » à des moments privilégiés que les résultats d’une suite d’événements.

Ces remises en question, voire ces critiques de l’Homo œconomicus ont mis à mal la théorie de l’utilité et ouvert la voie à l’économie dite « comportementale » (behavioral economics).

Le prix Nobel d’économie décerné en 2017 a couronné les travaux de Richard Thaler, « le pape de l’économie comportementale » qui s’intéresse aux biais du cerveau humain. Selon lui, on peut corriger les failles des mécanismes du raisonnement humain en changeant l’architecture des choix devant lesquels les gens sont placés.

Dans un article intitulé « Pour en finir avec l’Homo œconomicus », paru dans l’édition du 21 octobre 2017 du journal Le Devoir, le chroniqueur Éric Desrosiers, rapportait une expérience fascinante réalisée par Thaler pour améliorer le taux d’épargne-retraite de travailleurs américains.

Puisque peu de gens peuvent s’imposer une discipline d’épargne, il a proposé d’inscrire d’emblée tous les employés aux prélèvements automatiques en leur laissant le droit d’y mettre fin. De plus, comme les gens acceptent plus facilement une hausse salariale moindre qu’une baisse de revenu, il a aussi offert de diriger une portion des futures augmentations de salaire vers l’épargne-retraite. L’expérience a permis de passer d’une majorité d’employés qui n’épargnaient pas pour leur retraite à 90 % de travailleurs qui ne réclamaient pas l’arrêt des prélèvements automatiques.

Si, en moins de quatre ans, les employés consentants ont presque quadruplé la part de leur salaire consacré à l’épargne-retraite, c’est parce que le régime a bénéficié d’une structure facilitant l’acquisition des comportements souhaités.

Ces résultats donnent en quelque sorte raison à une note d’information produite dans le cadre d’un projet de recherche sur les politiques du gouvernement du Canada qui avançait que la compréhension du comportement individuel est essentielle pour les personnes chargées d’élaborer la réglementation et les politiques, car elle permet de mettre en place des politiques efficaces.

Finance comportementale

S’il s’est avéré possible d’appliquer la psychologie à l’économie, il en a été de même pour la finance afin d’expliquer les habitudes des investisseurs ou des anomalies du marché boursier (par exemple, les bulles spéculatives ou les krachs).

Depuis une cinquantaine d’années maintenant, la théorie financière s’est élaborée sur la rationalité des individus et l’efficience des marchés : totalement réfléchis et cohérents, les investisseurs comprennent les données et les renseignements, et agissent en conséquence.

Ce concept a été bousculé, lui aussi, par la démonstration que l’Homo œconomicus investisseur demeure « sous influence » et que ses décisions financières restent loin d’être totalement rationnelles. Ses choix dépendent d’incitations monétaires, certes, mais son jugement se trouve faussé par des biais, en particulier dans un contexte d’incertitude. Non seulement ne traite-t-il pas l’information de manière cartésienne, mais il apprécie différemment les gains et les pertes. En fait, il base ses décisions sur des probabilités de gains plutôt que sur des éventualités de pertes, même lorsqu’il en tire des résultats économiques identiques. En d’autres mots, les pertes ont un impact psychologique plus important qu’une quantité équivalente de bénéfices. Ainsi, le fait de perdre 1 000 $ ne pourra être compensé qu’en gagnant 2 000 $ ou 3 000 $. C’est ce qui explique l’effet de disposition, une anomalie observée couramment chez les investisseurs.

 

QUELQUES EXEMPLES DE BIAIS

 

Biais cognitifs
  • Conclure, décider ou agir sur la foi d’éléments incomplets, non pertinents ou hâtifs.
  • S’en tenir aux informations les plus faciles à collecter.
  • Simplifier abusivement les problèmes.
  • Sélectionner les informations qui confirment des croyances.
  • Céder à la tentation du court terme.
  • Refuser de reconnaître une mauvaise décision et d’en accepter les répercussions.
  • Négliger de conserver une vue d’ensemble en attribuant différentes fonctions à chaque catégorie d’éléments d’actif (comptabilité mentale).
Biais émotionnels
  • Faire preuve d’excès de confiance en son jugement et en ses capacités.
  • Faire preuve de sentimentalisme dans la sélection d’éléments d’actif.
  • Ignorer les mauvaises nouvelles et écarter les informations désagréables.
Biais sociaux
  • Adopter des comportements grégaires et suivre les autres sans discernement (bulles spéculatives).
  • Croire à un consensus inexistant tout en se convaincant que les autres ont des avis identiques.
Attitudes face au risque
  • Retarder irrationnellement une décision ou un choix (peur du risque).
  • Ressentir les pertes plus durement que les gains (aversion aux pertes).
  • Privilégier les options qui minimisent les déceptions (aversion au regret).
  • Conserver trop longtemps des positions perdantes (et donc assumer un niveau de risque élevé) et se départir trop rapidement de titres gagnants (effet de disposition).

