Comment aider mes enfants de mon vivant sans affecter ma retraite ?
Alors que le coût de vie n’a cessé de croître au cours des dernières années, beaucoup de jeunes adultes ont du mal à accumuler les fonds nécessaires pour accéder à la propriété. Dans ce contexte, de nombreux parents médecins s’interrogent sur leur capacité à donner, dès maintenant, une partie de leur patrimoine à leurs enfants, tout en respectant leur plan de retraite. Selon Shahla Tabti, représentante-conseil adjointe et gestionnaire de portefeuille – Gestion privée Fonds FMOQ, il est essentiel de réaliser une planification financière, avec et sans don, pour évaluer ses options.
La clé : bien planifier le don
Odile a 66 ans, son espérance de vie supposée est de 95 ans. Les actifs d’Odile sont constitués de 1 000 000 $ en régime enregistré d’épargne-retraite (REER), de 120 000 $ dans un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) et de 1 000 000 $ dans un compte non enregistré. L’exercice de planification tient compte d’une inflation de 2,1 %, d’un rendement de 4 % et d’un coût de vie annuel de 84 000 $ (indexé annuellement). Chaque année, une cotisation au CELI est faite à partir du compte non enregistré.
Le tableau suivant compare les deux scénarios (tableau). L’analyse montre qu’il reste suffisamment d’actifs successoraux au décès. Cela veut dire que le coût de vie annuel projeté sera amplement couvert année après année, malgré des dons totalisant 200 000 $.
Tableau : Comparaison des deux scénarios
Actif au décès, FERR |
Actif au décès, CELI |
Actif au décès, non enregistré |
|
Aucun don | 421 749 $ | 738 002 $ | 230 393 $ |
Don de 50 000 $ par an de 2025 à 2028 | 421 749 $ | 459 406 $ | 0 $ |
Aider au bon moment
Comme dans le cas d’Odile, c’est avec une planification financière rigoureuse que l’on peut savoir combien donner et quand. Les bienfaits de donner de l’argent à vos enfants sans attendre sont nombreux. Shahla Tabti souligne que l’avantage principal est d’aider au bon moment, lorsque les enfants, devenus adultes, en ont le plus besoin. « Si vous donnez une somme à votre enfant, alors qu’il a 30 ans, pour acheter sa première maison, l’impact sur sa vie sera plus important que si vous lui léguez des dizaines d’années plus tard, à votre décès, alors qu’il aura constitué son propre patrimoine. ».
Ou encore, votre ou vos enfants pourront dès maintenant utiliser ces fonds pour commencer à créer leur propre patrimoine, et épargner pour prévenir les impacts financiers d’éventuelles périodes difficiles comme une séparation ou une perte d’emploi. En ce qui vous concerne, il faut toutefois prendre en compte l’impôt qui peut être à payer l’année du retrait. Pour l’enfant, il n’y aura aucune incidence fiscale, puisque le don ne s’ajoute pas à son revenu imposable.
Au décès, la facture d’impôt sur vos placements risque d’être plus élevée que celle qui s’appliquerait à un retrait aujourd’hui. Donner de son vivant prend, encore là, tout son sens. Un choix qui devient encore plus significatif depuis les changements annoncés à l’impôt sur le gain en capital par le gouvernement fédéral à partir de juin 2024 : les profits supérieurs à 250 000 $ seront désormais imposés à un taux de 66 % au lieu de 50 %. Cependant, étant donné le contexte politique canadien, ces mesures pourraient être annulées rétroactivement
Équité et protection
Donner de l’argent de son vivant ne présente pas que des avantages. « Donner, c’est donner, aussi il ne faut pas espérer récupérer votre don un jour, par exemple s’il y a des tensions dans la famille », souligne Shahla Tabti. L’équité dans la fratrie peut être une source fréquente de tensions, et il est important de prévoir une répartition équilibrée. « Si vous avez plusieurs enfants, votre planification financière devrait en tenir compte. Par exemple, vous pourriez donner de l’argent à vos deux enfants de manière égale tout de suite, ou choisir de favoriser celui qui en a le plus besoin dans l’immédiat, tout en prévoyant une compensation pour l’autre dans votre testament ».
Par ailleurs, Shahla Tabti recommande toujours à ses clients de documenter leur don auprès d’un notaire afin de protéger l’enfant, un don ne faisant pas partie du patrimoine familial. Dans le cas d’Odile par exemple, si elle donne de l’argent à sa fille pour sa mise de fonds sur une maison achetée en couple, il faut prévoir d’exclure le don et son rendement du partage des biens en cas de séparation.
Planifier un don d’argent est essentiel. Une étude de votre situation réalisée avec rigueur et objectivité permet d’évaluer, entre autres, les répercussions financières, fiscales et celles liées à l’équité entre frères et sœurs.
Shahla Tabti, Pl.Fin.,CIMMD
Représentante-conseil adjointe et gestionnaire de portefeuille – Gestion privée Fonds FMOQ
*Prénom fictif. Avis de non-responsabilité : des simulations personnalisées sont nécessaires.