Techniques de sélection de titres
Nous terminons ici notre série de quatre articles consécutifs sur les méthodes utilisées pour sélectionner les titres d’un portefeuille dit «à risque». Dans le présent article, nous vous présentons les approches ascendante et descendante ainsi qu’une vue d’ensemble des techniques de sélection de titres.
Si vous êtes de ceux pour qui un score moyen, tout intéressant qu’il soit, est un seuil minimal que vous cherchez constamment à dépasser, il vous faudra normalement consacrer du temps à constituer, parmi le vaste éventail des choix possibles, le groupe de valeurs qui offrent, selon votre évaluation, les meilleures perspectives de rendement, compte tenu du risque que vous êtes prêt à prendre. Le premier choix méthodologique que vous effectuerez sera celui de l’approche descendante ou ascendante.
Approche descendante
L’approche descendante consiste à aborder le problème de la constitution d’un portefeuille de valeurs mobilières en partant du plus général, l’économie dans son ensemble, pour aboutir graduellement au plus spécifique, le choix d’une valeur précise de placement à un prix donné. La démarche logique suivie par l’adepte de l’approche descendante est la suivante :
- Analyse de la situation de l’économie dans son ensemble pour déterminer les grandes tendances (taux de croissance, inflation, investissements, commerce extérieur, etc.) et mesure des répercussions sur les principaux secteurs d’activité industrielle;
- Analyse des secteurs industriels les plus prometteurs;
- Analyse des entreprises les mieux positionnées à l’intérieur des secteurs ciblés;
- Analyse du prix des valeurs de placement que le gestionnaire pourrait inclure dans son portefeuille.
Si cette démarche vous est familière, cela est peut-être dû au fait que cette «grille d’analyse» est celle que suit la presse financière de l’économie et du monde financier. Regardons de plus près les étapes de cette démarche.
Analyse de la situation de l’économie
L’activité économique évolue par cycles plus ou moins réguliers, un peu comme les vagues qui déferlent sur une plage. Une période d’expansion est suivie d’un certain essoufflement pour ensuite faire place à une récession, puis à un plancher et, enfin, à une reprise de l’activité économique. Dans le passé, la durée de vie d’un cycle économique complet pouvait avoir entre 15 mois et 12 ans. Les cycles économiques qui se sont succédés depuis 1980 ont tous été relativement long. Un cycle complet se compose de quatre phases. Il touche l’ensemble de l’économie, non seulement un secteur d’activité ou une industrie en particulier. La progression du cycle économique est annoncée, établie ou confirmée par des signes révélateurs. On divise ces signaux d’alarme en trois groupes :
- Les indicateurs précurseurs. Ces derniers réagissent avant que ne survienne un changement à l’intérieur du cycle économique. Ils ont pour effet de devancer les revirements de tendance. En voici quelques exemples :
• l’indice avancé composite de la Bourse de Toronto (S&P TSX);
• les mises en chantier;
• l’indicateur composite avancé de Statistique Canada.- Les indicateurs simultanés ou coïncidents. Les derniers ont pour principale caractéristique de suivre de près les revirements qui se produisent dans l’économie. Ils servent à confirmer une nouvelle tendance plutôt qu’à la prévoir. En voici quelques-uns :
• le produit intérieur brut (PIB);
• le revenu des particuliers;
• le taux de chômage.- Les indicateurs retardataires. Enfin, ces indicateurs sont ceux dont le revirement se produit après celui de l’économie prise dans son ensemble. On retrouve, parmi eux :
• le crédit à la consommation;
• les investissements en biens de production.Analyse des secteurs industriels
Les perspectives de croissance d’une entreprise et ses chances de réussite dépendent évidemment de la qualité de la gestion et de la pertinence de sa stratégie commerciale. Cependant, le choix des domaines où elle exerce son activité économique se révélera déterminant en ce qui a trait aux occasions favorables et aux contraintes que l’entreprise rencontrera. Comme point de départ, on peut utiliser la subdivision en secteurs industriels de l’indice composé de la Bourse de Toronto (S&P TSX) et de l’indice Standard and Poor 500:
• Biens de consommation discrétionnaire
• Biens de consommation de base
• Métaux et minerais diversifiés
• Énergie
• Services financiers
• Industries de la santé
• Biens industriels
• Technologies de l’information
• Matériaux
• Immobilier
• Télécommunications
• Services aux collectivitésAnalyse des entreprises et du prix des valeurs de placement
Lorsqu’il a repéré les secteurs qui répondent à ses critères de risque et de rentabilité, l’investisseur qui recourt à l’analyse descendante voudra évidemment trouver les entreprises les plus intéressantes pour son portefeuille d’actions. Pour ce faire, il peut utiliser les fonctions de filtres qu’on retrouve des sites Web comme globeinvestor.comet Yahoo !Finance.
