/  01 décembre 2024

Le départ à la retraite : répercussions sur votre société par actions

Vous exercez la médecine par l’entremise de votre société par actions (SPA) et vous songez à cesser votre pratique et prendre votre retraite bientôt ? Voici vos principales obligations gouvernementales et administratives en ce qui concerne votre SPA.

Qu’advient-il de votre société par actions à compter de votre retraite ?

Lorsque vous exercez la médecine via votre SPA, vous agissez à titre d’employé de celle-ci, que vous receviez un salaire ou non pour vos services d’omnipraticien. Votre SPA exploite, par votre entremise, une entreprise de prestation de services médicaux.

Avant votre retraite, votre société exploite généralement deux entreprises distinctes :

  1. une entreprise médicale
  2. une entreprise de placements (titres financiers et/ou biens immeubles), dont la source de fonds provient des profits tirés de l’entreprise médicale

Le Collège des médecins du Québec est clair à cet égard : la réglementation n’interdit généralement pas à votre société médicale d’investir ses surplus de liquidités dans des placements.

Lorsque vous prenez votre retraite et que vous cessez définitivement d’exercer la profession médicale, il y a cessation de l’exploitation de l’entreprise médicale pour votre société. L’entreprise de placements peut, quant à elle, demeurer active. Dans le langage commun, votre société se qualifie dorénavant en tant que société de gestion de placements.

Plusieurs omnipraticiens se demandent s’il faut alors procéder immédiatement à la liquidation/dissolution de la société. Il n’y a aucune obligation à cet égard et une telle décision vous revient. Toutefois, si votre société a accumulé des placements ou détient une police d’assurance vie, il faut savoir que sa liquidation déclenche généralement des incidences fiscales majeures, surtout si les sommes accumulées sont importantes. Dans ce cas, conserver sa SPA pourrait être pertinent afin qu’elle puisse vous verser des fonds tout au long de votre retraite.

Si vous décidez de maintenir l’existence de votre société après votre départ à la retraite, voici le résumé de diverses obligations gouvernementales et administratives à considérer.

Collège des médecins du Québec

Prendre votre retraite et cesser définitivement l’exercice de médecine vous amènent à informer le Collège par une Déclaration modificative afin de mettre à jour les renseignements présentés dans la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société, produits auparavant par votre SPA. Puisque vous démissionnez du tableau de l’ordre, le Collège retirera à votre société l’autorisation d’être une société médicale. Cette déclaration modificative doit être transmise au Collège dans les 30 jours suivant votre démission.

Dans le cas où votre société attendrait de recevoir des sommes dues provenant de la pratique médicale, vous pourrez demander au Collège d’être inscrit comme « membre inactif » au tableau de l’ordre. Votre société sera toujours autorisée à exercer la médecine.

Ensuite, dès que votre société n’est plus autorisée à exercer la médecine, elle n’est plus soumise aux restrictions quant à l’identité de ses actionnaires et de ses administrateurs ni quant aux mentions obligatoires à indiquer dans ses statuts constitutifs, comme prévu par l’article 1 du Règlement sur l’exercice de la profession médicale en société.

Législation régissant votre SPA

Votre société peut avoir été constituée en vertu de la loi québécoise ou fédérale. Elle devra déposer auprès des autorités compétentes des statuts de modification pour remplacer sa dénomination sociale afin d’y retirer toute mention indiquant qu’il s’agit d’une société médicale (par exemple, Docteur(e), Dr(e), médecin, M.D., services médicaux, etc.).

Ces statuts de modification devront également prévoir le retrait des mentions obligatoires exigées par l’article 1 du Règlement sur l’exercice de la profession médicale en société.

Registre des entreprises du Québec

Puisque votre société exploite son entreprise au Québec, elle devra produire une Déclaration de mise à jour courante auprès du Registraire des entreprises du Québec, que sa loi constitutive soit québécoise ou fédérale.

