Survol des marchés financiers | Fiera Capital – Juin 2024
Contexte économique
Après un premier trimestre relativement robuste, la croissance de l’économie mondiale a été moins forte au deuxième trimestre. Aux États-Unis, la croissance de l’emploi a ralenti, mais le marché de l’emploi demeure tendu. Le taux de chômage demeure faible et le nombre des offres d’emploi, bien qu’en baisse, reste élevé comparé au niveau d’offre pré-pandémique. Malgré un ralentissement de la croissance du PIB, la demande pour les services s’est accélérée. C’est pourquoi, les prix des services augmentent, nuisant ainsi au combat contre l’inflation. Ce contexte a incité la Réserve fédérale américaine (la Fed) à repousser la première baisse de son taux directeur.
Au cours des derniers mois, la croissance du PIB au Canada a été supérieure aux attentes. Il importe de mentionner que cette croissance est surtout attribuable à l’augmentation exceptionnelle de la population canadienne. Si on examine plutôt le PIB per capita, on réalise que l’économie canadienne traverse une période de déclin. Elle progresse maintenant à un rythme inférieur à son potentiel. La croissance de l’emploi accuse aussi un retard sur celle de la population. Les tensions sur le marché du travail se sont relâchées de sorte que l’inflation des salaires ne constitue plus une menace. Les hausses de taux d’intérêt affectent de plus en plus ménages et entreprises : ils doivent faire des choix et concentrer leurs dépenses sur les biens et services essentiels. Par ailleurs, la baisse de l’inflation semble s’enraciner de plus en plus profondément. Ce contexte a incité la Banque du Canada à procéder, le 5 juin dernier, à une première baisse du taux directeur.
En Europe, l’inflation mesurée par les prix à la consommation a continué de se rapprocher de la cible de 2 %. On a également observé une baisse de l’inflation sur les prix des services, passée désormais sous la barre des 4 %. Lors de sa rencontre du 6 juin dernier, la Banque centrale européenne (BCE) a décidé d’abaisser de 0,25 % ses taux directeurs. Parallèlement, la BCE a augmenté ses prévisions de croissance du PIB en zone euro : celui-ci devrait croître de 0,9 % en 2024 et de 1,4 % en 2025.
Les données économiques en provenance de la Chine soulignent que la deuxième économie mondiale continue de souffrir de déséquilibre entre l’offre et la demande. Cela suscite des doutes quant à la durabilité de la reprise économique. Au printemps, la croissance de la production industrielle s’est accélérée alors que la consommation et l’investissement privé se sont détériorés. Les énormes difficultés du secteur immobilier ont constitué le principal frein à l’investissement. Les autorités misent sur la croissance des exportations pour compenser la baisse de la consommation intérieure.
Le prix du pétrole brut (WTI) se négociait à environ 83 $ US à la fin mars. Malgré l’intention des pays de l’OPEP de limiter la production, le prix du pétrole s’est maintenu. On observe une augmentation de la production des pays non membres de l’OPEP. Cela crée une situation de surplus de production qui limite la hausse de prix souhaitée par l’OPEP. En fin de trimestre, le baril de pétrole se négocie à environ 82 $ US.
Politique monétaire et titres à revenu fixe
Durant le deuxième trimestre, les différents indicateurs d’inflation ont continué de progresser dans la bonne direction. Le ralentissement de l’activité économique et la baisse des taux d’inflation ont incité plusieurs banques centrales à abaisser les taux directeurs.
Après les banques centrales de Suisse et de Suède, le 5 juin, la Banque du Canada a décidé d’abaisser son taux directeur de 0,25 % : l’inflation baissant, elle a estimé que la politique monétaire n’avait plus besoin d’être aussi restrictive. La croissance moins forte que prévu du PIB réel a également été prise en compte. En outre, la Banque a mentionné que la croissance de la population dépassait celle de l’emploi. Cette situation a permis à l’offre de main-d’œuvre de pourvoir les postes vacants, contribuant ainsi à faire ralentir graduellement la croissance des salaires. Le 25 juin, les données d’inflation de mai ont été publiées. La hausse de 2,7 % à 2,9 % du taux d’inflation a surpris les analystes. Elle a aussi refroidi les attentes des investisseurs quant au rythme des prochaines baisses du taux directeur au Canada.
Le 6 juin, la Banque centrale européenne a emboité le pas du Canada en abaissant à son tour ses taux directeurs de 0,25 %. La BCE a fait fi de la croissance de plus de 4 % des salaires. Elle semble rassurée par le fait que les entreprises ont tendance à absorber les hausses des salaires en réduisant leurs bénéfices plutôt que d’augmenter leurs prix. Dans l’ensemble, l’inflation devrait atteindre 2 % d’ici 18 mois. En attendant, les investisseurs se questionnent sur le rythme des prochaines baisses de taux en Europe. On peut croire que la réduction sera très graduelle pour le reste de 2024. Notons par ailleurs que la Banque d’Angleterre n’a pas modifié son taux directeur à cause, notamment, de l’inflation persistante du côté des services.