Il pourra également appliquer les outils de l’analyse fondamentale et de l’analyse technique que nous avons vus dans un article précédent. Mentionnons que ces outils peuvent également être employés au moment de l’analyse des secteurs industriels.
Approche ascendante
Les partisans de l’approche, popularisée et mise au point par un pionnier de l’investissement stratégique, Benjamin Graham, croient qu’en analysant de près la gestion et la situation financière de plusieurs entreprises, ils pourront dénicher de véritables aubaines qui deviendront des placements très fructueux. Pour eux, il est relativement peu important de s’attarder à la situation de l’économie parce que la tendance à très long terme est à la hausse depuis longtemps et qu’il devrait continuer d’en être ainsi dans un avenir proche. Quant à l’importance d’investir dans des entreprises des secteurs prometteurs, cela ne semble pas essentiel pour le célèbre investisseur Warren Buffet, pour qui il est possible, par exemple, de réaliser des profits exceptionnels en sachant déterminer correctement l’entreprise qui réussira à dominer la phase de déclin de son industrie, situation qu’ont connue ces dernières années des industries telles que celles de la lampe-radio et de la machine à écrire.
En notre époque de globalisation des marchés et de constitution de très grandes entreprises, il peut sembler difficile ou même impossible d’effectuer des analyses rigoureuses en ayant accès directement aux installations des entreprises. Reconnaissons, cependant, que la révolution des technologies de l’information et le resserrement des contrôles réglementaires rendent disponible une information fiable et volumineuse sur la très grande majorité des entreprises. En plus de la couverture accordée à l’actualité financière, on trouve aussi des ouvrages, tels que ceux de Jim Collins, qui passent au crible les stratégies de plusieurs entreprises au fil des décennies .
Vue d’ensemble des méthodes de sélection des titres
Pour conclure ce survol des approches en matière de sélection de titres, mentionnons que celles-ci ne doivent pas être perçues comme s’excluant mutuellement, même si cela est parfois le cas. Par exemple, un adepte de l’analyse technique pourra procéder à l’aide de l’approche descendante et effectuer une gestion active de son portefeuille.
La figure montre quelques-unes des possibilités de l’éventail des combinaisons potentielles.
Même si, théoriquement, toutes les possibilités peuvent se concrétiser dans le style de gestion adopté d’un investisseur choisi au hasard, force est de reconnaître que certaines combinaisons sont plus probables que d’autres. Par exemple, un investisseur se situant à l’une ou à l’autre des extrémités sur le continuum Fondamental-Technique sera moins susceptible de recourir à une gestion passive, précisément parce qu’il voudra que le type d’analyse qu’il privilégie soit utilisé afin de générer des rendements supérieurs.
Avec cet article, nous terminons une série qui a principalement porté sur la sélection des titres à inclure dans un portefeuille de valeurs à risque. Les méthodes présentées sont celles qu’utilisent les investisseurs particuliers et professionnels pour choisir les valeurs spécifiques qui composent leurs portefeuilles. En les utilisant à bon escient et en ayant recours également à des méthodes qui portent sur la composition du portefeuille, on améliorera de façon considérable les chances d’obtenir de bonnes performances dans la gestion du portefeuille d’actions.