Cette déclaration devra indiquer la nouvelle dénomination sociale de la société et également prévoir la modification de la description de son activité économique et du code d’activités économiques (CAE). Toute référence à une activité médicale devra être supprimée. Généralement, les activités de la société seront dorénavant rattachées uniquement à son entreprise de placements.

La Déclaration de mise à jour courante doit être produite dans les 30 jours du changement de la dénomination sociale et de la cessation de l’exploitation de l’entreprise médicale.

Si votre société a été constituée en vertu de la loi fédérale, vous devrez aussi en informer Industrie Canada.

Agence du revenu du Canada et Revenu Québec

Vous devez aviser les autorités fiscales du changement de raison sociale de votre société par actions via « Mon dossier d’entreprise » au fédéral et « Mon dossier » pour les entreprises au Québec.

Lors de la préparation des prochaines déclarations annuelles de revenus T2 (fédéral) et CO-17 (Québec), votre comptable pourra y indiquer la nouvelle dénomination sociale. Il pourra aussi modifier le secteur d’activité de la société : remplacer les activités médicales par les activités de placements.

Les notes aux états financiers de la société devront aussi être modifiées afin d’y indiquer le changement des activités principales de la société.

Impôts sur le revenu de votre société

Pour votre SPA, votre retraite définitive entraînera la fin de l’exploitation de son entreprise médicale. Aux fins comptables et fiscales, il n’y aura plus de revenus provenant d’une entreprise exploitée activement. Dorénavant, seuls des revenus passifs de placement (intérêts, dividendes, revenus de placement étrangers, gains en capital et parfois des revenus locatifs) seront encore présents. Cela pourrait entraîner des conséquences à l’égard de certains biens amortissables qui étaient utilisés dans l’entreprise médicale.

Décaissement de votre société à la retraite

Il est généralement recommandé d’obtenir une planification financière pour le décaissement de vos actifs financiers à la retraite, ce qui comprend le décaissement de dividendes provenant de votre société.

Si votre conjoint(e) est également actionnaire de votre société, des dividendes pourront aussi lui être versés dans le but de réduire les impôts sur le revenu pour le couple. Sous réserve de certaines exceptions, le fractionnement des dividendes entre conjoints ne pourra être effectué qu’à compter du 1er janvier de l’année des 65 ans du médecin. Si votre conjoint(e) n’est pas déjà actionnaire, il sera généralement trop tard.

Si les actions de votre société sont détenues par une fiducie familiale, vous pourriez envisager de liquider celle-ci et répartir ensuite les actions entre les deux conjoints. Cette décision nécessite toutefois l’obtention de conseils spécialisés en matière fiscale, juridique et financière.

Obligations professionnelles

Voici une liste d’autres obligations d’ordre professionnel dont vous devez tenir compte lorsque vous envisagez de cesser d’exercer votre profession médicale, et ce, que vous ayez une société médicale ou non :

  • informer vos patients
  • aviser le Collège et la RAMQ
  • prendre les mesures nécessaires concernant les dossiers médicaux de vos patients
  • aviser votre assureur en responsabilité professionnelle (ACPM ou assureur privé) et vérifier si vos protections vous couvrent à votre retraite à l’égard de toute faute professionnelle survenue avant la retraite
  • informer la FMOQ

Pour plus d’informations, vous pouvez consulter les sites Internet du Collège, de la RAMQ et de la FMOQ.

Obligations contractuelles

Il est également recommandé de revoir certains contrats que vous (ou votre société) avez signés dans le cadre de votre pratique médicale afin de bien identifier les conséquences de la retraite : contrat d’association conclu avec d’autres omnipraticiens, bail commercial, contrat de prestation de services avec une clinique médicale et entente GMF.

Cet article présente des informations générales, il est donc recommandé d’obtenir des conseils adaptés à votre situation particulière auprès de professionnels expérimentés.


Ronald Miglierina, planificateur financier, notaire et fiscaliste