 

C’est en s’employant à évaluer les comportements des manieurs d’argent, individuels ou professionnels, et à déterminer s’ils agissent ou non de façon rationnelle que la finance comportementale en est venue à conclure à l’existence de plusieurs biais et d’attitudes complexes face au risque.

Conclusion

Les praticiens des marchés s’intéressent de plus en plus à la finance comportementale, car elle permet de tenir compte de la dimension psychologique des cycles de marché, d’analyser le comportement des individus, de reconnaître les situations à risque et de mettre en place des stratégies visant à limiter les répercussions des biais.

L’histoire démontre que chaque crise économique ou financière (le krach d’octobre 1987, la bulle technologique, la bulle technologique, etc.) donne raison à l’économie comportementale. Il faut sans doute y voir un rappel essentiel d’une réalité implacable, à savoir que derrière l’argent, il y a – et il y aura toujours – les gens.

En 2009, le gouvernement fédéral a adopté une série de mesures destinées à relancer le taux d’épargne des Canadiens, et à contrer les effets de la crise économique qui sévissait. L’ancien ministre des Finances du Canada a donc mis en place un ambitieux programme de réduction des taxes et des impôts dans le but d’établir un « avantage fiscal canadien ». Comme le principal objectif de Jim Flaherty était d’inciter les familles de la classe moyenne à se constituer un coussin d’urgence et un complément d’épargne pour la retraite, il a concrétisé une idée qui circulait depuis quelque temps déjà, à savoir la création d’une alternative au régime enregistré d’épargne-retraite (REER).

L’avènement du compte d’épargne libre d’impôt (CELI) s’est avéré aussi marquant que celui du REER, en 1957, dont il est en quelque sorte l’antithèse.

La cotisation

En ce qui concerne l’âge minimal pour cotiser, le REER ne prévoit aucune restriction, tandis que le CELI exige que le cotisant ait au moins 18 ans. Par contre, le CELI ne fixe pas d’âge maximal, alors que le REER établit une limite, soit l’année du 71e anniversaire de naissance.

Quant au droit de cotisation au CELI, il n’est aucunement lié aux revenus gagnés et est reportable indéfiniment. En pratique, il correspond à la portion inutilisée du montant maximal permis annuellement qui s’accumule depuis 2009; dans le cas du REER, il s’agit de la portion inutilisée du montant maximal déductible annuellement qui s’accumule depuis 1999.

La cotisation annuelle maximale au CELI a varié depuis sa création : elle a été de 5 000 $ de 2009 à 2012, de 5 500 $ en 2013 et 2014, de 10 000$ en 2015 et de 5 500 $ depuis 2016 (ce montant est révisé annuellement). En pratique, ceci signifie qu’un particulier qui avait au moins 18 ans en 2009 et qui n’a pas cotisé un seul dollar au CELI depuis lors, détient des droits de cotisation totalisant 57 500 $. Quant à la cotisation annuelle maximale au REER, elle représente un pourcentage (18 %) du revenu gagné l’année précédente, et ce, jusqu’à concurrence d’un montant préétabli (26 010 $ en 2017 et 26 230 $ en 2018).

Si une cotisation excédentaire au CELI est impossible, le REER la permet : le premier prévoit une pénalité de 1 % par mois dès le premier dollar cotisé en excédent, tandis que le second tolère un dépassement maximal de 2 000 $.

La cotisation au CELI du conjoint n’est pas non plus possible, quoiqu’il soit permis de lui donner ou de lui prêter une somme pour qu’il cotise à son propre CELI (à condition qu’il possède des droits de cotisation), et ce, sans assujettissement aux règles d’attribution aux fins de l’impôt. Dans le cas du REER, l’individu qui verse la cotisation peut la déduire dans le calcul de son revenu imposable.

Les cotisations après le décès dans un CELI ne sont pas permises, même si le défunt détenait encore des droits de cotisation; elles le sont cependant dans un REER, d’où la pertinence, dans une situation où le décès est prévisible, de faire cotiser un particulier avant, si jamais ces sommes pouvaient être effectivement transférées au CELI de son conjoint, à la suite du décès.

 

Les retraits

 

Les retraits du CELI sont sans effet sur les prestations des régimes de retraite publics. Ceux du REER doivent être ajoutés au revenu imposable et sont donc susceptibles de les diminuer.

À la différence du REER dont les montants retirés ne peuvent pas être cotisés, un retrait du CELI, incluant toute forme de rendement ou de perte, a pour effet de rétablir un droit de cotisation égal à ce retrait pour l’année civile suivante ou pour toute autre année subséquente. Autrement dit, il est possible de cotiser de nouveau l’équivalent du montant retiré.

