Vente de sa résidence secondaire : comment réduire sa facture fiscale ?
Mise en situation
Marie-Claude*, omnipraticienne de 62 ans, possède un appartement et un chalet qu’elle utilise quelques semaines par an. Elle souhaite vendre le chalet et désire connaître ses options pour optimiser sa vente d’un point de vue fiscal.
Marie-Claude a acheté son chalet il y a 25 ans au prix de 150 000 $. Elle a dépensé 100 000 $ en rénovations depuis, pour lesquelles elle a conservé ses factures. Si la vente est réalisée au prix de 600 000 $, son gain en capital constitue 350 000 $ (gain en capital = prix de vente 600 000 $ – [prix d’achat 150 000 $ + rénovations 100 000 $]).
Quelles solutions s’offrent à Marie-Claude pour réduire les incidences fiscales d’un gain en capital important ?
Analyse et recommandations
Selon les règles en vigueur, du montant de gain en capital de 350 000 $, seuls 50 % sont déclarés comme gain en capital imposable. Toutefois, si les récentes propositions budgétaires sont adoptées et que la transaction a lieu après le 25 juin 2024, la première tranche de 250 000 $ bénéficiera d’un taux d’inclusion du gain en capital de 50 % alors que l’excédent sera majoré à 66,67 %. Dans sa déclaration de revenus, Marie-Claude devra donc ajouter à son revenu un gain en capital imposable de 175 000 $ (191 670 $ si la transaction a lieu après le 25 juin 2024), assujetti à l’impôt selon son taux d’imposition personnel marginal (53,3 %, ce qui représente environ 93 275 $ selon les règles avant le 25 juin et 102 160 $ après cette date, soit une différence de 8 885 $).
Marie-Claude devrait passer en revue tous les points ci-après avec son planificateur financier afin de trouver des pistes d’optimisation de sa fiscalité.
Utiliser l’exemption pour résidence principale
Cette option consiste à exonérer d’impôt le gain sur la résidence principale. Il n’est pas nécessaire que le bien soit utilisé en tant que résidence principale au sens strict du terme. Marie-Claude peut désigner son chalet comme résidence principale aux fins fiscales. Le calcul de cette exemption s’effectue comme suit :
Gain en capital x | 1 + nombre d’années de désignation de résidence principale |
nombre d’années où il a été propriétaire |
Cette résidence doit appartenir personnellement au contribuable (ici Marie-Claude) et être normalement habitée au cours de l’année par le contribuable, son conjoint, l’ancien conjoint (qui était marié ou de fait) ou l’enfant du contribuable. L’exonération n’est pas permise dans le cas d’une résidence louée qui n’a jamais été habitée par l’une de ces personnes.
Ce choix n’a pas à être fait avant la vente de l’une des résidences ; il est important de consulter un spécialiste afin de déterminer le meilleur choix dans les circonstances, dès que l’une des résidences est en processus de vente, car l’équation pour le calcul d’exemption pour résidence principale peut être différente suivant les choix faits.
Vérifier son solde de cotisations inutilisées au REER
Si ce solde existe au moment de la vente de la résidence secondaire, Marie-Claude aura tout intérêt à cotiser à ses REER pour réduire les conséquences fiscales de son gain en capital.
Vérifier les pertes en capital nettes déductibles reportées des années antérieures
Si Marie-Claude possède ce type de perte à la suite de la disposition d’autres biens (comme des actions ou fonds communs de placement non enregistrés) dans des années antérieures, elle peut les utiliser à l’encontre du gain en capital imposable créé par la vente de son chalet. Ces pertes en capital nettes sont reportables dans les trois années antérieures et indéfiniment pour le futur.
Augmenter, si possible, le prix de base rajusté de ses résidences
Au coût du bien, on ajoute généralement les dépenses engagées pour en faire l’acquisition, tels que les frais de notaire et les droits de mutation. Le gain en capital sera diminué d’autant, car il correspond à la différence entre le produit de disposition et le prix de base rajusté de l’immeuble.
Marie-Claude pourra aussi inclure les travaux d’amélioration capitalisés apportés au chalet. Ces derniers doivent correspondre à des dépenses de nature capitale, donc réalisées pour augmenter la valeur de l’immeuble, contrairement à des dépenses de nature courante. À titre d’exemple, les rénovations pour un agrandissement de la salle de bain sont des dépenses capitalisables, alors que la réfection du toit ou le remplacement des fenêtres sont généralement des dépenses de nature courante qui ne sont pas déductibles (sauf si l’immeuble est loué).
Utiliser la provision pour gains en capital
La Loi de l’impôt sur le revenu permettrait à Marie-Claude de reporter son gain en capital sur un maximum de 5 ans. Toutefois, le produit de la vente doit également être reporté sur le même nombre d’années choisies, permettant de diminuer la facture fiscale globale, puisqu’en principe, le taux d’imposition ne serait augmenté que partiellement durant ces années.
Cette alternative est souvent recommandée pour les membres d’une famille ou des proches dont on connaît l’historique financier, car elle paraît, certes, avantageuse d’un point de vue fiscal, mais le vendeur prend le risque financier de ne pas être payé en totalité, si la capacité financière de son acheteur diminue au fil des ans. Pour atténuer ces risques, Marie-Claude (qui agit à titre de vendeur) pourrait exiger une hypothèque immobilière sur la propriété vendue, afin de garantir le solde du prix de vente.
Isoler la valeur des biens meubles vendus avec la résidence secondaire
Pour les biens meubles garnissant la résidence et inclus dans la vente (par exemple les électroménagers), il est possible d’isoler leur valeur du produit de disposition de la résidence pour diminuer l’impôt sur le gain en capital. Cette option s’offre à Marie-Claude si elle décide de ne pas bénéficier de l’exemption de résidence principale pour son chalet.
Certains biens meubles, rattachés à son chalet sans en perdre leur individualité, sont considérés par la loi comme des immeubles tant qu’ils restent rattachés à l’immeuble (un spa, une piscine hors terre, un cabanon, etc.). Marie-Claude pourra capitaliser leur coût d’origine à celui de son chalet vendu, ce qui augmentera le prix de base rajusté du chalet et réduira le gain en capital imposable.
Choisir un autre moment pour vendre la résidence secondaire.
Si la vente de son chalet n’est pas nécessaire, Marie-Claude pourrait envisager de le conserver jusqu’à son décès, afin de reporter cet impôt sur le gain en capital. Au moment de son décès, il y aura une disposition présumée de la résidence secondaire déclenchant ainsi l’impôt sur le gain en capital.
Utiliser une police d’assurance vie
Marie-Claude détient une assurance vie d’un montant de 150 000 $. Le produit de cette protection pourrait être utilisé par sa succession, à son décès, pour acquitter les impôts sur le gain en capital déclenché par disposition présumée de son chalet à titre de résidence secondaire.
Cette option devrait être envisagée par Marie-Claude si, finalement, elle décide de ne pas vendre son chalet et souhaite s’assurer que son fils, son seul héritier, ne soit pas dans l’obligation de le vendre pour régler la facture fiscale. Cette protection devrait couvrir, en tout ou en majeure partie, l’impôt sur le gain en capital, permettant ainsi à son fils de conserver le chalet.
Mise en garde
Cet article ne traite pas de toutes les solutions possibles pour réduire l’incidence fiscale d’un gain en capital important ; il ne reflète qu’une situation parmi d’autres. Pour faire le tour complet de toutes les possibilités personnalisées à votre situation, nous vous invitons à communiquer avec un planificateur financier, fiscaliste ou autre professionnel.
*Noms fictifs.