Aux États-Unis, la situation est bien différente. Le 12 juin, la Fed a encore une fois décidé de maintenir son taux directeur. Plusieurs facteurs justifient sa décision : l’activité économique a continué de progresser à un rythme solide ; la création d’emplois demeure forte ; et l’inflation progresse trop lentement vers la cible de 2 %. En cette fin du deuxième trimestre, la Fed ne juge pas opportun de réduire la fourchette cible du taux directeur tant qu’elle n’est pas certaine que l’inflation se dirige durablement vers 2 %. Lors de sa rencontre de juin, la Fed a publié ses plus récentes prévisions économiques. Elle a augmenté de 0,2 % ses prévisions du taux d’inflation moyen pour 2024, ce qui indique qu’elle risque de procéder à la première baisse de taux directeur vers la fin de 2024.
Dans ce contexte, les taux obligataires américains ont évolué en dents de scie durant le trimestre. Après une forte augmentation en avril, ils sont revenus lentement près du niveau du début du trimestre. Au Canada, le rendement des obligations à échéance de 10 ans a diminué d’environ 0,25 %, soit une diminution équivalente à la baisse du taux directeur. Cela a contribué au rendement positif du marché obligataire canadien.
Le dollar canadien a été sous l’influence du mouvement des taux d’intérêt. Au début du trimestre, il se négociait à 0,7370 $ US. Puis, il a touché un creux de 0,7230 $ US à la mi-avril, lorsque les taux obligataires américains ont fortement augmenté. Il s’est ensuite renforcé, pour fléchir à nouveau début juin, lorsque la Banque du Canada a abaissé son taux directeur. Il a terminé le trimestre à environ 0,7325 $ US.
Marchés boursiers
Après un bref recul en avril, le marché boursier américain a repris sa tendance à la hausse en mai et juin. La hausse des cours n’est toutefois pas généralisée. Elle est attribuable à la forte progression des titres de technologie, des télécommunications, des services publics et de la consommation de base. Les autres secteurs du S&P 500 accusent de légers reculs trimestriels. Il faut dire que l’optimisme des investisseurs a été refroidi par le discours des dirigeants de la Fed. Tout porte à croire que la première baisse de taux directeur ne sera décrétée qu’après les élections présidentielles de novembre.
L’écart entre les marchés boursiers canadien et américain s’est creusé durant le deuxième trimestre. Les bénéfices des sociétés canadiennes paraissent davantage affectés par la politique monétaire restrictive. Par ailleurs, les investisseurs étrangers semblent bouder le marché boursier canadien. À cet effet, d’importantes sorties de fonds ont été effectuées par ces derniers au cours des derniers mois.
Au cours du deuxième trimestre, les actions canadiennes de petite capitalisation ont fait du surplace. La bonne tenue des secteurs des ressources naturelles (énergie et matériaux) a été annulée par les difficultés de plusieurs titres des secteurs de la consommation discrétionnaire et des produits industriels.
À l’horizon
Après des mois d’attente, une étape importante dans la conduite des politiques monétaires a été franchie. La décision de la Banque du Canada et de la BCE d’assouplir leurs politiques monétaires en abaissant les taux donne une dose d’air frais aux consommateurs et aux entreprises.
En Amérique du Nord, le maintien durant une longue période de taux d’intérêt élevés a été crucial pour ramener l’inflation vers la cible de 2 % fixée par les banques centrales. La bonne nouvelle est que cette période de combat contre l’inflation n’a pas provoqué de récession importante. Les marchés financiers n’ont pas été bouleversés outre mesure par l’austérité monétaire des banques centrales. La situation particulière du marché de l’emploi a aidé à soutenir l’activité économique au Canada comme aux États-Unis.
On peut donc dire que l’atterrissage en douceur de l’économie, tant souhaité, est en train de se matérialiser. Cette situation devrait persister au cours des 12 à 18 prochains mois.
Durant cette période, l’inflation continuera à se rapprocher des cibles et les banques centrales pourront accélérer la baisse des taux directeurs.
À court terme, les baisses de taux directeurs ne seront pas nécessairement synchronisées. L’économie canadienne a souffert davantage de la période de taux élevés. C’est pourquoi la Banque du Canada devrait abaisser son taux directeur plus rapidement que la Fed. Suite à cela, le dollar canadien pourrait être temporairement affecté. Il devrait remonter lorsque le rythme de la croissance économique s’accélérera.
La réalisation de cet atterrissage en douceur permettra le début d’un nouveau cycle économique. Au cours des 12 à 18 prochains mois, les marchés boursiers devraient donc connaître une période faste. Les rendements boursiers pourraient largement dépasser ceux des obligations.
En début de cycle économique, les actions des pays émergents et le marché boursier canadien sont normalement privilégiés. Ces marchés ont récemment accusé un peu de retard sur le marché boursier américain. Sur la base des ratios cours/bénéfices, le marché boursier canadien constitue actuellement une aubaine, par rapport au marché américain.
À cet égard, dans les portefeuilles équilibrés où la politique nous le permet, nous surpondérons actuellement les actions canadiennes et celles des pays émergents. En contrepartie, nous sous-pondérons légèrement les actions américaines et celles des autres marchés étrangers développés.