 

L’imposition

À l’inverse du REER :

  1.  les cotisations au CELI ne sont pas déductibles du revenu imposable;
  2. les retraits du CELI ne sont pas imposables, pas plus que les rendements (intérêts, dividendes ou gains en capital) qu’ils génèrent, à l’exception des revenus considérés comme ayant été gagnés par de la spéculation sur séance (day trading). Les retraits du CELI ne sont pas considérés non plus dans le calcul des prestations de la pension de sécurité de la vieillesse (PSV) ou du supplément du revenu garanti (SRG).

Le décès

Au décès, le CELI du défunt (marié ou vivant en union de fait) n’est pas imposé et le conjoint survivant peut ajouter, dans son propre CELI, les sommes accumulées par son conjoint décédé, sans pour autant affecter ses droits de cotisation. Le REER du défunt, lui, est l’objet d’une imposition au décès, à moins qu’il ne soit transféré au conjoint, à un enfant mineur ou à un enfant handicapé à charge. Contrairement au REER, une seule option de transfert est disponible pour le CELI au décès : vers celui du conjoint. Le cas échéant, ce transfert assurerait que les revenus futurs du CELI demeurent à l’abri de l’impôt.

Les revenus gagnés dans le CELI après le décès du détenteur pourraient être imposables, alors que ceux accumulés avant demeurent exonérés d’impôt.

Le transfert

Selon la structure du CELI, le transfert vers celui du conjoint peut revêtir trois formes différentes :

  1. les contrats de rente (par exemple, les fonds distincts distribués par les assureurs);
  2. les arrangements en fiducie;
  3. les contrats-dépôts (auprès d’une banque).

Au décès, deux options permettent le transfert vers le CELI du conjoint :

  1. l’utilisation du concept de « titulaire remplaçant »;
  2. le transfert indirect.

La première (titulaire remplaçant) assure la continuation du CELI au nom du conjoint et correspond en pratique à un transfert direct. Au Québec, cette option n’est disponible qu’avec le contrat de rente. Pour les arrangements en fiducie et les contrats-dépôts, il faut utiliser le transfert indirect.

Dans ce cas, le conjoint survivant reçoit un montant provenant de l’arrangement qui a cessé d’être un CELI au moment du décès. Il doit cotiser le montant touché dans son propre CELI en le désignant « cotisation exclue » (formulaire RC240 de l’Agence du revenu du Canada) dans un délai maximum de 30 jours. Celui-ci commence à courir non pas au décès, mais au moment où le conjoint survivant effectue la cotisation. Toutes ces étapes doivent être complétées avant le 31 décembre de l’année suivant le décès.

Il est important de noter que le montant de la cotisation exclue ne peut pas excéder le moindre du paiement au survivant ou de la juste valeur marchande du CELI au moment décès.

Ce dernier élément implique que toute plus-value du compte entre le décès et le moment de la cotisation exclue sera imposable comme un revenu d’intérêt.

Exemple

Jean décède le 1er septembre 2018 et la valeur de son compte CELI s’élève à 75 000 $. France, sa conjointe, reçoit la somme après la liquidation de la succession, le 1er novembre 2019, alors que le CELI vaut 80 000 $. À titre de conjointe survivante, elle pourra verser 75 000 $ dans son propre CELI et disposera d’un délai de 30 jours pour déclarer ce montant « cotisation exclue » sans diminuer ses propres droits de cotisations au CELI. Le rendement de 5 000 $ (80 000 $ – 75 000 $) sera imposable.

On notera que les actifs du CELI d’un défunt pourraient être transférés sous les deux options au CELI du conjoint survivant (marié ou de fait) sans réduire les droits de cotisation existants de ce dernier. Enfin, comme indiqué précédemment, il n’est pas possible de cotiser au CELI après le décès.

Le divorce

Advenant la rupture du mariage ou de l’union de fait, il est possible de transférer une somme directement du CELI d’un conjoint à celui de l’autre sans modifier les droits de cotisation de l’un ou l’autre des conjoints. Toutefois, les actifs du CELI ne sont pas considérés dans le calcul du patrimoine familial.

Il faut noter cependant qu’en dépit de la possibilité de transférer le CELI d’un conjoint à l’autre, il peut s’avérer plus avantageux, pour la personne qui détient le CELI, de retirer les sommes et d’acquitter ensuite sa dette envers l’ex-conjoint. Ce faisant, le détenteur du CELI se constitue de nouveau une nouvelle marge pour l’année suivante.

La faillite

En cas de faillite, le CELI est saisissable, contrairement au REER qui, lui, est insaisissable, exception faite des cotisations qui y ont été versées moins de 12 mois avant la faillite.

En conclusion

Le CELI est un outil d’épargne privilégié par un nombre sans cesse croissant de particuliers parce qu’il constitue un complément de choix au REER pour la retraite. Dans certains cas, il peut même s’avérer plus avantageux si l’on s’assure de bien comprendre ses particularités pour pouvoir en tirer le maximum de bénéfices.